Chapitre XXVIII ~ Loan

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Mathéïs est bizarre ce soir, il est allé se coucher sans manger et il m'a ignoré toute la soirée. Je ne comprends pas mais ça n'a pas beaucoup d'importance, j'ai encore du mal à croire que la torture, c'est fini !

Je vais me coucher après avoir mangé seul et dors paisiblement pour la première fois depuis ce qui me semble une éternité.

La sieste de cette après-midi ne compte pas.

Plusieurs jours passent et je récupère mes forces plus rapidement. Mathéïs est toujours un peu étrange avec moi, il a l'air triste en ma présence.

Légèrement vexant.

Mlle File-les-j'tons se remet doucement mais sûrement de sa blessure et m'évite soigneusement. Moi comme Blanche, d'ailleurs.

Elle aussi est étrange depuis quelques jours.

Je me fiche un peu de savoir ce qui tracasse Lilith, celui qui m'intrigue le plus, c'est Mathéïs. J'en profite qu'on soit seul, en train de faire du ménage, au rez-de-chaussée pour obtenir des réponses.

Il passe le balai de son côté et moi du mien dans un silence glacial et pesant. Je brise le silence sans gêne, trop curieux de comprendre ce qui cloche chez lui.

- Mat' ? Je l'appelle.
- Oui ?
- Pourquoi tu as l'air triste depuis quatres jours ?

Hop ! Les pieds dans le plat !

Ses joues deviennent rouge tomate, il détourne le regard, trouvant un intérêt soudain pour le sol que nous balayons. J'ai mis le doigt sur quelque chose là. Je m'approche discrètement de lui et le fait sursauter.

- Tu peux tout me dire, tu sais. Je suis comme ton grand frère.

C'est totalement faux ! Je suis amoureux de lui ! Nuance !

Alors pourquoi je dis ça ?

- Ah ! Abruti ! Tu m'as fait peur, me reproche-t-il en s'écartant nerveusement de moi.
- Désolé. Mais tu sais que tu peux me parler, hein ?
- Oui, je sais. Tout va bien, je t'assure.

Il reprend sa tâche en m'ignorant une fois de plus. Je soupire, l'opération interrogatoire est un échec cuisant. Il m'évite encore plus. Je continu de balayer en silence, soudain triste qu'il m'ignore ainsi.

Je m'apprête à réitérer l'interrogation quand un cri étrange résonne dans le hall. Mathéïs et moi sursautons en cherchant l'origine de ce cri monstrueux. Un nouveau retenti, plus proche, plus agressif, plus animal. Mes s'agrandissent quand je vois Lilith débarquer telle une furie dans le hall, me fonçant droit dessus avec des yeux affamés.

La suite s'est passée trop vite pour que je comprenne. Lilith me plaque au sol, postée au-dessus de moi en grognant et elle se met à me déchiqueter de ses griffes magiques sous les yeux ahuri de Mathéïs.

J'hurle de douleur, de peur et de colère. Je ne veux pas que Mathéïs me voit mourir ainsi.

Parce que si personne ne l'arrête, c'est exactement ce qu'il va arriver.

Lilith se défoule sur moi, m'arrachant vêtements, peau et cris sans distinction. J'ai affreusement mal, je sens mon torse être profondément lacéré. Je sens mon sang s'écouler de mon corps en même temps que mes forces m'abandonnent. Je sens la mort se rapprocher de moi pour me faucher. J'entends à peine le cri déchirant de Mathéïs qui hurle mon prénom.

Je comprends enfin ce qu'il se passe : Lilith me torturait pour se nourrir de ma douleur et depuis quatres longs jours, elle n'a rien mangé. Sa blessure l'affaiblissant, sans nourriture, le manque se fait ressentir d'autant plus fortement. Et elle vient de craquer.

Pitié. Si tu me tue, ne t'en prend pas à Mathéïs après.

Ma prière semble être entendue. La voix de Blanche me parvient étouffée.

- Lilith ! Arrête ! Tu vas le tuer ! S'exclame-t-elle.

Sans blague !

Le poids du corps de Lilith qui m'oppressait disparait soudainement et je reprends ma respiration. J'ai mal partout, mon sang a giclé en tous sens et un voile rouge obstrue ma vue. Je respire fort et de façon très chaotique, je sais que je suis mortellement blessé.

L'agitation à mes côtés me rappelle dans quel contexte je suis : Lilith m'a attaqué devant Mathéïs.

- Mathéïs ! Emmène Loan loin d'ici ! Lilith est en crise ! Dépêche-toi ! Ordonne la voix de Blanche, crispée sous l'effort.

Le manche de son balai s'écrase au sol et son visage noyé de larmes entre dans mon champ de vision. Je ne peux pas sourire, ni le rassurer comme je peux, parce que je sais que mon état est plus que déplorable.

Les mains de Mathéïs passent sous mes aisselles et il me traine jusque dans notre chambre. Je souffle et étouffe un grognement quand il m'allonge sur le lit.

Je le sens, il panique. Il ne s'arrête pas de pleurer et de murmurer mon nom désespérément.

Je suis navré, Mat'. Je pensais que les choses allaient s'arranger.

Pacte avec le Diable [TERMINEE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant