math&nath

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MATHYS

Jour de la rentrée

Une chose est sûre, cette salle de classe ne m'avait pas manqué. Depuis une heure que j'ai rejoint ma place, tout au fond, à côté de la fenêtre qui donne sur la cour, j'en ai déjà marre. Notre professeur principal et de musique, M. Pinson, nous rabâche le programme pour le bac avec sa bonne humeur habituelle.
Je note sans conviction ce qu'il dit, en ignorant du mieux que je peux Nathan à côté de moi. J'ai eu le malheur d'accepter la proposition de Mindy hier, et forcément, il m'a collé du début à la fin. Voyant que je n'étais pas prêt à engager la conversation, il s'est assis à côté de moi sur l'herbe, puis m'a posé mille et une questions auxquelles je n'ai d'abord répondu que par politesse. Mais même si je ne l'avouerai jamais, j'ai fini par discuter un peu avec lui, et à trouver agréable sa voix et sa présence. J'ai même fini par le trouver vraiment gentil. Au fond, ça m'a fait plaisir qu'il essaie autant de me connaître, même si une partie de moi me murmure qu'il ne s'intéresse qu'il ne souhaite me connaître que parce qu'il est nouveau, et qu'il trouvera bientôt des personnes plus intéressantes dans la classe. Et une autre partie, plus grande et plus forte, me hurle que Félix n'aimerait pas.
Je soupire. Félix me manque, j'aimerais tellement qu'il soit là. J'ai voulu l'appeler hier soir, mais il m'a raccroché au nez. Il est énervé parce que j'ai rasé mes cheveux, et je m'en veux encore plus.
J'ai juste l'impression de tout faire de travers, et ça le fait souffrir.
Un papier arrive sur mon cahier alors que je recopie sans enthousiasme les dates des concerts du lycée et des différents voyages scolaires. Nathan, à ma droite, regarde notre professeur, un sourire innocent aux lèvres. Comme si le papier pouvait venir de quelqu'un d'autre... La curiosité l'emportant, j'ouvre le petit mot, et déchiffre l'encre bleue:

"Je sais ce que tu penses. L'écoute pas, parce que ça te va bien."

Je manque de m'étouffer. Quelle audace... C'est à mon tour de lui répondre.

"Qu'est-ce-que t'en sais ?"

Il griffonne avant de me tendre le papier à nouveau.

"J'ai un super pouvoir ;) (ou c'est Mindy qui me l'a dit... au choix)"

"Sans vouloir te vexer, la deuxième option me paraît plus plausible. Je pense pas vraiment que tu aies de supers pouvoirs."

"Qu'est-ce que t'en sais ? Peut-être que je sauve des gens."

"Et tu en sauves ?"

"Pas vraiment. Enfin, une fois j'ai sauvé mon petit frère de la noyade, mais c'est moi qui l'avais poussé dans l'eau, donc je sais pas si ça compte."

Je lâche un rire. Si les yeux de monsieur Pinson pouvaient lancer des éclairs, je ne donnerais pas cher de ma peau. Il arrête d'écrire pour me reprendre:

"Monsieur Sommergos, si les dates de vos bacs blancs sont si drôles à vos yeux, je peux vous en rajouter. Qu'en dites-vous ?

-Heu, non, non merci. Désolé, monsieur."

Je me sens un peu mal à l'aise, et enfonce nerveusement mes mains dans les manches de mon sweat, que je garde malgré la chaleur. Ce n'est pas à mon habitude de me faire remarquer en classe. Une fois notre professeur retourné à son tableau blanc, c'est à mon tour de fusiller Nathan du regard. Il est mort de rire. Je lui donne un coup de coude en le traitant de crétin.

"Je suis désolé, mais c'était trop drôle. Tu aurais vu ta tête !

-Tais-toi, on va se refaire choper avec tes bêtises... et puis quoi ma tête ? T'as vu la tienne ? T'es tellement rouge qu'on dirait un poivron.

-C'est parce que tu me fais rire, aussi ! Et puis c'est mignon un poivron.

-C'est mignon ? C'est un légume, Nathan, ça n'a pas à être mignon..."

Monsieur Pinson nous intime de nous taire, et j'obtempère sans broncher. Inutile de me faire encore plus remarquer. Nathan ne rajoute rien, mise à part un autre petit mot:

"En tout cas, ça m'a fait plaisir de te voir rire."