Tribunal J+1

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Ce matin quand j'ouvre mes yeux je ne sais pas trop comment je dois me sentir. Je me sens normale. J'ai l'impression que rien n'est différent, comme si depuis quelques jours le temps était simplement resté sur pause. Est-ce que c'est normal ? Est-ce que tout vas rester comme ça ?

J'inspire un grand coup et m'assoie sur mon lit. J'ai la tête qui tourne et c'est tout sauf agréable. J'ai l'impression qu'un orchestre entier vient de s'enfermer dans mon cerveau et ne cesse de jouer. C'est à la fois horrible et agréable, horrible parce que je n'arrive pas à le stopper et agréable parce qu'au moins je ne pense à rien d'autre.

Je pose mes pieds sur le parquet de ma chambre et au moment où je me met debout ma tête tourne, je m'écrase par terre et en moins d'une seconde c'est le trou noir.

.......bip.......bip.......bip......bip.....

J'entends ce son en continue, il est de plus en plus fort et sa me fait horriblement mal au crâne. Mes yeux commencent finalement à s'ouvrir et la lumière me rend temporairement aveugle si on peut dire. J'ai du mal à faire le point, je vois du blanc, beaucoup beaucoup de blanc partout. Les murs, les meubles... Pourquoi tout est si blanc ?

Je commencent finalement à m'adapter à la lumière et plus je détaille la pièce, plus je comprends ou je suis. Une chambre d'hôpital. Mais qu'est-ce que je fous à l'hôpital au juste ?

- Davina ? À enfin ma puce, tu m'as fait peur.

Je tourne ma tête sur la gauche et la première chose que je vois c'est la main de mon père qui serre la mienne. Il est encore inquiet... Il est toujours inquiet et à cause de moi, sa lui donne des rides et des petits cheveux blancs que je déteste voir.

- Papa...?

- Oui ?

- Qu'est-ce qui ce passe ?

Il me lance un petit sourire rassurant mais je vois bien qu'il n'est pas serein. Sa main vient replacer des mèches de mes cheveux derrière mon oreille avant de me répondre.

- Tu as eu un malaise tout à l'heure, d'après les médecins tu manques de beaucoup de choses et... et tu es beaucoup trop mince... Puis il y a ces petites cicatrices...

Tout en parlant il caresse du pouce la peau fine de mon poignet. Ho non...

- Papa je suis désolée...

- Tu n'as pas à l'être. On parlera plus tard. Pour l'instant je veux que tu te reposes. Je vais aller chercher un café.

Il se lève, embrasse mon front et sort de la chambre. Je le connais suffisamment pour savoir qu'il ne va pas chercher de café, il n'aime pas ça, mais quand il est susceptible de craquer il s'éloigne de moi. Quand maman est partie il a fait la même chose, je ne l'ai jamais vu pleurer... Jamais.

Je jette un rapide coup d'œil autour de moi, je suis branché à des machines, des perfusions et plusieurs choses dont j'ignore totalement l'utilité. Je suis trop mince... C'est vrai que ces derniers temps je ne mange pas beaucoup, je l'avais aussi remarqué que j'avais maigris. Les os de mes hanches par exemples étaient beaucoup plus voyant que d'habitude, mais je me suis toujours sentie plus ou moins bien. Enfin, en quelques sortes...

Et pour finir je regarde mes bras, comme je l'ai déjà fait des centaines de fois. Me faire ces traces aussi stupides que cela puissent paraître m'aide un peu, on se dit qu'au moins on a une bonne raison de souffrir. On ce dit que quelques chose vaut vraiment la peine d'avoir mal et de pleurer, même si à chaque coupure que je m'infligeait c'était son visage à lui que je voyais.

Je devrais me sentir mieux, je devrais être contente, justice a été rendue pourtant c'est comme si rien n'avait changé. Il est en prison, c'est vrai. C'est une chose. Mais en ce qui me concerne je ne vois pas en quoi l'argent va dédommager ce qu'il a fait. Pas même la plus grosse fortune ne pourrait m'aider...

Je secoue la tête, remonte la couverture et ferme mes yeux. Mon père a raison, je devrais me reposer et en plus je n'ai même pas la force de rester éveiller. Je suis vidée de toute mon énergie, tellement que s'en est fatiguant.

Je laisse mes yeux ce refermer et le « bip » régulier du moniteur me bercer. Quand je ne vois enfin que du noir mon cœur se serre. Je ne sais pas trop pourquoi mais j'ai peur, j'ai peur de le revoir comme à chaque fois que le sommeil m'emporte. J'ai peur qu'encore une fois il pose ses mains sur moi et me salisse une fois de plus...

Pourtant quand mon un rayon de lumière vient pointer le bout de son nez et que la chevelure brune d'une femme pointe le bout de son nez je suis soulagée. Soulagée parce que j'ai besoin d'elle plus que de n'importe qui au monde.

- Coucou ma petite fille.

- Maman ?!

Elle hoche la tête et les larmes me montent aux yeux, mes pieds se mettent à marcher rapidement dans sa direction et je la serre aussi fort que possible. Rien n'a changé. Son physique, son odeur, la façon dont elle me serre contre elle... Tout est intacte. Et petit à petit je sens la douleur quitter mon corps. Petit à petit je me sens réellement bien pour la première fois depuis longtemps.

- Tu viens avec moi ?

- Où on va ?

- Chez nous.

Et je n'hésite pas une seule seconde, je pars. J'abandonne ma peine et ma douleur. J'arrête de me prendre la tête et main dans la main avec ma mère un sourire se plaque sur mes lèvres. Pour combien de temps ? Je ne sais pas, ce qui est certain par contre c'est que j'ai enfin trouvé pas rédemption.

Je laisse mon esprit partir, je le laisse s'évaporer. Je quitte un corps pour en trouver un autre dans un sens. Peut-être mieux, peut-être pire on verra. Mais sa n'a aucune importance pour l'instant.

Cher papa //TERMINE// Où les histoires vivent. Découvrez maintenant