Pour avoir voulu éviter des questions trop insistantes (3)

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« C'est bon je rigole, je ferais jamais un truc pareil. Tu perdrais toute crédibilité en tant que médicomage, ça le ferait moyen. Déjà que tout le monde sait que je suis bien meilleur que toi, si en plus ça se sait, tu seras loin derrière moi, caché par mon ombre immense et majestueuse ».

Non mais... il était vraiment sérieux ? Qu'est-ce qu'il lui chantait encore ? Allan explosa soudain de rire face à la mine déconfite de Frank. Ha ha... très drôle.

« Allez Kinours c'est bon rigole.

- Non c'était pas drôle ton truc.

- Si.

- Non. Et d'abord qu'est-ce que c'est cette histoire de meilleur médicomage que moi ? Y'a une compétition maintenant ?

- C'était juste pour rire...

- Bah moi ça me fait pas rire. On travaille pas pour être meilleur que Marcel ou Robert, on est là pour soigner les gens et sauver des vies Allan.

- Ouais enfin n'empêche que certains sont plus reconnus que d'autres dans le boulot. T'as bien dû le remarquer.

- Comme ton père ?

- Ouais par exemple...

- Allan faut que t'arrête de faire ça.

- De faire quoi ? Je fais rien du tout.

- De te comparer à ton père. C'est un véritable génie dans le milieu, personne ne peut lui arriver à la cheville.

- C'est super réconfortant tu sais...

- T'as pas compris ce que je voulais dire. Personne ne peut l'égaler parce que tu n'as pas encore suffisamment d'expérience pour pouvoir le faire.

- J'ai besoin de te rappeler de ce qu'il a réussi à soigner à mon âge ? En comparaison, ce que je suis capable de faire c'est de la bouse d'eruptif...

- Dis pas ça, n'importe quoi. T'es un petit génie en métamorphose je te rappelle. Personne n'arrive à rompre les sorts aussi rapidement que toi. Ils sont tous admiratifs devant ta facilité à faire reprendre sa forme d'origine à un mec transformé en chauve-souris. Même Larson. Mais tu ne peux pas te comparer au meilleur médicomage de notre temps, tout simplement parce que des génies comme lui il n'en existe qu'un toutes les trois générations. Mais s'il y a quelqu'un dans toute l'Angleterre qui puisse se rapprocher de son excellence, c'est toi. »

Allan garda le silence quelques secondes, en profitant pour manger ses pâtes à la carbonara qui étaient en train de refroidir. Frank n'attendait pas de réponse, il voulait simplement que son ami arrête de passer son temps à se comparer à son père et à se sentir comme un moins que rien parce qu'il ne parvenait pas à égaler ses capacités hors normes.

« Merci Frank....

- T'as pas besoin de me remercier. Mais si tu veux vraiment me faire plaisir, arrête de te torturer. T'es vraiment le meilleur médicomage que je connaisse Allan - en dehors de ton père oui, mais si on le retire de la balance il n'y a que toi qui ressort du lot.

- Et toi.

- Quoi moi ?

- Toi aussi t'es un très bon médicomage.

- Oui peut-être, je sais pas.

- Bah je te le dis.

- Merci. »

Ils continuèrent leur repas en silence, chacun perdu dans ses pensées. Frank savait que ses paroles ne suffiraient pas, ne suffiraient jamais, mais il les lui répèteraient encore et encore. Toute sa vie s'il le fallait, pour ne pas qu'il perde confiance en lui.

Il pensait réellement tout ce qu'il lui avait dit. Allan avait toujours été doué pour la médicomagie, tout du moins pour tout ce qui était cas pratique. Il disposait d'une sorte d'aptitude naturelle qui lui permettait de maîtriser en très peu de temps les sorts et contresorts. Surtout ce qui concernait les sorts de métamorphose. Et Frank l'avait toujours admiré - et parfois jalousé il devait bien l'admettre - pour ça.

Ses yeux se posèrent sur les lèvres d'Allan se refermant sur sa fourchette et ses pensées divaguèrent vers des contrées complètement différentes. Que n'aurait-il pas donné pour que ses lèvres se referment sur les siennes ou sur...

Non, il n'avait pas le droit de penser à ce genre de choses. Il se l'était interdit. D'une parce que ce n'était pas très correct pour Allan, et ensuite parce que, plus il fantasmerait sur lui, plus il se ferait du mal en se prenant la dure réalité en pleine figure.

« Frank ? Tout va bien ? ».

Ascenseur dimensionnel en descente. Retour à la réalité dans... maintenant !

« Oui oui pourquoi ?

- Parce que je te parle depuis toute à l'heure et que tu me réponds pas. A quoi tu penses ? »

Si tu savais mon pauvre Allan...

« Oh rien de grave. Je pensais juste à Larson et aux mecs dans son genre.

- Faut pas que t'y pense, ils en valent pas la peine.

- Je sais bien mais... j'aimerais juste pouvoir faire les choses comme je veux sans que personne y trouve quoi que ce soit à redire, c'est tout. »

Il baissa les yeux sur son assiette. Ce n'était pas tout à fait vrai, mais il n'avait rien trouvé d'autre à dire à Allan. Il ne pouvait pas lui balançait qu'il était en train de lutter contre lui-même pour ne pas fantasmer sur ses lèvres douces, chaudes et charnues posées sur différentes parties de son corps. ça risquait de créer un léger malaise entre-eux. Très léger.Il sentit soudain une présence près de lui et manqua de sursauter lorsqu'il vit le visage d'Allan à quelques centimètres du sien.

« Frank... t'as pas le droit de porter la moindre parcelle d'attention aux opinions de ces gens. Ne les laisse pas te faire douter de celui que tu es. »

Le problème Allan, c'est que si je n'étais pas celui que je suis, si j'étais quelqu'un d'autre, je ne courais pas le risque de te perdre et de perdre notre amitié. Sauf qu'actuellement c'est ce qui est en train d'arriver...

Son regard échappa aux prunelles d'Allan qu'il ne parvenait pas à fixer sans être pris d'un profond sentiment de culpabilité. Les mots qui franchirent la barrière de ses lèvres étaient emplis de douleurs, sous les intonations graves et presque monotones de Frank.

« Tu ne t'es jamais dis... que les choses seraient plus simple si... si je n'étais pas ce que je suis justement ? ».

D'une main, Allan le fit relever la tête pour le forcer à le regarder. Ses yeux étaient voilés de colère. Cette colère qu'il destinait généralement aux autres, et qui aujourd'hui lui était adressée.

« Je t'interdis Frank. Je t'interdis de dire une chose pareille. Tu n'as pas le droit de laisser leurs paroles avoir un quelconque effet sur toi. Si tu comptes autant pour moi, c'est justement parce que tu es Frank. Ce garçon gentil, souriant, drôle, courageux, loyal, un tantinet possessif sur les bords, et prêt à tellement de choses pour les gens qu'il aime. Je ne veux pas me retrouver avec un clone inintéressant du Frank que j'aime. Alors arrête de penser à ça. Et s'il faut que je te lance un oubliette pour plus que t'y pense je le ferais. Compris ? »

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