Chapitre 2

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Sa jupette volait et tournoyait, emportée par sa rotation

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Sa jupette volait et tournoyait, emportée par sa rotation. Lucia se laissait guider par les pas de danse, ondulant les bras avec précision, comme les ailes d'un oiseau, les jambes tendues et les pointes des pieds faisant de petits mouvements circulaires au sol. L'exercice paraissait sans effort, mais ce n'était qu'une question de pratique et d'habitude. Dans ces moments, Lucia se sentait entière, connectée avec elle-même, seule sur la surface de la Terre et pourtant jamais seule. Ses pieds, en contact avec le sol, supportaient son poids tandis que ses bras donnaient l'impression qu'elle s'envolait. En équilibre sur la pointe de son chausson, ses muscles soumis à la tension intense se raidissaient dans ses cuisses, mais la jeune danseuse maintenait la posture malgré l'effort que cela lui coûtait.

La danse était sa forme de méditation la plus profonde. Rien d'autre n'existait en dehors des enchaînements et du rythme battu par la musique. Elle lui donnait des ailes et Lucia les endossait, avide de s'envoler vers le ciel. Mais plus encore qu'une échappatoire, la danse était son salut et lui permettait de faire taire les cris et les pleurs de son enfance qui résonnaient encore dans sa tête. Ces vieux souvenirs, qui tournaient en boucle comme une ritournelle infernale, et qui avaient la fâcheuse tendance à s'exhumer d'eux-mêmes, ravivant sous la cendre la braise de ses traumatismes.

La voix de la coach la tira de sa rêverie. Le morceau touchait à sa fin et Lucia prit à nouveau conscience du monde qui l'entourait.

— C'est parfait mademoiselle Clark. Pensez à garder la posture jusqu'à la fin la prochaine fois.

Lucia accepta le compliment avec un sourire gêné et regagna sa place.

C'était au tour de Mina de montrer l'étendue de son talent. Le morceau de musique reprit depuis le début lorsque Mina fit signe qu'elle était prête. Ses enchaînements étaient fluides et les poses bien distinctes. De la jeune danseuse se dégageaient une vigueur explosive et une sensualité décomplexée acquises par l'expérience et les milliers d'heures de répétitions. Mina donnait le meilleur d'elle-même et Lucia était en admiration devant son talent.

— Elle est forte notre Mina, pas vrai ?

Daniel Miller vint s'asseoir près d'elle. C'était le jeune prodige de la troupe. Les cheveux châtains, les yeux bleus, la mâchoire carrée, le menton volontaire, de grande taille, il était aimable et modeste. Lucia l'appréciait, mais ne cherchait pas sa compagnie plus qu'une autre.

— Oui, elle est épatante. Elle m'a dit que c'était elle qui avait eu le rôle l'année dernière.

— Ah, oui, c'est notre Mina tout craché. Mais tu as tes chances aussi. Tu as beaucoup progressé avec nous ces derniers mois.

— Tu penses ? fit-elle, cachant ses espoirs.

— Oui, carrément !

Lucia se tapa mentalement sur les doigts lorsqu'elle se surprit à redouter que son interlocuteur se moquait d'elle.

Brasier - La ProieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant