Arrivés en ville, je fus surprise de voir de nouveau autant de gens, moi qui m'étais vite habituée au calme et au silence de la forêt. La plupart des passants reconnaissait Levi, et marcher dans la rue avec lui me rappela soudainement à quel point il était différent de ce que je pensais de lui auparavant et de ce que la populace en pensait aussi. Je ris intérieurement en pensant à quel point je l'admirais, à quel point je l'adulais lorsque je ne le connaissais pas. Il était une véritable légende parmi le peuple.
C'était moi qui embrassais chaque matin cette légende et c'était moi qu'il tenait dans ses bras chaque jour. Moi seule le connaissais à ce point-là. Une pointe de vanité naquit en moi et je relevai la tête fièrement. Parmi toute la population, c'était moi qu'il avait choisie. Moi. Un passant approcha Levi pour lui serrer la main, mais le brun était tellement nerveux qu'il lui fit peur et qu'il se contenta de le saluer de loin.
"Levi, je vais aller demander aux commerçants du coin. Pendant ce temps-là, ce ne serait pas mal si tu faisais quelques courses, non?"
Lui proposai-je. Je lui tendis les rênes d'Horus.
"Je reviens vite, promis."
Je l'embrassai sur la joue et partis chercher un commerçant qui pourrait me renseigner. Une vieille marchande de fruits m'interpela depuis son étal et me fit signe d'approcher.
"Mon enfant, venez par là, venez par là..."
Je vins la voir, souriante.
"Jolie demoiselle, mon fils est malade et devait livrer ces lourdes caisses de pommes dans le bar là-bas, deux rues plus loin. Pourrais-tu aller voir son gérant et lui demander de venir les chercher, s'il-te plaît?
- Je vais les lui amener, plutôt, ce serait plus rapide, non?
- Oh, elles sont assez lourdes, mademoiselle, je ne sais pas si-..."
Le temps qu'elle termine sa phrase, j'avais déjà soulevé les deux caisses.
"Mais...
- Bataillon d'exploration à votre service, madame."
Lui répondis-je en lui faisant un clin d'œil. Elle se leva de surprise tandis que je m'éloignais vers le bar qu'elle m'avait indiqué. M'ayant vue, elle avait cru directement que je n'étais qu'une faible citadine, sans se douter que j'étais soldate. Je trouvai rapidement le bar, donnant les caisses au gérant qui ne s'attendait pas à voir une fille comme moi arriver, et je me rendis compte à quel point je semblais fragile. Et je me sentis un peu vexée. Je revins vite voir la marchande, espérant cette fois pouvoir lui demander où trouver un médecin. Levi parlait à la marchande, un sac de pommes accroché à la selle d'Artémis.
"Jolie demoiselle! Pour te remercier, je t'offre un sac de pommes, votre petit ami l'a récupéré."
Levi me toisa.
"Je croyais que c'était moi qui devais faire les courses.
- Je t'expliquerai plus tard."
Je me tournai ensuite vers la marchande pour la remercier et lui demander où trouver un médecin.
"Oh, une paire de kilomètres au nord, vous trouverez une petite maison très charmante où vit un couple de médecins. On ne les voit plus souvent, en ville, cela leur fera du bien, un peu de visite."
~
Nous la trouvâmes assez vite car c'était la seule maison perdue sur une route longue de plusieurs kilomètres. Nous accrochâmes Horus et Artémis au portique, avant de nous tourner vers la petite maison, pour aller y toquer. Petra m'attrapa la main. Elle tremblait un peu, et ce serait mentir que de dire que ce n'était pas mon cas. Nos deux cœurs battaient à en faire exploser une ville. Sur le pallier, y fallait que je toque, mais mon bras restait inerte le long de mon corps, refusant de bouger. Elle me lança un regard, puis souffla. Elle leva le bras qui tenait ma main, et elle toqua avec. Nous entendîmes rapidement des bruits de pas et la porte s'ouvrit, devant un couple de petits vieux souriants.
"Oui?
- Bonjour excusez-moi, êtes-vous médecins?
- Nous l'étions tous les deux, mais mon mari a pris sa retraite, entrez."
Ils se poussèrent et nous laissèrent entrer, avant de nous amener dans un petit salon.
