Chapitre 6: Vérité et mensonges

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Le crissement des rails accompagna le train jusqu'à son arrêt complet en gare. Dans un des wagons, Ren tourna ses yeux vers la fenêtre tandis que le micro des annonces crachouilla le message indiquant le terminus. Le jeune homme coupa la musique sur son portable et retira ses écouteurs. Il donna un petit coup de coude à sa sœur Zoé, endormie à côté de lui. La benjamine se réveilla et s'étira en soupirant, puis sauta de son siège. Sa queue de cheval bouclée et châtain suivit le mouvement.

— Vanessa ! On est arrivé à la maison ! C'est l'heure de descendre !

— Tu me prends pour une débile ou quoi !? grogna l'aînée.

— Exactement ! confirma Zoé. Ren tu vas chercher les valises ?

Ren s'extirpa de son siège et se faufila dans l'allée centrale à la suite des passagers, suivit par ses sœurs. Zoé lui tapota l'épaule.

— Dis, t'avais l'air plus ailleurs que d'habitude pendant le trajet. Tu fais la tête ?

— La gosse a raison, approuva Vanessa. Y a un truc qui te tracasse ? Ah je sais ! T'as pas eu vingt sur vingt à ton évaluation de magie, c'est ça ? railla-t-elle.

Arrivé au niveau des portes valises, Ren attrapa une des valises et la descendit avec difficulté tant elle était lourde. Sa mémoire se mit à divaguer à nouveau, comme ça s'était produit durant tout le trajet depuis Occlasia. Des voix inconnues qui répétaient inlassablement les mêmes horreurs et s'acharnaient sur lui, à cause de sa nature... Un moment il entendit le ricanement insupportable de Nya, celui qu'elle lui servait au collège pour se moquer. Il n'arrêtait pas d'halluciner décidément...

— Allô teuteu ! fit Vanessa en lui enfonçant un doigt dans les côtes. C'est ça ou pas ?

— On va dire que oui...marmonna Ren.

Il descendit la dernière valise, puis fit rouler la sienne jusqu'aux portes. Il sauta sur les quais et fit suivre les bagages que ses sœurs lui passèrent. Le trio remonta le long des voies et rejoignit le hall de gare, grouillant de monde. Tous les trois s'assirent sur un banc. Vanessa sortit son portable pour appeler leur mère et signaler leur arrivée.

Suivant des yeux les va-et-vient des voyageurs, Ren pensait encore à tout un tas de choses. Ces souvenirs étranges qui lui hantaient l'esprit depuis la séance de magie. À partir du moment où sa tête avait heurté ce mur, il s'était rappelé de beaucoup trop d'événements passés aux oubliettes. Depuis, ça lui tournait en boucle dans le cerveau.

Il n'avait de pouvoirs et n'aurait jamais dû en avoir. Il s'était fait plus ou moins harcelé à ce sujet durant le primaire et le collège, avec pour apothéose Nya. Apparemment, elle était allé bien au-delà du supportable et Ren lui avait fait payer le prix en lui lacérant la paupière.

C'était peut-être pour cette raison qu'elle ne pouvait plus le supporter aujourd'hui. Elle lui en voulait encore pour l'avoir défiguré. Et sans doute parce que le minable sans pouvoir qu'il était était devenu bien plus fort qu'elle. La question était : comment avait il pu avoir des pouvoirs ? Par quels moyens et surtout pourquoi avoir tout oublié ?

Alors qu'une citroën C3 blanche se garait en fanfare devant la gare, Ren décida de ne plus y penser et se réfugia dans le fameux exil de « ce n'est que mon imagination ». Vanessa grogna en voyant leur mère s'avancer en hurlant à qui voulait l'entendre que c'était inacceptable d'avoir autant de retard sur les trains. Évidemment plusieurs personnes se tournèrent vers elle.

— Mais baisse d'un ton par pitié, supplia Vanessa.

— Une heure trente de retard ! cria Hélène. Je n'en peux plus moi ! J'ai des horaires à respecter !

I) Le miroir des mondesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant