Finie

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Vidée.

Moulue.

Abattue.

Écoulée.

Exténuée.

Brisée.

Claquée.

Lasse.

Vannée.

Éreintée.

Démolie.

Tout en avançant, les yeux mouillés, je réalisais mentalement cette liste interminable. Tant de mots existant pour exprimer mes tourments... tant de mots qui me prouvaient une fois de plus que je n'étais qu'une âme perdue parmi tant d'autre.

Errant ainsi, évitant de justesse les feuillages qui me barraient la route, luttant contre le vent glacial fouettant mon visage, j'avançais pour m'éloigner le plus possible de cet être qui m'avait une fois de plus réduite à néant.

J'avais tenue plusieurs heures, feintant d'humeur joyeuse, la douleur qui grandissait en moi. Il fut un temps où j'aurais sauté à la gorge de Niniel, imposant ma pensé telle une lionne se battant pour ses privilèges. Mais aujourd'hui, je n'en avais plus la force. Que pourrait une lionne si même le mâle alpha se détourne de son chemin. Je sentais cette boule, grandissante au fur et à mesure du repas, qui m'empêchait de parler, de manger... je n'avais qu'une envie : pleurer.

Mon mal-être ne passa totalement inaperçu. Aeglos, toujours aussi prévenant dans ce genre de situation, s'inquiéta de mon état. Bien que je n'allasse pas donner la véritable raison de ma morosité, j'en profitais pour m'éclipser prétextant une migraine atroce. Je n'étais pas stupide, il n'y en avait qu'une a cette table qui crue dur comme fer à ma migraine... quoi qu'avec le recul, je commençais à douter de sa sincérité.

Prenant congé de mes amis, si je pouvais toujours les qualifier de la sorte après leurs mensonges... je pris un soin particulier à faire mes adieux de la manière la plus douce possible. J'aurais voulu m'étaler davantage sur la chance que j'avais eu de les croiser, mais ils m'auraient pris pour une folle. Seul Thranduil arqua un sourcil alors que je le remerciais pour le tuteur qu'il était et de tout ce qu'il m'avait apporté depuis qu'il avait croisé ma route.

J'étais très mélodramatique ! Et lui pas assez dupe...

Alors que j'allais passer la porte, l'elfe qui m'avait suivi m'attrapa le bras, m'obligeant à faire face. Mes yeux dans les siens, j'avais du mal à contenir l'amertume de mes émotions. Pourquoi diable était-ce si difficile de résister à ce crétin ? Il m'avait mis en miette, il s'était joué de moi, m'avait mentis, caché des choses... il avait même osé voler mon cœur ! Lui qui faisait si souvent des discours sur le Féa... j'avais cru l'espace d'un instant que le mien se serait lié à lui ... Si ce n'était le cas, j'en ressentais tout de même le déchirement.

Il mit du temps à parler, scrutant d'un air incertain mes réactions... S'il te plaît, dis-moi de rester, dis-moi que je me fourvoie... je t'en prie ... je t'aime ...

_ N'oublie pas, ce soir ... je t'attends pour ton cours.

Il est sérieux lui ? Aucun scrupule le mec ! Franchement, Blondi ... t 'es presque irrécupérable tellement tu me fais pitié ...

Je lui répondis, le plus poliment possible étant donné que nous n'étions pas seuls, qu'il pouvait se carrer le doigt dans l'œil jusqu'au coude car "ma migraine" ne me permettrait pas de supporter un cours de langue ... de quelque nature qu'il soit.

_ Tu ne pourras m'éviter chaque jours, Elyfaelle... me souffla-t-il à l'oreille. Il faut que nous parlions.

_ Il aurait fallu y penser avant ... je suis souffrante, laisse-moi partir.

Sous le regard du printempsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant