Chapitre 29

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L'événement qui commence à me faire redouter d'être monté avec Nate nous dirige dans le seul arrondissement de New-York où je n'ai encore jamais mis les pieds toute seule; le Bronx. Bien que sa réputation ait bien changée depuis quelques années et qu'il soit devenu le berceau de la culture hip-hop, on me répète souvent qu'il s'agit du quartier le plus polémique de la ville. Je n'ai jamais eu l'occasion d'aller voir par moi-même... jusqu'à maintenant.

Nate se stationne devant une petite maison beige, au toit qui semble ancien et aux fenêtres recouvertes de volets rouges. Sur le balcon, dont le bois usé ternis la couleur, est installée une petite table à café et une chaise berçante. Avant de sortir de l'Impala, Nate prend quelques secondes pour observer la maison. Durant le trajet, il ne m'a rien expliqué. Il a préféré rester silencieux et réfléchir à... je ne sais quoi.

— Attends-moi là, m'ordonne-t-il, en fermant les phares de la voiture.

Il ouvre sa porte et me jette un dernier coup d'œil avant de sortir.

— Je ne plaisante pas, tu restes là.

Je lève les mains en signe d'innocence.

Je le regarde s'avancer vers la porte d'entrée avec une appréhension que je ne pensais pas ressentir. Si, au moins, je savais ce qui se passe ! Je suis dans le néant. Qu'est-ce qu'il va faire, pour être autant sur les nerfs ? Un complot de vente de drogues ?

D'ARMES ?

Non. Franchement. J'ai passé beaucoup trop de temps à lire Black Butterfly; je commence à projeter l'histoire sur tout ce qui m'entoure. Nate n'a rien de Jace, tout comme je n'ai rien de Laura. C'est une femme forte, déterminée, organisée... À ma place, elle bougerait son cul hors de cette voiture et prendrait le risque d'aller coller son nez dans la fenêtre pour connaître la vérité. Sauf que je ne suis pas elle. Moi, je suis trop froussarde.

Je me concentre sur la maison. Les volets sont ouverts, alors je peux voir des ombres bouger à l'intérieur. Nate est entré comme une fusée, tout à l'heure.

D'ailleurs, ça commence à être long. Je soupire plusieurs fois, et toutes les deux minutes, je me surprends à songer à lui voler sa voiture. Sérieusement, qu'est-ce qu'il fout ? Ça fait au moins vingt minutes que j'attends ici !

Après un autre cinq minutes, j'ouvre la portière et m'appuie contre la voiture. Après deux minutes, je m'assieds sur le capot et après encore une minute, je fais les cent pas autour de l'Impala. Désormais très impatiente – car je crois l'avoir assez été jusqu'à maintenant – je me dirige vers la fenêtre, sur le côté de la maison, pour essayer de voir à l'intérieur. Je ne tiens pas non plus à me mettre dans de sales draps en débarquant à l'improviste... S'il y a vraiment un problème, je m'en mordrais les doigts...

Du bout des doigts, je rabats le volet. Je n'ai pas le temps de remarquer quoi que ce soit que des phares aveuglants pénètrent dans la cour. Instantanément et sans réflexion, je m'accroupis et me cache derrière l'arbre sans feuilles qui se dresse près de la paroi.

Un homme sort d'une vieille Opel Manta rouge. Il porte de grosses lunettes, une barbe mal rasée et un t-shirt blanc trop large. En claquant la portière, il remarque l'Impala de Nate et pousse un grognement que j'entends jusqu'ici.

— Espèce de fils de pute, crache-t-il, la mâchoire serrée.

Les dents de sa clé s'approchent de la peinture noire du véhicule, avant d'y laisser une trace de la longueur d'un bras dans un crissement qui me fait grincer les dents. Merde ! Il est complètement malade ! C'est qui, ce type ?

D'un pas lourd et hardi, il se dirige vers l'entrée avec une rage palpable dans le regard.

Oh, mon Dieu ! Nate !

LotusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant