Eau Salée

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Je ne voulais pas aller là-bas. Je l'avais prévenue. Elle ne m'a pas écoutée, elle n'en a fait qu'à sa tête, comme d'habitude. Elle est têtue.

Je suis arrivée en ayant le choix. Je suis repartie sans avoir ce droit. Parce qu'elle l'a décidé. Je n'ai plus le choix. Comme d'habitude. Elle est têtue.

J'ai essayé au mieux de me calmer comme je pouvais. Je me pinçais la main, le bras, la cuisse. Je me mordais la langue, l'intérieur de la joue. Pour canaliser. Mais mes émotions m'ont toujours guidée. Alors, cette fois encore, elles ont pris le dessus.

J'étais en colère. Contre elle. Parce que, comme d'habitude, elle n'en fait qu'à sa tête. Elle est têtue.

J'étais énervée contre eux. Qui se foutaient clairement de moi avec leur gueules d'anges et leurs douces paroles.

J'étais triste. Parce que je m'étais promis de ne jamais revivre la même chose, je m'étais promis de ne jamais retourner dans un endroit similaire. Parce que ça ne me plait pas.

Mais je n'ai plus le choix. À cause de ces hypocrites aux gueules d'anges et aux douces paroles.

Alors les larmes ont tenté de s'échapper de mes yeux. J'essayais de me calmer je vous disais. Mais mes émotions me guident je vous disais. Alors elles se sont laissées glisser le long de mes joues, contre mon gré. J'ai détourné les yeux.

J'ai soudain trouvé un grand intérêt à la fenêtre et au paysage que je connaissais pourtant si bien. Je me suis un peu disputée. Puis je me suis tut, parce que j'étais trop fatiguée pour me battre. J'essayais déjà de me battre contre mes émotions, vous comprenez ?

Un instant, j'ai hésité à augmenter le volume de la radio. Mais je me suis dit que ça l'énerverait encore plus. Alors mon doigt n'a pas bougé. Et j'ai continué mon admiration de la fenêtre.

Mon visage était trempé, les larmes coulaient à flots. J'essayais d'être silencieuse.

Ce moment m'a paru interminable. Je voulais rentrer. Juste rentrer et laisser mes émotions déborder. J'avais besoin d'être seule. Sauf qu'elle était là.

J'ai hésité à appeler quelqu'un en rentrant. Et puis je me suis dis « peu importe ».

Je ne pouvais plus penser correctement, puisque je ne faisais que penser. Tout bouillonnait dans ma tête. Et à un moment ça sature. Alors je regardais dans le vide, la bouche ouverte, comme un poisson mort. J'étais un poisson mort.

Puis je suis arrivée. J'ai une dernière fois tenté de cacher mon mal être. Et quand j'ai fermé la porte je me suis effondrée. J'ai pleuré un long moment mais je ne me sentais pas pour autant soulagée. Alors je suis sortie prendre l'air et j'ai laissé pianoter mes doigts sur le clavier pour extérioriser.

Le nez rouge, les yeux secs et gonflés, j'ai arrêté de pleurer. Mais j'ignore combien temps cela va-t-il durer.

Juin 2019

Dear Diary,Où les histoires vivent. Découvrez maintenant