MON AMOUR POUR LA VIE M.A.P.L.V. tome 1

Partie 21

Le mardi arriva. Benjamin était ravi que sa mère se soit libérée pour ses rendez vous avec les professeurs. Elle n'entendit que des compliments sur cet enfant travailleur et un peu introverti.

Fière de son garçon, elle décida de les emmener manger au restaurant pour fêter les félicitations. Natacha, elle, préparait le brevet des collèges sans que sa mère se fasse de souci car, elle aussi, était excellente.

Sirotant un Ice-tea apéritif, Natacha jouait avec la main de Nikita qui portait l'Aigue-marine. Cette relation lui semblait si irréelle... avec un fond d'inquiétude car elle sentait bien que de profonds changements s'annonçaient dans leur vie si tranquille.

Nikita sentit l'angoisse de sa fille et décida d'entrer dans le vif du sujet car le fameux concert de Marseille approchait.

- tu sais, Cha pour ton concert-anniversaire... Ils ont quelques jours de relâche avant, je voulais proposer à Martin de venir ici...

- tu crois qu'il va vouloir venir ici??? nous connaître!??

- oui, même les chats et le poisson rouge! Répondit elle avec cette douceur tranquille dans le regard.

- et s'il nous aime pas...

- on a beaucoup parlé de vous, tu sais bien, je parle tout le temps de vous à tout le monde alors encore plus à lui. Il dit qu'il m'aime donc il accepte mes enfants, c'est aussi simple que ça. Vous comprenez?

- c'est correct, je trouve, fit Ben sentencieux, y a pas de raison de s'inquiéter, tu sais Cha, il faut faire confiance à maman. Je la vois pas nous ramener un mec chiant... et puis regarde, il a été cool quand je lui ai envoyé le message... il a même plutôt cherché à m'éviter des ennuis...

Il esquivait le regard de sa mère en prononçant ces mots, soucieux. Elle rit en savourant ce début de complicité.

- y a 6 mois tu le trouvais chiant!!! s'amusa Natacha.

- ouais, mais maintenant qu'il est pas homo et que maman et lui sont fiancés, je veux lui... enfin comment dire... il est le bienvenu, voilà! On a plein de potes qui ont des beau pères et même des très cons... ils n'en meurent pas...

- je suis d'accord...

- par contre, on va devoir aller chez lui... aussi?

Nikita se rendit compte que jamais il n'avait mentionné un «chez lui». Le soir, au téléphone, une fois les enfants couchés, elle lui posa la question.

- j'ai pas de maison en fait , répondit il.

- pas de maison??? mais tu vis où?

- ben,  je suis tout le temps à l'hôtel... et puis sinon, je vais chez mes parents à Asker... ça doit être la-bas ma maison, mais au bout de trois jours, on s'engueule et je me tire... Ils sont infernaux tu sais...

- mais tu te tires où?

- je voyage... au Timor, à Rio et puis, on repart en concert...

- ta vie me semble triste... soupira t elle.

- j'ai l'impression que tout est sur le point de changer!! sourit il, puis changeant de sujet, tu es dans quel hôtel demain soir?

- à Paris, je ne dors pas à l'hôtel, quand j'ai commencé à gagner de l'argent en dansant, Cha et moi, on s'est installées dans un petit appart, pas loin de l'opéra. L'appart qui me sert de camouflage que ta secrétaire a trouvé, tu te souviens? C'est quand, je suis... tombée enceinte... de Ben que je nous ai cachés en Provence.

- tu m'invites?

- bien sur, mais c'est pas standing comme tes hôtels...

- j'ai pas besoin de standing, souffla t il, j ai besoin de toi, min kjærlighet...

Toute émue, elle lui envoya par SMS l'adresse exacte. Il reconnu effectivement l'adresse qui lui servait de boite aux lettres pour masquer sa vie en Provence.

Le lendemain matin, elle déposa ses enfants au collège et prit un taxi puis un TGV pour Paris.

Le corps de ballet tout entier bruissait d'impatience de finir cette tournée par cette représentation exceptionnelle. Il y aurait tout le gratin parisien, le président et des invités diplomatiques. Le chorégraphe mit fin de bonne heure à la répétition, ils étaient tous plus que prêts, ils avaient interprété cette œuvre de Tchaïkovski tout autour du globe. Tout était dit!

Il leur donna leur journée du lendemain avec pour consigne d'arriver à 16h frais et dispos.

Alors qu'elle allait partir, il appela Nikita et l'entraîna à l'écart. Le maitre de ballet les attendaient les bras croisés.

- tu boites... lança t il.

Elle esquiva son regard.

- tu boites et tu n'en parles pas.

- ça va... je peux danser... vous étiez présent, il me semble quand on m'a prescrit mes infiltrations. Le kiné a dit...

- ... que ton genoux est en train de mourir! Il est venu m'en parler... ainsi que ces fameuses injections anesthésiantes qu'il te fait... beaucoup trop souvent!

- de mourir lentement... corrigea Nikita, je peux danser!

- oh je le sais que tu peux danser!! tu es une merveille sur scène, tu l'as toujours été et depuis que ton norvégien et toi vous êtes ensemble, tu es encore plus épanouie sur scène!

- alors, où est le problème?

- tu prévois de finir tes jours en fauteuil roulant?

- quoi?

- ben oui, tu comptes danser jusqu'au bout de ton genoux? Ou bien?

- ou bien quoi?

- ou bien te soigner, te reposer?

- je ne sais pas...

- moi je sais, ici on ne fait pas danser les filles jusqu'à ce que mort s'en suive!! c'est en Russie qu'ils font ça!!

- et moi, je suis à moitie russe à ce qu'il paraît alors tout s'explique!!

Il soupira et lui tendit un post-it:

- tu as rendez vous dans un mois avec un médecin spécialisé, s'il dit que tu te bousilles le genoux, ben je ne te prends plus dans les ballets, et tu te soignes... même tu te maries et tu lui fais des enfants!

- danser, c'est toute ma vie...

- non, plus maintenant.

S'efforçant de ne pas boiter, elle partit au bord des larmes.

- hey, Nikita, c'est pour ton bien, tu le sais!

- ...

- il faut lui dire... à ton chanteur... c'est ça, être un couple...

Elle arriva dans son petit appartement sous les toits de Paris, tout encore rempli de sa vie de très jeune maman de Natacha.

Comme à chaque fois que cela n'allait pas, elle attrapa son saxophone et grimpa par la fenêtre sur le toit. Elle avait toujours fait comme cela pour canaliser sa peine.