La Mort se raisonne (23)

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Pdv Nagisa

- FBI ! TOUS À TERRE ! 

Nos assaillants ainsi que Akira et moi levons la tête de concert. Le FBI ?  La première chose qui me vint en tête fut toutes les musiques et logiciels que j'avais cracké (même si tout le monde fait ça, c'était bien la seule chose que je faisais sans me couvrir efficacement sur le net. C'est vrai quoi : un internaute à tout point de vue irréprochable est le premier coupable désigné d'office, non ? Sérieusement qui n'a jamais esquivé l'achat d'un film quand tout les grands classiques figurent en streaming illégaux ?) mais je balayais vite cette hypothèse. Le FBI pour des conneries pareilles ? Laissez-moi rire ... On n'avait pas pu me géolocaliser non plus car mon portable n'était pas sur moi ...
Je conclus que si l'erreur ne venait pas de moi, mes ennemis en étaient les responsables. Vu la stupeur dans les yeux de l'homme nous ayant piégé cela était fort probable. 
Je pris avec fermeté la main de Akira et assénai mon pied de toutes mes forces sur la vitre de la baie vitrée. Elle éclata en morceaux et me rendit un peu abasourdi. Je traînais presque mon ami qui s'était défendu bec et ongles contre nos adversaires, ce qui lui avait valu une longue entaille lui barrant le visage. Actuellement, le sang lui brouillait la vue d'un de ses yeux et il titubait à chacun de nos pas précipités. Mon inquiétude affluait davantage encore en le regardant et je me tournais droit vers mon objectif : notre fourgon.

- Vous voilà enfin ! Sains et saufs, Dieu merci ... Enfin ... elle osa une œillade vers notre collègue tout en courant et grimaça : Tout ira bien, assura-t-elle.

Elle déglutit et désigna deux agents spéciaux lancés à nos trousses. Heureusement ils rebroussèrent chemin après seulement quelques foulées, pour retourner traquer les chercheurs. La camionnette n'était qu'à une centaines de mètres mais mon endurance me quittait déjà. Le stresse opprima ma poitrine et je pressais de plus belle mes compagnons. Si aucun ennemi n'était visible, rien ne promettait une fuite facile. 
Faisant écho à mon pessimisme, au coin du bâtiment, une silhouette tout de noire vêtue et à la capuche abaissée fonça droit sur nous.

- Eh, Irina ! Haletais-je. Tu nous a ramené un de tes admirateurs ? Il a l'air déter' celui là !

Derrière moi j'entendis Irina jurer :

- C'est pas un scientifique, abruti ! Bouge !

Nous arrivâmes enfin à notre véhicule. Akira s'effondra sur la banquette et Irina grimpa dans la coffre, et je m'installais au volant. Irina refusait toujours de passer son permis sous prétexte qu'une dame a toujours un gentleman pour l'escorter et Akira ... Akira pissait le sang et tâchait le siège et je fis abstraction de toute remarque.
Je démarrais quand tout à coup un impacte secoua le camion. La bouche sèche, je demeurais paralysé. Après que plusieurs autres coups moins conséquents se soient fait ressentir, une tête encapuchonnée apparut à l'envers derrière le pare-brise.
Karma ?!

- Démarre ! Tu veux qu'on se fasse attraper ou quoi ?! S'alarma-t-il.

L'apparition disparue avant même que je puisse intégrer l'idée que Karma Akabane siégeait sur mon toit et me donnait des ordres. J'obtempérais, et nous conduisis jusqu'à l'appartement dans un état second. Je me garais, esquissant des gestes simples. Un mouvement de travers et les larmes pourraient franchir les vannes. Décidément, sa présence me troublait bien plus que je ne le pensais.
Je pris Akira à demi conscient par l'épaule et le conduisis mécaniquement dans les escaliers. Il vomit et monta lentement les quelques marches. Irina le rejoignit pour lui administrer des soins et je le savais solide comme un roc. Il s'en remettrait et blaguerait sans aucun doute dès demain matin. Enfin, c'était surtout ce que je m'efforçais de croire.
Je me retournais pour faire face à l'incruste de service. Je me retrouvais la tête contre son torse et ses bras protecteurs m'entourèrent sans retenue.
J'hoquetais de surprise mais ne fis rien pour m'échapper. Au contraire je me pressais un peu plus contre lui ... Depuis combien de temps le désirais-je ? J'en avais assez de toutes ces missions, de ces pics d'adrénaline, de ces gens monstrueux, et de tout le reste. À vrai dire j'étais fatigué par cette lutte. Puis je me suis souvenu de ce pourquoi je me battais, pour toutes ces petites âmes en peine. La culpabilité m'envaillit. Finalement j'étreignis le blazer de Karma et laissa mes larmes rouler sur mes joues.
Il me prit tendrement le menton.

- Hé, tout va bien ... Il esquissa un sourire maladroit. Je ne pus douter de son innocence en le voyant d'aussi près, fixant ses yeux d'une sincérité désolée. C'est moi qui ai fait débarquer le FBI. Pardon de n'avoir rien dit ... À vrai dire, te retrouver m'a fait tout oublier.

Je n'écoutais déjà plus ses paroles quand je posai mes lèvres sur les siennes. Je ne fis que lui donner un baiser d'enfant et enfouis ma tête dans le coin de son cou.
On a tous besoin de temps pour soi, pas vrai ? Cette nuit là, d'autres enfants mourront; je n'y pourrais rien. Alors autant vivre pour toutes ces petites âmes déchues, et tout oublier en une étreinte.

Dans Mon ViseurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant