Chapitre 67

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– Qu'est-ce qu'il t'a pris, Jensen ?

Kerian s'apprête vraiment à me faire la morale pour avoir fichu à la porte son ex copine ? Enfin non, Jil n'a jamais été sa petite-ami ! Disons qu'ils étaient amis avec avantage en nature !

– Ce qui m'a pris ? Cette conne était chez moi !

– Et alors ? Elle ne te faisait pas chier à ce que je sache. Elle est simplement venu me voir par rapport à Luna ; enfin je veux dire... par rapport à cette fille qui...

– Tu te fous de moi j'espère ?

Son regard s'assombri.

– Quoi encore ?

– Kerian, elle est morte ! Qu'est-ce que tu veux que je te dise ? Tu t'obstines à parler d'elle à longueur de journée comme si tu en étais obsédé.

J'ai littéralement hurlé, et je dois dire que cet excès de colère m'a fait du bien.

Il agrippe violemment mon bras et me tire vers le jardin. Au moment où il retire sa main de mon membre une légère ecchymose entoure mon avant-bras droit. Il est de toute manière devenu fou.

– Putain, qu'est ce qui ne va pas chez toi, Jensen ? Hurle-t-il faisant se retourner quelques groupes d'adolescents saouls.

– Ce qui ne va pas chez moi c'est le fait que tu ramènes toujours ton ex sur le tapis. Tu voudrais que je te parle de...

– T'as un ex, Jensen ? Est-ce que t'as un putain d'ex ?

Sa voix amère me provoque un haut le cœur. Comment ose-t-il me demander ça alors qu'il connaît très bien la réponse.

– Non, et tu le sais.

– Alors ferme-la, putain ! Je comprends pourquoi personne ne voulait de toi avant moi ; tu agis comme une enfant en prétendant être mature. T'es hystérique et tu cherches sans arrêt les problèmes là où il n'y en a pas. Qu'est-ce que tu me fais là ? Une crise de jalousie ? Comme Luna ? Finalement tu lui ressembles peut-être bien plus que ce que je ne pensais.

Je blêmis, est-ce qu'il pense vraiment ce qu'il vient de dire ? Quelle question ! Bien-sûr qu'il le pense, c'est Kerian Duchemin. Il a toujours dit ce qu'il pensait sans filtre et je voyais bien qu'il se retenait de me dire les choses depuis quelques temps.

Mon cœur semble se déchirer en mille morceaux et virevolter de part et d'autres de ma cage thoracique. Ma gorge se noue et je sens des larmes perler peu à peu sur mes joues.

– Continue, je t'en prie. Tu as d'autres gentillesses à me dire ?

– Je regrette de m'être autant battu pour toi, conclut-t-il d'une voix toujours aussi amère.

Sa respiration est saccadée et sa mâchoire s'est serrée au moment même où il a terminé sa phrase. Les anciennes balafres sur le visage de Kerian me reviennent en tête, c'est de ma faute. Tout est de ma faute, je n'aurais jamais dû laisser les choses aller si loin. Je savais qu'il me briserai le cœur, non, qu'il me briserai tout court mais je n'aurai pas pu imaginer un seul instant qu'il puisse être soulagé de le faire.

Les larmes coulent à flot sur mon visage faisant se déverser tout le mascara appliqué au préalable. Les poings serrés, Kerian ne semble pas se soucier le moins du monde de mon état, ses yeux reflètent parfaitement l'amertume présente dans sa voix et son regard noir me poignarde de l'intérieur.

– Alors dégage !

Je crie plus fort que ce que je ne voulais ce qui parvient à le faire sursauter. Je m'écroule sur le muret derrière moi et enfonce ma tête dans mes mains. Même à travers le bruissement de mes pleurs je parviens encore à entendre son souffle court, sa respiration est si forte que celle d'un buffle. Pourquoi est-ce qu'il ne part pas ? Pourquoi est-ce qu'il ne me laisse pas tranquille ? Mais après tout, il a pris un tel plaisir à me balancer tout en pleine tête qu'il ne doit sans doute pas vouloir manquer une miette de mes lamentations ainsi que de mon éplorement. Bien que je le sache acariâtre et mesquin, je ne le pensais pas si antipathique, du moins pas avec moi.

– Je t'ai dit de foutre le camp ! Je hoquette entre deux pleurs.

– Non, je suis... je ne le pensais pas.

Sa voix est cette fois suppliante, lorsque je daigne relever ma tête son regard a également changé du tout au tout. Ses yeux sont luisants et sa lèvre tremblante. Je me relève difficilement tout en balayant quelques larmes d'un revers de main puis me plante devant l'adolescent.

– Pas à moi, Kerian. Tu devrais partir.

La colère envahit son visage en quelques secondes, sa mâchoire se resserre et son regard s'assombrit de nouveau. Son poing se fracasse contre la façade de la maison tandis qu'il beugle un « putain » audible par tous les adolescents présents dans le jardin. Son poing est en sang mais je reste immobile, je ne peux pas revenir sur ma décision, il aurait gagné. De plus, je suis bien trop effrayée à l'idée de me prendre un coup.

Du sang ruisselle le long de l'avant-bras de Kerian alors qu'il observe la plaie ouverte. Son visage est rouge de colère et ses yeux injectés de sang. Il retire son tee-shirt qu'il enroule autour de son poing et quitte le jardin pour rejoindre la maison avant qu'il ne quitte enfin mon champ de vision. 

Soulmate - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant