Chapitre 5 : Espoir et déception

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Lorsque Pansy ouvrit les yeux, en ce lundi matin, dans le lit du préfet-en-chef de Serpentard, elle avait mal à la tête. Des bribes de souvenirs de la veille la frappèrent en plein visage, et elle dut refermer les yeux sous le coup.

Queenie avait répété à Pansy ce qu'elle avait entendu dans le couloir et Astoria s'était directement éclipsée dans le dortoir des garçons avec Blaise. Drago n'avait pas attendu un instant de plus pour solliciter Pansy et quitter la fête, non sans avoir embarqué le plateau de drogues avec eux. Lorsqu'ils avaient atterri dans sa chambre, Drago était déjà gonflé de désir, il s'était immédiatement montré entreprenant. Il avait pris une pilule d'achilée sternutoire et l'avait embrassé, pour qu'elle l'avale, avant d'en prendre une à son tour. Les préliminaires avaient duré des heures, et Pansy, très inconfortable au début de ne pas avoir le contrôle de la situation comme elle en avait l'habitude, s'était peu à peu laissé séduire par les sensations nouvelles qui envahissaient son corps sous l'effet de la drogue. Elle comprenait mieux pourquoi tout le monde en prenait. La langueur des caresses, la douceur des baisers, l'intensité du sentiment lorsque Drago entra en elle, ce soir-là : elle n'avait jamais soupçonné que ce put être possible. Elle s'était montrée entreprenante, peut-être pour la première fois, afin que son amant se plie à son désir. Elle voulait ressentir son corps sur sa peau, sa langue frôlant son intimité, ses doigts en elle. Elle avait joui, comme jamais elle ne l'avait fait avant, après des heures de plaisir langoureux, longtemps après que les oiseaux du matin se soient mis à chanter. Elle avait ressenti Drago plus qu'elle ne l'avait jamais ressenti auparavant. Elle savait ce qu'il désirait avant même qu'il ne lui fasse comprendre, il voulait prendre son temps, ressentir ce qu'elle avait à lui offrir, exploser en apothéose en même temps qu'elle. Lorsqu'ils avaient fini par s'allonger, épuisés, enlacés, sur le lit aux draps blancs trempés de la sueur de leur nuit, il lui avait murmuré, pour la toute première fois : « tu es incroyable, Pans' », et il s'était endormi, un sourire d'ange au coin des lèvres.

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Ce matin, pourtant, il n'était pas dans la chambre lorsqu'elle se réveilla. Elle aurait même pu croire que ce n'était qu'un rêve, si elle ne s'était pas retrouvée nue, des marques rosées parsemant son corps, laissant la marque visible de leur folle nuit. Drago lui avait laissé de l'argov sur la table de nuit, en prévision de son mal de tête et était déjà descendu déjeuner, à en croire l'odeur de savon qui flottait dans la salle de bain attenante. Pansy, tout à son bonheur de la veille, se remémora ces beaux moments sous la douche, avant de se rendre à son tour dans la Grande Salle. Lorsqu'elle prit place à côté de Drago, et l'embrassa sur la joue, il lui apparut froid à nouveau, comme si la veille n'avait jamais existé, et elle sentit son estomac tomber dans ses talons. Il s'était assis à quelques places d'Astoria, et semblait tenter de déceler ce qu'il s'était passé entre la jeune fille et Blaise durant la nuit, car elle ne lui adressait de toute évidence plus la parole ce matin. Bien sûr, il fallait que Pansy s'y habitue. À partir de maintenant, il n'y en aurait plus que pour Astoria dans la maison des verts et argent. La gratitude et la loyauté n'était pas leur point fort, après tout, tout le monde le savait. Elle but son thé en silence, une boule dans la gorge, et partit en cours sans même avoir mangé.

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Lors du premier cours de la journée, celui de potion, dispensé par le professeur Slughorn, Blaise se mit en duo avec elle pour travailler. Il voulait sans doute lui parler d'Astoria, mais Pansy n'avait pas le cœur à ça. Encore cette foutue garce ? Quand allait-elle la laisser tranquille ? Ça ne faisait pas plus de 72 heures qu'elle était apparue dans leur vie à tout –il fallait bien l'admettre, l'an dernier, c'était Daphné la seule à se faire remarquer dans la famille Greengrass– et Pansy n'en pouvait déjà plus. Elle avait l'estomac noué et se sentait lasse : il lui semblait n'avoir jamais été aussi déprimée.

À quoi pouvait bien servir sa vie finalement ? Qu'est-ce que changerait sa mort réellement ? Ce n'est pas comme si elle avait de vrais amis, de toute manière, la maison Serpentard ne créait jamais que des alliés et des serviteurs, tandis que l'amitié et l'amour leur était un sentiment étranger. Ses parents seraient plus attristés par la perte de l'héritière Parkinson que de leur fille Pansy. Qui d'autre ? Elle était détestée de tous, à Poudlard, car elle était une Serpentard, une vraie, une teigne qui riait aux blagues cruelles de Drago et qui n'hésitait pas à insulter les amis de Saint-Potter. Elle avait toujours pensé que Drago, lui, la regretterait, mais elle commençait à penser qu'il n'en avait plus rien à foutre d'elle. La nuit qu'ils avaient passés, la plus incroyable nuit pour elle, n'était rien de tout cela pour lui. Si Drago était excité, hier soir, avant de la tirer dans sa chambre, c'était parce qu'il était avec Astoria, juste avant, et que cette garce l'avait chauffer. Astoria, qui, malgré ses avances dans le couloir, était partie coucher avec Blaise juste après. Si Drago avait voulu prendre des pilules, ce n'était pas pour s'amuser, mais parce qu'il espérait, dans la confusion des effets de la drogue, avoir l'impression de coucher avec Astoria, plutôt qu'avec elle, Pansy, qu'il connaissait par cœur depuis tout ce temps. Et quand il avait dit « tu es incroyable, Pans' », elle avait été émue, en le prenant comme le premier compliment sincère qu'il ne lui ait fait depuis très, très longtemps. Seulement, ce qu'il entendait par là –et elle ne l'avait compris que ce matin durant le petit-déjeuner, tandis que les effets de la drogue s'estompaient– c'est qu'elle était incroyable d'accepter de jouer le rôle d'une autre pour lui. C'était si humiliant. Une boule d'amertume s'était formée dans sa gorge, et elle la sentait à chaque fois qu'elle avalait sa salive, menaçant d'exploser en gros sanglots pathétiques. Elle se sentait vide, comme si plus aucun sentiment ne l'habiterait jamais. C'est donc cela que l'on appelait la mort dans l'âme. Elle n'avait même plus l'impression d'avoir une âme. Celle-ci s'était échappée en même temps que l'espoir d'un jour être suffisante pour Drago Malefoy.

Alors, même si elle avait envie d'envoyer Blaise se faire foutre, de la laisser tranquille, elle fit la seule chose qu'elle devait faire : elle lui donna des conseils pour reconquérir Astoria, sachant pertinemment qu'il n'y parviendrait pas. La garce s'était fixé un objectif, lui voler son Drago, et rien ni personne ne parviendrait à l'en détourner.

Tout était perdu.

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À la fin de la journée, Pansy n'en pouvait plus d'avoir fait semblant pendant toutes ces heures d'affilées. Elle avait dû regarder la Greengrass se pavaner durant tout le déjeuner, battant des cils innocemment, sous les yeux éperdus de toute la gente masculine. Blaise, qui avait mis ses conseils en pratique, s'était un peu distancé d'elle, mais ne parvenait pas à garder la face indifférente qu'elle lui avait préconisé. La seule chose susceptible de faire réagir une personne manipulatrice et inaccessible, c'était l'indifférence. C'était vrai dans le cas de Drago, Astoria l'avait bien compris, donc ce devait aussi être le cas pour la jeune héritière Greengrass. Pansy s'était résignée. Elle avait un trou béant dans le cœur, et n'avait pas recherché la compagnie de Drago de toute la journée, contrairement à son habitude. En entrant à la salle commune, après le dîner –où elle n'avait toujours rien mangé– elle n'était pas allée se poser dans la chambre du préfet-en-chef, mais y avait préféré son lit une place, dans le dortoir des filles. Elle avait fermé les rideaux du baldaquin, avant de les insonoriser pour pleurer tout son saoul.

Était-ce le début de la fin pour elle ? Allait-elle dégringoler de la pyramide sociale qu'elle avait mis des années à conquérir? Allait-elle tomber en disgrâce immédiatement lorsqu'Astoria arriverait à mettre la main sur Drago –car il y avait nul doute qu'elle y parviendrait ? Cette garce allait-elle être couronnée à sa place ? Comment pouvait-elle espérer remonter la pente ? Devait-elle se jeter de la tour d'astronomie, pour au moins mourir la tête haute, avant que son nom ne tombe dans l'oubli ? Ces questions tourbillonnant dans la tête, elle ne ferma pas l'œil de la nuit.

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