Go back to the 80s (partie 1)

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Le soleil se levait à peine sur la ville de Derry, et les premiers rayons se faisaient sentir grâce à la chaleur agréable qu'ils apportaient dans le petit hôtel où logeaient les ratés. Celui-ci était d'ailleurs plongé dans un lourd silence alors que les adultes profitaient de leurs dernières heures de sommeil, à l'exception de deux d'entre eux. Mike Hanlon et Richie Tozier se dirigeaient sur la pointe des pieds, tout droit vers la chambre du plus petit des ratés, Eddie, tous les deux déjà morts de rire en pensant à la blague qu'ils avaient prévue.

En pénétrant dans la pièce, ils durent se retenir terriblement fort de ne pas éclater de rire, face au brun paisiblement endormi laissant même échapper un filet de bave le long de sa bouche entrouverte. Toujours avec une discrétion hors normes, les deux complices s'agenouillèrent de part et d'autre du lit, un sourire béat sur le visage.

« Eddie-chou, ronronna le binoclard en imitant la voix de Mme K près de l'oreille du concerné. C'est l'heure de se réveiller...

— Mhhh... », marmonna-t-il en s'enfouissant davantage dans son coussin.

Mike et Richie riaient silencieusement, non décidés à s'arrêter d'aussi tôt. Ce fut au tour du métis de mettre en œuvre ses talents d'imitateur.

« Oh mon Eddie, tu n'as pas oublié nôtre anniversaire de mariage j'espère ?

— Myra fous-moi la paix...

— Eddie chou enchaîna Richie sans pouvoir s'empêcher de rire, tu vas être en retard à l'école si tu ne te réveilles pas...

— Tes médicaments ne vont pas se prendre tout seuls, renchérit Mike. »

Les grognements du brun se firent entendre alors que le bouclé fit signe à Mike de lui laisser prendre la parole. Il s'approcha donc encore plus près de son oreille, le sourire aux lèvres.

« Eddie... Les eaux grises... »

Ne pouvant plus se retenir, Hanlon éclata de rire suivi de son ami, alors que le garçon se redressait en toute vitesse, alerté par ces provocations. Son air apeuré se changea rapidement en colère en apercevant les deux idiots qui se tordaient de rire sur le sol.

« Qu'est-ce qui va pas chez vous ?! » s'indigna Eddie suite à la plaisanterie qu'il venait de subir.

Ses plaintes ne firent qu'accentuer le fou rire des deux complices, qui commençaient d'ailleurs à sentir leurs abdos travailler. Malgré son égo quelque peu touché, le brun ne put s'empêcher de se revoir dans son jeune âge, où déjà là il se faisait embêter gentiment par ses amis. Il esquissa tout de même un petit sourire en se remémorant ces instants puis, de retour à la réalité, il se contenta d'envoyer son pied dans le ventre du binoclard, qui ne fit que rire de plus belle.

C'était ces moments-là qui leur avaient manqué à tous sans exception. Ces moments où ils n'avaient plus à se soucier d'un quelconque travail ou conjoint, mais où ils faisaient simplement ce qui leur passait par la tête. Ces moments où ils redevenaient des enfants pleins d'énergie et de bonne humeur.

Quelques minutes plus tard, Mike et Richie avaient fini de réveiller tout le monde dans le petit hôtel, ils étaient d'ailleurs tous les deux excités comme des gamins qui avaient prévu une sortie depuis plusieurs semaines, contrairement au reste du groupe qui était, pour la plupart, encore dans un sommeil paradoxal.

« Allez, allez, vamos les enfants ! s'exclama le binoclard en tapant dans ses mains. Eduardo, j'espère pour toi que tu n'es pas en train de préparer tes bagages comme si tu allais partir trois mois dans un pays étranger !

— Qu'est-ce qui lui prend d'être aussi excité ? marmonna Beverly dans un bâillement. Je veux dire, il est que 6 h du matin...

— C'est bon je suis là, annonça Eddie avec une de ses valises en main.

— Il est hors de question qu'on embarque avec ça », répondit Richie tout en dévisageant l'objet derrière ses lunettes.

S'ensuivit un long débat sur les affaires que le brun avait réellement besoin d'apporter lors de leur camping, puis étant parvenu à se mettre d'accord pour rentrer tout le nécessaire dans un sac à dos, Mike prit finalement la parole.

« Bon, on va prendre deux voitures, celle de Richie et la mienne, alors qui monte avec m... »

Sans qu'il ne puisse finir sa phrase, toutes les mains hormis celles d'Audra et du binoclard se levèrent, ce dernier affichant un air faussement indigné. Il était à prévoir que seul un suicidaire voudrait passer plus de dix minutes enfermé dans une voiture avec le bouclé, pourtant, celui-ci reprit rapidement une expression confiante.

« Quoi ? vous ne voulez pas rester en compagnie de-

— De la grande Gueule ? Non, merci, répondit Bev » dans un sourire.

— Tant pis pour vous ! s'exclama le concerné en passant ses bras autour des épaules d'Audra et Eddie.

— Non non non, intervint ce dernier en se dégageant rapidement de son ami. Il est hors de question que je monte avec-

— Allez on est parti ! »

Sur ces mots, ils se dirigèrent tous vers la sortie de l'hôtel, non sans les plaintes d'Eddie couvertes par les rires du binoclard. Cette journée s'avérait être intéressante, pensait-il.

•••

Cela faisait maintenant plusieurs dizaines de minutes que les ratés avaient pris la route. Audra observait le paysage défiler depuis l'arrière de la voiture, laissant quelques fois échapper un petit rire quand les deux hommes se chamaillaient. C'était visiblement la seule occupation qu'ils parvenaient à avoir, mais ça ne la dérangeait pas tant que ça, en fait, elle se doutait bien que derrière ses disputes, il y avait une grande amitié.

« Bien, nous on doit se charger d'acheter la nourriture, expliqua Richie en se garant dans le parking désert d'une petite boutique.

— J'ai déjà prévu une liste, fit Eddie en sortant un bout de papier de sa poche. Alors il nous faudrait, de l'eau, au moins trois litres par personne et par jour, il est hors de question qu'on boive dans la rivière, donc si on multiplie le nombre de personnes par le nombre de litres puis par le nombre de jours où on...

— Donne-moi ça. »

Sans pouvoir protester, le brun vit la liste qu'il avait entre les mains disparaître alors que son ami la scrutait d'un air étonnamment sérieux.

« Tu as dû mettre du temps à faire tout ça...

— Oui, acquiesça l'ancien asthmatique avec un sourire, alors on... »

Son visage se décomposa quand il vit le binoclard déchirer le papier en petits morceaux sous son regard indigné.

« Maintenant on va pouvoir y aller, annonça-t-il en sortant de la voiture, imité par Audra.

— Imbécile ! s'écria Eddie qui les suivit de près. Tu sais le temps que ça m'a pris de faire ça ?!

— Alors que tu aurais pu utiliser ce temps pour dormir, rétorqua Richie avec un sourire. Décidément Eds, il faut tout t'expliquer.

— Dis-toi que les meilleurs moments sont généralement ceux qui ne sont pas prévus au départ, intervint la femme de Bill, se voulant rassurante mais qui ne fit qu'affoler encore plus le brun.

— Mais vous vous entendez ?! s'indigna-t-il sous le rire de ses amis. Ce qui n'est pas prévu est le pire de tous ! Est-ce que vous croyez que les gens qui font des accidents de voiture l'ont prévu ?! Ou ceux qui meurent étouffés par un bout de viande mal mâché, ils l'ont prévu peut-être ?! »

Pour toute réponse, Richie et Audra éclatèrent de rire alors qu'Eddie continuait son monologue avec de grands gestes théâtraux.

« Il va falloir t'habituer parce qu'il est tout le temps comme ça », expliqua le binoclard à l'attention de l'actrice.

Finalement, le brun s'arrêta, vexé par le comportement insouciant de ses camarades. Il chercha à montrer son mécontentement le plus possible, mais ce n'était pas chose aisée quand Richie ne cessait de lui pincer les joues ou de lui ébouriffer (ou plutôt décoiffer) les cheveux avec son habituel air d'imbécile heureux. Ils entrèrent alors dans le magasin, prêts à improviser et à se munir de l'essentiel pour une bonne sortie entre amis le temps de quelques jours, comme à l'époque.

And, what if? (Reddie)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant