17. Vertuchou

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Vertuchou, interj. [vieux] : Juron marquant l'étonnement, l'indignation ou la résolution.
Variante : vertubleu, vertudieu, etc.


J'arrive devant le presbytère. Il est déjà là ce qui ne m'étonne même plus. Ce mec doit avoir un don de téléportation pour se déplacer aussi vite à chaque fois. D'un sourire et d'un mouvement de tête, il m'invite à le suivre. Ça me donne envie de rire. Le marché se trouve à dix mètres du presbytère, juste devant l'église. Je ne risque pas de me perdre. Mais je trouve ça mignon en fait, alors je ne dis rien et je le suis.

Le marché n'est pas très grand, mais son ambiance et sa localisation font qu'il est vraiment agréable de s'y promener. Il s'étend autour d'une statue de Jeanne d'Arc de Henry Allouard que je trouve magnifique et l'église en arrière-plan rajoute vraiment un plus au paysage. Il faudra que je revienne un autre vendredi pour dessiner. Je veux tenter d'immortaliser ces personnes qui font vivre la commune les vendredis matin. Ces gens qui parlent entre eux, qui crient, qui rient, qui négocient. Ceux qui vendent les mérites de leurs produits et ce qui les attrapent, les palpent, les sentent, les examinent sous toutes les coutures avant de les acheter.

Très vite, mon attention est finalement accaparée par une odeur alléchante. Je me retourne un peu et vois ce qui pourrait être comparé à un mur, plein de poulets en train de rôtir. J'en baverais presque. Je crois même qu'en fait, je bave réellement. En même temps, ça a l'air tellement appétissant. Rien que l'odeur provoque un raffut dans mon ventre. Il faut que je mange, vite, sinon ce ne sera pas un tonnerre qui retentira dans mon estomac mais bien un tremblement de terre qui s'abattra sur la ville.

Je cherche rapidement Jonas que je n'ai pas entendu depuis qu'on est ici et le voit du côté des fruits. Il regarde les kiwis tout en papotant avec le vendeur. Ils sont rejoints par une jeune femme que je ne sens pas. Elle a l'air de minauder près de Jonas. Ça m'horripile de voir ça.

Alors je le rejoins.

— Ah Tim ! Tu aimes les kiwis ? Je comptais en prendre quelques-uns. Ils ont l'air délicieux.

— Ça me va parfaitement.

Tant que l'autre gourgandine s'éloigne ça me va parfaitement.

Jonas paye les fruits et on s'éloigne du stand et de ... l'autre. On commence à faire un tour ensemble. L'engouement de Jonas pour tout ce qu'il voit me fait rire. J'arrive à le calmer un peu au risque de nous retrouver avec une dizaine de fruits de chaque espèce présente au marché. A la place, je lui demande si partager un poulet rôti lui et moi le dérange. A mon grand soulagement, il accepte et on se dirige vers les rôtissoires.

Sur le chemin, alors que l'on était à cinq mètres de notre but, on se fait accoster par une de mes élèves. Elle me demande quand est le prochain cours que je donne. Je pourrais être heureux de cette question si j'étais pas parfaitement au courant qu'elle est là tous les samedis à la même heure. Et si elle n'était pas en train de baver sur Jonas en le dévorant du regard comme si elle avait envie d'en faire qu'une bouchée.

Mais elle a envie d'en faire qu'une bouchée ! Et moi j'ai juste envie d'attraper Jonas pour l'embrasser et la faire fuir, ce que je ne peux pas faire pour un tas de raisons.

D'abord, lui et moi ne sommes pas en couple. Puis, il ne sait pas que je suis gay. Il sait encore moins que je suis attiré par lui. Ah et, important aussi, je ne sais même pas s'il est attiré par les mecs. Que de bonnes raisons pour ne pas pouvoir l'embrasser là maintenant. En plus, j'accorde une importance au consentement. Relation ou non, ça me la foutrait mal d'agir comme ça sans lui demander juste parce que je suis un peu jaloux.

Nom de Dieu ...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant