Limëlian. Ce nom résonne dans ma tête.
Limëlian. Il tourne en boucle.
Limëlian. Il envahit mon cerveau.Je ralentis et arrête de courir. Je regarde autour de moi.
Dans cette forêt enneigée, il y a moi, mes pensées et celles des autres.Je peux sentir chaque avis émis devant moi se frayer un chemin dans mon cerveau.
Une bataille est en cours. Les pensées en accord avec mes valeurs contre celles qui s'opposent.
C'est ma malédiction.Tout ça à cause de Limëlian.
J'y aie jamais posé les pieds.
Pourquoi n'existe-t-il pas de règle empêchant ces pouvoirs d'être transmis aux descendants qui ne sont pas nés là-bas ?
Est-ce que pouvoir est le bon mot ? Est-ce un pouvoir si on y a un accès limité ?
Je n'en sais rien.C'est pour me focaliser sur ce qu'est devenue ma vie que je suis dans cette forêt. Il me fallait un endroit où je ne croiserais personne pour ne pas subir leur Influence.
Influence avec un grand i parce que chez moi, l'impact des mots est surmultiplié.Tout ça à cause de Limëlian.
Stupide héritage.
Stupide ADN !Je me remets à courir. Je veux juste courir dans la neige et oublier. Oublier et revenir en arrière. J'aimais ma vie d'avant. Elle n'était pas parfaite mais j'avais la sensation de comprendre ce qui se passait.
J'accélère un peu plus pour que mon cerveau soit suffisamment occupé à gérer ma respiration pour cesser de réfléchir.Je me retrouve à penser à avant.
À il y a quelques jours.
Quand j'avais encore une vie normale.
Quand Louise était à mes côtés.
Quand je pouvais écouter les gens sans avoir peur de devenir quelqu'un d'autre.
Quand la vie semblait plus simple.A bout de souffle, je me mets à marcher.
J'ai laissé Yasmine seule avec la galec.
Elle est trop dangereuse pour moi. Trop maligne.
Alors me voilà dans la forêt. Sous la neige.
Finalement, ce n'était pas de la pluie.Je souris face à l'ironie de la situation.
J'ai toujours critiqué ces moments dans les films. Quand la pluie ou la neige tombe pour rajouter un effet dramatique.
J'ai toujours trouvé ça irréaliste.
Il semblerait que la nature se mette à son tour à se jouer de moi.
Ma vie ne ressemble plus à rien.Ma meilleure amie interroge seule une ennemie. Une ennemie maintenue prisonnière dans mon garage.
Cela ne fait pas de sens.
Je peux même pas l'épauler.
Je suis celle qui provient d'un autre monde. Celle qui détient des pouvoirs. Mais je suis trop influençable.
Alors je l'ai abandonné. Je l'ai laissé seule.
Merci d'être une ancre dans cette tempête.
Il faudra que je lui montre ma gratitude quand je reviendrais.Ma copine a disparu. Je ne sais pas si je dois la considérer comme victime ou comme bourreau. Comme gentille ou comme méchante.
Je vais passer chez elle.
J'y suis en sécurité. Je me sens chez elle comme chez moi. Enfin, je me sentais.
Cela dit, personne n'est encore venue m'embêter.J'ai tenté de me persuader que cette forêt a toujours été un refuge. Un refuge pour me défouler quand je me sentais submergée.
Or, un refuge c'est un foyer. Donc les galecs peuvent pas m'attaquer.
Aussi alambiqué que le raisonnement semble être, il a l'air de fonctionner.Mes pas se dirigent chez Louise.
Je laisse Yasmine gérer la situation un peu plus longtemps.
Je ne suis pas en état.
J'ai besoin de gérer aussi mes émotions.
De savoir de ce qu'il en est de ma relation amoureuse.
J'espère qu'elle saura le comprendre.Arrivée au pied de l'immeuble, je tape le code. Je monte les escaliers.
Devant la porte de l'appartement, je toque. Aucune réponse.
Je sonne. J'attends. Toujours aucune réponse.Je me laisse glisser le long de la porte.
Je n'ai pas les clés. Je suis donc coincée devant.
Louise n'est pas à l'intérieur.
L'hypothèse d'une mauvaise gastro avec un téléphone cassé vient d'être réfuté.
Aussi peu probable qu'elle paraisse, je tentais inconsciemment de me raccrocher à une idée de ce style. Elle était chez elle sans pouvoir bouger et sans moyens de communication.
Le silence dans l'appartement tende à prouver le contraire.Les larmes s'invitent à nouveau dans mes yeux.
Je sors de ma poche un papier et un crayon.
Il est temps de faire une nouvelle liste.
La liste de "Où est Louise ?".La première hypothèse est qu'elle est partie avec le plan.
Je ne peux me résoudre à y croire.
Elle ne s'est pas approchée du bureau. Elle a tout de suite quitté la pièce.
Je ne vois pas comment elle aurait fait. Et surtout, je ne vois pas pourquoi.
Si c'était pour me simplifier la vie, un petit message aurait été le bienvenu.
Ce serait donc pour aider les galecs.
La bataille des avis se renforce. S'impose dans mon esprit.
Je me refuse à croire qu'elle soit dans l'autre camp.Je préfère la deuxième hypothèse. Elle a pris peur.
Elle s'est rendu compte de ce qui m'attendait. Elle ne s'est pas sentie à la hauteur. Elle a fui.
Cette lâcheté me ferait plus plaisir.
Une petite voix dans mon esprit me susurre : "qu'est-ce qu'il en est du plan ?"
Le plan... Je ne sais pas. Il a été perdu. Il n'a jamais existé.
Je me rends compte de la faiblesse de la plausibilité de ces arguments.Mon téléphone sonne. J'ai un message de Yassine :
- Je parviens plus à l'écouter. On ne peut pas s'en sortir qu'à 2. Demande de l'aide à tes parents.
Elle ne doit plus du tout s'en sortir.
- Ok je cours à la maison et je les préviens.
Je me relève et je commence à accélérer.
Je n'ai jamais autant couru. Faire du sport ne faisait pas partie de mes nouvelles résolutions.
Le destin en a décidé autrement.Il faut que je trouve comment expliquer la situation à mes parents.
Les mots se mettent en place dans ma tête.
Mes pieds foulent le sol.Je me dirige vers une galec manipulatrice, une amie désemparée et des parents cachottiers.
Je n'ai bizarrement pas hâte.
Je continue tout de même à courir.
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L'héritage de Limëlian (en pause)
ParanormalEN PAUSE « Il me faut faire la part des choses. De quoi puis-je douter ? Qu'est-ce que je peux croire ? Premier sujet à trancher : est ce que Limëlian, cet autre monde, est réel ? Mon cerveau s'emballe. Je n'ai aucun élément tendant à prouver son...