𝔻𝕖𝕤𝕥𝕚𝕟𝕪 ˢᵃⁿ

1- MISUK

Je scrute nerveusement les alentours, me demandant si c'était vraiment une bonne idée de le rencontrer un vendredi soir, la soirée la plus vivante dans toute la nation. Il avait insisté, me répétant qu'il souhaitait voir les feux d'artifices annuels avec moi, comme avant. J'avais au final abdiqué, ayant secrètement envie de revivre ces moments avec lui. Nous qui étions si proches avant, maintenant, nous pouvons nous voir à peine une fois par mois.

Alors que je m'apprête à redescendre en ville, je perçois du mouvement dans un arbre au sommet de la colline, juste un peu plus loin de moi. Je rigole doucement, me rappelant que pour un Verseau, c'est tout à fait normal de grimper dans les arbres. Qu'ils n'ont pas à se tenir avec une bonne posture pour ne faire aucun plis à leurs complets, qui sont d'ailleurs inexistants, et surtout, qu'ils n'ont pas à se soucier de montrer une bonne image de leur signe. Ils en ont, de la chance. Ou plutôt, ils ont de la chance pour cela.

Je cours jusqu'à l'arbre et grimpe à l'intérieur. Cela faisait si longtemps... Ce genre de libertés me manquent tellement...

Sauf que lorsque j'arrive au même niveau que lui, ce ne sont pas ses mèches noires qui captent mon regard, ce sont des cheveux blonds ondulés. J'essaie d'y voir un brin de familiarité avec mon visage à moi, ces caractéristiques familiales qui nous sont uniques. Pourtant, ce que je détaille est le visage d'un parfait inconnu. Je déglutis et balbutie des excuses avant de commencer à descendre.
« Je m'appelle San, résonne une voix angélique. »

Mon regard croise de nouveau le sien et je soupire.
« Moi non plus, je ne suis pas censé être ici, murmure-t-il avec un triste sourire. »

Mes doigts crispés autour des branches se relâchent délicatement et mon corps tendu se détend légèrement.
« Et si je te disais que j'ai le droit d'être ici? je m'essaie.
- Alors je te répondrais que tu es vraiment unique pour sourire ainsi juste en grimpant un arbre. Il n'y a que nous qui apprécions faire cela au point d'en sourire.
- Nous?
- Ceux pour qui c'est interdit. »

Un mince sourire amer prend place sur mon visage.
« C'est vrai, dis-je simplement. Tu es quoi?
- Je suis San, je te l'ai dit.
- Je ne t'ai pas demandé qui tu étais, je t'ai demandé tu étais quel signe, 'quoi'.
- Je suis moi, murmure-t-il. Et toi? Tu es qui?
- MiSuk, je soupire.
- C'est joli. Je parie que tu es une Cancer. »

Je commence à rire. D'abord doucement, puis hystériquement, sans être capable de m'arrêter.
« Qu'est-ce qui est si drôle? Ce n'était pas une blague.
- C'est rien, Soon. Ma vie est une mauvaise blague.
- Je suis San, pas Soon.
- Pardon, San.
- Tu sembles triste, déclare-t-il en scrutant mon faciès devenu brusquement grave.
- Je dois y aller, soulignai-je en regardant la trotteuse de ma montre. »

Il ne me jette même pas un regard et fixe l'horizon qui s'assombrit.
« Reviens quand tu veux.
- C'est gentil, mais comme tu l'as deviné, je n'ai pas le droit d'être ici.
- Moi non plus.
- Tu ne comprends pas. Je n'ai pas le droit d'être dans cet arbre, oui, mais je n'ai pas non plus le droit d'être dans ce quartier, contrairement à toi.
- Je ne devrais pas être dans ce quartier non plus, affirme-t-il en fronçant les sourcils.
- Tu ne devrais pas, mais ça ne t'est pas interdit. C'est juste mauvais pour votre réputation. Moi, c'est trahir ma faction. »

Je fixe ses cheveux décolorés et ses oreilles décorées d'ornements argentés et mordille ma lèvre inférieure.
« Je suis désolée de te dire que je ne voudrai pas revenir ici.
- Fais comme tu veux, souffle-t-il en détaillant les feux d'artifices qui commencent. »

Je descends de l'arbre sans un au revoir et commence à marcher en direction du quartier des Verseaux où mon frère habite. Le fait qu'il ne se soit pas présenté à notre rendez-vous m'inquiète... Je m'empresse de traverser le quartier des Taureaux, peu enchantée à l'idée d'en rencontrer un.