"Si vous êtes en congé, nous pouvons passer le lendemain.
- Mais non, mais non. Je ne reçois juste plus beaucoup de patients, en ce moment. Alors, pour qui voulez-vous un médecin?"
Le mari partit faire du thé. Petra avança d'un pas.
"C'est... C'est pour moi.
- Ce n'est pas la peine de devenir rouge, voyons. Venez avec moi, nous serons plus tranquilles loin des hommes."
La mamie lui prit la main et l'emmena loin de moi, tandis que le papi m'amenait une tasse en me proposant de m'asseoir.
"Vous me dites quelque chose, jeune homme."
Jeune? Cela faisait longtemps que l'on ne l'avait pas appelé comme cela.
"Je jurerai vous déjà vu quelque part, je n'oublie jamais un visage, et surtout pas un si caractéristique comme le vôtre."
Qu'avait-il, mon visage? Je regardai autour de moi, cherchant une distraction. Un journal était posé sur la table basse. Voyant que je le regardais, le papi le prit et me le tendit.
"Aujourd'hui, un nouvel espoir renaît."
Lit-il à haute voix.
"Vous savez, j'ai toujours cru au bataillon. Lorsque mes patients râlaient après eux, je les ai toujours défendus."
Me raconta-t-il en tapotant le journal du doigt.
"Et vous, vous y croyiez, avant que le major ne déclare avoir découvert ces... Bombes?
- ... Non, je n'y croyais pas.
- Vous êtes sincère au moins, c'est très bien. Les jeunes d'aujourd'hui... Mentent tout le temps, il est très difficile pour eux d'avouer la vérité très souvent gênante à accepter.
- Avec vos enfants, c'était pareil?"
Le papi soupira tristement.
"Nous n'avons eu qu'un fils, mais il est parti depuis bien longtemps, il nous a oubliés...
- Vous regrettez de l'avoir eu?
- Quelle question! Bien sûr que non! Vous n'imaginez pas le bonheur que c'était lorsque j'ai appris que j'allais en avoir un... Je n'y croyais pas, au début, c'était très confus dans ma tête. Le plus beau jour de ma vie a été lorsque j'ai tenu mon fiston dans mes bras, comme ça."
Il leva les bras et mima le tenir dans ses bras.
"Croyez-moi mon garçon, je n'ai plus jamais connu pareil bonheur."
La porte du petit salon s'ouvrit, et Petra apparut. Elle avait l'air... Perdue.
"Si nous sortions quelques instants?"
Le papi hocha la tête, Petra me prit par la main et m'emmena dehors. Elle sortit presque en courant, dévalant les deux, trois, marches du porche avant de se retourner. Je n'arrivais vraiment pas à lire sur son visage, il était très confus. Elle me regardait fixement, cherchant ses mots. Je lui laissai le temps et l'espace pour qu'elle puisse respirer et parler.
"Je veux savoir exactement ce que tu penserais si, après tout, je n'étais pas...
- Petra, si c'était faux, ce ne serait pas grave, je t'assure.
- Je veux savoir que seras là, au moins pour les prochaines années, parce qu'il faudra que tu soies là, je risque d'avoir beaucoup besoin de toi d'ici plusieurs mois, et..."
Elle précipitait ses mots et des larmes apparaissaient dans ses yeux, commençant rapidement à couler. Elle renifla, tentant de les essuyer.
"Alors là, on dirait que je pleure mais... Je ne pleure pas, c'est juste que... Je pleure, en fait, mais ce n'est pas ce que tu crois..."
Je la pris dans mes bras et elle s'accrocha à ma chemise.
"Il-... Il a quatre semaines... Cela faisait déjà quatre semaines qu'il y avait cet... Quatre semaines qu'il était là, et-... Je suis contente! Je suis si contente! Mais... J'ai peur... Oh mon dieu si tu savais comme j'ai peur..."
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Un espoir grandissant (Et si y avait-il un espoir? 2, Rivetra)
FanfictionAprès avoir vécu la naissance d'un premier espoir, ils s'étaient abandonnés l'un à l'autre, se laissant aller à ces sentiments qui les oppressaient depuis trop longtemps. Cependant, la vie réelle n'allait pas tarder à les rattraper, emplie de doutes...