Il était midi quand un vieux réveil en laiton se mit à sonner, son petit marteau cognant avec frénésie contre les cloches. Un pistolet fut attrapé sur la table de nuit, chargé et le pauvre réveil fut achevé en se prenant une balle. Il se tut après une dernière sonnerie d'agonie et de la fumée remonta de l'appareil.Allongé sur son lit, Stone fixait le plafond, bras tendu sur le côté. Ses longs cheveux ébène s'étalaient sur son oreiller comme une végétation indisciplinée. Il se redressa, visage neutre et observa sa chambre, dans un bazar indescriptible. Il posa son pistolet, déboutonna sa chemise de nuit et regarda sa ceinture abdominale, dans laquelle il sentait encore le plomb brûlant et douloureux que Sarah lui avait tiré dessus. La même sensation fantôme se faisait ressentir dans son épaule, sa jambe et son omoplate.
Il se laissa retomber sur son matelas en éclatant de rire, un bras posé sur son front. Si longtemps. Cela faisait si longtemps qu'il n'avait pas croisé la mort. Si longtemps qu'il n'avait pas ressenti cette douleur insupportable dans son corps, qu'il n'avait pas souffert à ce point là pour que la vie le quitte. Que quelqu'un n'avait pas réussit à réveiller cette étincelle d'angoisse au moment de mourir.
— Qu'est-ce ça fait du bien... ricana-t-il.
Il remonta les genoux contre lui et se rassit en prenant de l'élan. Il inspira longuement, sourire aux lèvres. Il balança les jambes hors de son lit et s'avança jusqu'à la fenêtre de sa chambre. Il écarta les stores en bois et regarda la rue de la banlieue où il vivait. Il pleuvait. Il faisait gris.
Stone jeta un regard à sa pierre de récolteur qui reposait en porte clé à sa ceinture, elle-même sur une chaise avec ses habits. Il s'avança et regarda le chiffre par transparence. Un. Il avait une seule âme, la valeur par défaut. Il se sentit si léger d'un seul coup. Ça lui avait tellement manqué de mourir. Et eux, ces quatre adolescents, ont réussi à lui rappeler cette sensation de se laisser emporter puis couler. De ne plus rien ressentir à part la quiétude et le soulagement.
Ils méritaient d'être remercié, récompensé... puis tué dans les règles de l'art.
Stone jubila tandis que la machination se mettait doucement en route dans sa tête. Il quitta sa chemise de nuit et enfila un sous pull bordeaux sans manches, puis sauta dans un pantalon marron. Il mit sa ceinture autour de sa taille, sa boucle d'oreille, ses bottes et attrapa son bracelet d'avant bras, à l'intérieur duquel reposait un système de grappin. Il laissa son manteau de côté et sortit de sa chambre. Il se retrouva directement dans une petite cuisine qui faisait office de salon.
Il quitta son minuscule « appartement » dans lequel il vivait seul et claqua la porte dans son dos. Une voisine qui sortait au même moment se décomposa, fit demi tour, l'air d'avoir oublié quelque chose et ferma son battant derrière elle. Le son de multiples serrures se fit entendre.
Les vieilles ampoules peinaient à éclairer le couloir de l'immeuble résidentiel. Stone remonta le corridor jusqu'à la fenêtre au bout du bâtiment. Il attrapa le battant par le bas et fit coulisser la fenêtre vers le haut. Il s'assit au rebord, tendit un bras devant et appuya sur un bouton sur son bracelet d'avant bras. Un câble de grappin en surgit et se planta près d'une gouttière sur l'immeuble d'en face. Stone se laissa tracter par le câble qui se rembobina et vola jusqu'au toit du bâtiment. Il sauta sur les tuiles et marcha sur quelques dizaines de mètres. Il rejoignit ainsi l'îlot d'immeuble à côté.
Avec son grappin il descendit dans la rue où il était sûr de le trouver. Mains dans les poches il avança dans la ruelle sombre, sous une fine bruine. Les pavés humides luisaient sous le soleil qui commençait à sortir. Stone baissa les yeux vers une bouteille de bière qui roula à ses pieds. Il l'arrêta en posant une botte dessus, puis s'appuya de tout son poids sur sa jambe jusqu'à briser la bouteille. Son regard rubis se posa sur la silhouette qui fumait plus loin, assis sur des caisses en bois. Il agita une main en guise de bonjour en s'exclamant avec un peu trop d'enthousiasme :
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I) Le miroir des mondes
FantasyDans ce monde, tout le monde possède des pouvoirs. Dans un autre, la mort a disparu. Dans le suivant, le soleil ne brille plus depuis des millénaires. Vivant un quotidien qu'il juge ennuyeux au possible, Ren, un adolescent au caractère exécrable, a...