Chapitre 16

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Le vendredi matin, je reçois un très bref message collé sur ma porte. C'est de Nate; il me demande de le rejoindre à son bureau pour les derniers ajustements sur la série Black Butterfly. Je pousse un long soupir. Pendant deux jours, j'ai redouté de recevoir ce message, et maintenant que j'y suis, je me sens encore plus mal à l'aise et stressée. Je n'ai pas reparlé à Nate depuis ma pseudo-crise dans son bureau, mardi, et encore à ce moment-là, je ne lui ai pas vraiment parlé.

S'il n'avait pas été trop concentré sur sa belle anglaise, peut-être que tout se serait passé autrement, mais ce n'est pas le cas.

— Lory, m'interpelle Paul, qui passe dans le couloir. Nate m'a dit que vous aviez terminé le travail... Si je vous attends dans mon bureau, disons... treize heures, ça vous va ?

— Bien sûr, affirmé-je, une boule dans la gorge.

Ça signifie que je dois voir Nate avant.

— Pendant que j'y pense... Tu ne m'as pas donné de réponse, en ce qui concerne la petite réception, chez moi, samedi prochain. Est-ce que je peux te compter parmi mes invités ?

Je suis prise de court. J'espérais tellement pouvoir tout simplement passer à côté sans que personne ne le remarque... J'aurais dû me douter que Paul ne lâcherait pas le morceau. Il aimerait tant que je me mélange un peu aux autres, que je m'intègre et me fasse des amis. Pourtant, il me connait. Il sait pertinemment que je ne suis pas une Clara, je ne suis pas comme sa femme. Lyn me fait un peu penser à elle, d'ailleurs. Elle a la même étincelle dans les yeux, quand elle parle de quelque chose qu'elle aime.

— Je vais y réfléchir... D'ici mercredi, tu auras ta réponse.

Paul se contente de hocher la tête, et quitte mon bureau pour repartir du côté opposé du sien.

Maintenant, il ne reste plus qu'à aller voir Nate.

Quel calvaire.

*

Cette fois, je ne pousse pas la porte du bureau de Nate. J'attends patiemment devant, les yeux fixés sur la petite plaque dorée au nom de N. Horrington. Mes cahiers de note serrés sur ma poitrine, je tourne la petite poignée uniquement après avoir attendu sa voix grave m'inviter à entrer.

Je reste debout près de la machine à café, perplexe. Je l'aperçois devant son bureau, les coudes appuyés sur les rebords. Ses lunettes sont perchées sur le bout de son nez, ses cheveux ébouriffés retombent devant ses yeux et, de sa main droite, il griffonne quelque chose sur une feuille.

Ça m'étonne de ne pas y croiser Rachel; elle doit bientôt recevoir son abonnement à Nate, d'après moi.

— Tu voulais me voir ? Dis-je, pour attirer son attention.

Il sait pourtant que je suis là. Il m'a dit d'entrer. Sauf qu'il m'ignore, tout simplement.

D'un mouvement brusque, il retire les lunettes de son nez et le jette sur son bureau sans délicatesse. Il pince l'arête de son nez entre son pouce et son index, avant de se frotter les yeux.

— Ouais, lance-t-il, las. Viens t'assoir.

Sourcils froncés, ma première réaction est de vouloir protester, mais je ne suis ni d'humeur à déclencher une confrontation, ni enthousiaste à l'idée de me diriger sur un terrain glissant.

Je m'assieds dans le même vieux fauteuil que toutes les autres fois précédentes. Nate, visiblement exténué, tourne sa chaise pour me faire face. Il prend une pile de trois livres, dans le coin de son bureau, et les dépose devant moi dans un bruit sourd. J'observe mon collègue.

LotusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant