Quand je rouvre les yeux, ils sont tous les quatre à attendre. À peine ais-je bougé, qu'ils se précipitent sur moi. Je regarde ma montre. Ça fait deux heures que je dors. Je comprends leur inquiétude.
Mon cerveau se remet en marche. La panique est toujours présente. Je dois oublier Villat. Maintenant, je m'occupe de l'autre problème. Les galecs.
Et c'est reparti. On s'installe sur la table. Avec chacun notre eau chaude. Et on réfléchit. On n'a aucun moyen de les contacter. On a plus moyen de les attirer dans un piège.
Alors, on prend le temps de se raconter ce qu'il s'est passé ces 5 derniers jours. Depuis mon anniversaire. Depuis que je sais que je suis une qsitta. Au moment où nos pas ont été séparés de ceux de Louise.
Elle commence. Elle raconte. Elle redit des choses que je connais. Elle rajoute des informations. Elle finit son récit qu'elle avait interrompu pour m'avertir du danger qui planait sur la maison.
J'apprends des choses. Elle a volé la Perle à Villat après deux jours de marche avec elle. Elle a pris le temps de revenir pour la semer. Elle a réussi haut-la-main sa mission. Elle nous a débarrassé d'une menace. Reste plus qu'à faire de même avec les galecs.
C'est à notre tour de lui raconter. On prend la parole chacun à notre tour. On complète le récit des autres. On tente d'être le plus précis.
On raconte tout.La lettre.
Ma première confrontation avec un galec.
La bibliothèque.
La capture de la galec. Son interrogatoire.
La réunion des galecs.
L'œuf en forme de cube.
Nos plans et leurs échecs.Mes parents et Yasmine continuent leur récit sans moi. Je me mets à écouter. Ils essaient de raconter avec légèreté. Je ne suis pas dupe. Ils ont eu peur. Ils ont toujours peur. Villat était dangereuse. On n'est pas passés loin d'un désastre.
J'en voulais à mes parents de m'avoir caché des informations.
J'en voulais à Louise d'avoir disparue.
Je ne peux qu'être reconnaissante.
Leur idée faisait sens.Si j'étais allée chercher la Perle, je ne serais plus moi-même.
Si je savais ce que faisait Louise, j'aurais pu parler aux galecs s'ils avaient réussi à m'influencer.Ma respiration s'accélère. Je risque ma vie. Pire, je risque moi. Je serais en vie mais plus là. Je serais ensevelie sous les pensées des autres.
Chloé respire.
Encore une fois, j'ai l'impression que Louise est là. Puis, je me rappelle. Elle est là. Je me blottis dans ses bras. Je m'enivre de son odeur. Tout ira bien.
Comme pour me contredire, la porte d'entrée s'ouvre violemment.
Je sens mon père m'entraîner dans la pièce d'à côté. Les autres suivent.
On est étrangement silencieux et efficaces. On a réussi à se mettre en sécurité immédiatement.
Mon père n'a pas hésité.Une voix retenti :
— Anatholie, les galecs ont un message pour toi. Tu n'es en sécurité nulle part.
Mes poils se sont instantanément redressés. Je suis censé être protégée. C'est un cauchemar. Je veux me réveiller. Je ferme les yeux.
J'entends un bruit de détonation.
Mon cœur manque un battement.J'ouvre les yeux. Ma mère a une sorte de carabine dans les mains. Elle tente de me faire un sourire rassurant. Elle a déjà été plus convaincante.
On entend un bruit de chute. Puis, le salon semble silencieux. Ma mère chuchote :
— Je crois que je l'ai eu.
Mon père se plaque au sol et rampe discrètement pour regarder. Il se relève et annonce :
— C'est bon. Il est au sol.
Je ne serais donc jamais au bout de mes surprises. Comme si elle lisait mes pensées, ma mère répond :
— On s'est préparés. On développe après. On s'occupe d'abord de ce charmant intrus et non il n'est pas mort. Il a juste reçu une bonne dose d'anesthésiant.
Yasmine et Louise sont aussi perturbées que moi. On observe mon père installé ce corps sur une chaise. Il l'attache. Ma mère continuer à le pointer du bout de son arme. Ils savent ce qu'ils font. Ils veulent l'interroger.
Pendant une fraction de seconde, je les vois le torturer. Puis, je me rappelle qu'avec mes pouvoirs ça ne sera pas nécessaire. Je tente de m'apaiser.
Tenter est le mot.
Je n'y arrive pas.
C'est trop pour moi.
Je suis en danger partout.Pire.
Je mets ce que j'aime en danger tout le temps.
Et eux sont vulnérables.
Pas de pouvoirs.
Pas de sang de qsitta qui coule dans leurs veines.
Du moins, à ma connaissance, on est jamais à l'abri de surprises.Vulnérables.
Je réouvre les yeux et me demande si le mot est bien choisi.
Ma mère tient toujours sa "carabine".
Mon père continue à s'affairer pour vérifier que ses noeuds sont solides.
Yasmine et Louise se sont rapprochées et commencent déjà à noter les questions à lui poser.Je suis bien entourée.
Je ne peux rêver d'une meilleure équipe.
Un sourire s'installe sur mon visage.
On peut le faire.
Les galecs vont laisser la Terre tranquille.Ma mère nous informe :
— Il ne devrait pas tarder à se réveiller.
Comme pour lui donner raison, l'inconnu papillonne des yeux. La mise au point a l'air compliqué. Son regard est dans le vide. Il observe sans voir.
Il tente de se frotter les yeux avec ses mains. Prend conscience qu'il est attaché. S'agite. Ou du moins essaie de s'agiter.
L'anesthésiant n'a pas complétement quitté son corps.Nous le regardons paniquer. En silence. Personne ne sait quoi dire ou quoi faire.
Louise décide de briser le silence :
— Est ce que tu connais Limëlian ?
Je la regarde surprise. Tous les autres aussi.
Personne ne savait comment entamer la discussion.
Personne n'avait prévu cette phrase visiblement.
Sauf Louise.L'inconnu paraît surpris lui aussi. Il semble remettre toute sa vie en questions et regretter les choix qui l'ont mener jusqu'ici.
Louise se retourne vers nous fière d'elle. Elle nous explique :
— Bon, je crois qu'on peut considérer qu'il n'est pas un grand danger. Il a l'air de rien y connaître.
Elle se retourne vers lui :
— C'était quoi ta mission ? Nous faire peur et puis ? Partir ? Nous agresser ?
J'espère qu'ils t'ont payé cher parce que t'es pas au bout de tes peines.Il devient livide. Il avait dû se dire que c'était de l'argent facile. Il s'était trompé.
Louise est, quant à elle, impressionnante.
Elle a tout misé sur l'intimidation. Et ça a l'air de fonctionner.Elle continue dans son rôle :
— Ah, et si tu crois que là, tu es au maximum de ce que tu peux endurer. Tu te trompes.
Elle se retourne vers moi :
— C'est à ton tour, ma chérie.
Elle me tend le papier qu'elle remplissait tout à l'heure avec Yasmine.
L'interrogatoire va commencer.
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L'héritage de Limëlian (en pause)
ParanormalEN PAUSE « Il me faut faire la part des choses. De quoi puis-je douter ? Qu'est-ce que je peux croire ? Premier sujet à trancher : est ce que Limëlian, cet autre monde, est réel ? Mon cerveau s'emballe. Je n'ai aucun élément tendant à prouver son...