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Audric

Déjà un mois complet que je vois ce foutu psy et toujours aucun changement à déclarer. Enfin, du côté de ma relation avec Peyton. Pour ce qui est de mon état psychologique... ça progresse.

Grâce à Roman, j'avais déjà pu parler de la mort accidentelle de Jayden, mon petit frère. Je me sentais responsable, coupable et il m'avait bien fait comprendre que ce n'était pas le cas. Mais, un doute subsistait quand même dans ma tête. Quand on assiste à la mort de quelqu'un qu'on aime, même si on est en rien responsable de sa mort, un doute errera toujours dans un coin de notre tête. Nous avons beaucoup travaillés dessus avec mon psy. Et je dois avouer que ça fait du bien. En plus, d'après lui, mon travail à la salle de boxe auprès des jeunes rebelles dans mon genre est vraiment un bon moyen de me relever de tout ça et de rebondir après les deux ans passés à Rikers.

Mais bien entendu, beaucoup ne sont pas d'accord avec ça. La mère d'un des jeunes que j'entraîne, Tommy, vient d'entrer et elle est littéralement entrain péter une durite. Elle est hystérique la nana ! Mon visage lui disait quelque chose sans qu'elle n'arrive à se souvenir où elle m'avait vue. Quand elle me pose la question, je répond franchement :

- T'as dû le voir dans le journal. Le procès de l'Etat contre Audric Baker.

- Le procès ? Vous...

- J'ai fais deux ans de prison à Rikers.

Son visage se fige aussitôt dans un rictus horrifié. J'imagine clairement ses pensées qui doivent défiler comme un putain de téléfilm à con qui relaterait les faits de cette nuit-là. Tout n'avait pas été rendu public mais certains faits oui, comme le fait que j'avais tabassé à mort mon cousin et plongé dans le coma mon autre cousin.

- Vous avez tué un homme... avait chuchoté la femme. Vous êtes horrible. Ignoble... un...

Puis elle se met à hurler en agitant les bras comme une dingue.

- Tommy, ramasses tes affaires ! Cet homme... mon dieu ! Je te préviens, tu ne remets jamais les pieds ici ! C'est un... un...

Je relève la tête et arque un sourcil dans sa direction. Un peu plus et elle m'insultait d'assassin cette conne !

- Avant de juger, vous feriez mieux de vous demandez ce qu'il s'est réellement passé.

Mon visage s'adoucit aussitôt à la vue de ma petite intello qui marche tranquillement vers nous, son sac de sport dans une main, une bouteille d'eau dans l'autre.

- Peyton, vas te changer...

- oh la ferme, Audric ! elle riposte. Madame, ce mec, cet ex-taulard à la gueule d'ange, m'a sauvée la vie. Sans son intervention, j'aurais été battue à mort par ses cousins sous les yeux de leur père qu'ils avaient attaché. Il a fait ça en courant le risque de mourir par balle à cause des flics qui n'avaient rien pigé à ce qu'il se passait ce soir là. Il a payé deux ans de sa vie a cause de moi. Et vous savez quoi ? Tout ça, il l'a fait par amour.

Le visage de la femme est devenu pâle puis sans un mot, elle empoigne son fils par le coude et le traine presque à la porte de la salle dans l'idée de peut-être le séquestrer chez eux afin qu'il ne revienne plus ici j'imagine...

- Vous trouvez pas que Tommy est moins en colère depuis quelques temps ? Qu'il est plus à l'écoute des autres ? Balance Peyton à la mère du gosse qui nous sourit timidement.

- Oui mais...

- Écoute, dis-je en me tenant fermement au ring, essayant de réfréner mon envie de balancer un point dans le punching-ball. J'suis pas forcément un mec bien à tes yeux, ni même aux yeux de la société en Général.

- Ne me tutoyez pas jeune homme !

Elle se rends compte que je la tutoie depuis le début cette idiote ?

- Il vouvoie personne, cet abruti. Lance Peyton avec un large sourire.

- Bref, j'suis pas le type le plus recommandable de cette salle, ni même du quartier. Mais j'ai appris à canaliser la colère que j'avais accumulées pendant dix-sept ans grâce à un type comme moi. Un mec qui a fait de la taule et qui avait la rage contre la Terre entière. Tommy n'est pas comme le gosse que j'étais à l'époque, mais venir ici chaque semaine l'a rendu moins casse-couilles et tu le sais comme moi. Maintenant que tu sais ça, t'en fais ce que tu veux mais la porte de ma salle sera toujours ouverte à ton gosse.

Je me retourne le souffle court en cherchant à éviter le regard de la bonne femme, celui de Peyton et de toute la salle qui s'est arrêtée de vivre à mes mots. Je saute du ring et traverse la salle d'un pas lent bien que j'ai envie de courir loin d'ici, loin de tout les regards qui me vrille le dos.

- Monsieur Baker.

Je ne m'arrête pas, n'esquisse même pas un geste qui indiquerait que je l'écoute mais la femme poursuit :

- Tommy reviendra la semaine prochaine.

Je déverrouille la porte qui mène à l'arrière cour avec un grand sourire aux lèvres. Encore un combat de gagné pour Audric Baker...

La porte s'ouvre à nouveau après que je me sois assis sur la table de pique-nique, une clope entre les lèvres. Peyton passe la tête dans l'embrasure et me demande si tout va bien, je la rassure d'un hochement de tête et elle s'empresse de me rejoindre. Elle s'assoit à mes côtés, et me souris.

- Je suis étonnée que tu ne l'ai pas envoyée bouler.

- Ça c'était l'ancien Audric. Dis-je en réprimant un sourire. Même si, je dois avouer que j'en ai eu envie.

Elle se marre puis plante son regard dans le mien, son rire s'estompe presque aussitôt et son souffle semble être entrecouper. Je déglutit difficilement, je la dévore littéralement des yeux, je la fixe sans ménagement comme si je voulais imprimer son visage dans mon crâne, bien que je le connaisse par cœur, sur le bout des doigts.

Lentement, je replace une de ses mèches derrière son oreille et laisse ma main parcourir son cou jusqu'au creux de son épaule. Le souffle de Peyton se coupe alors que j'effleure du bout des doigts la cicatrice qu'elle a recouverte d'encre noire et rouge. Je fais glisser un peu la manche pour découvrir pleinement l'œuvre et reste bouche-bée. Mes yeux remontent aussitôt pour rencontrer les siens.

- Elle ressemble à celles que j'ai dans le dos non ? Dis-je en effleurant à nouveau le tatouage représentant une fleur sur sa peau.

- Euh... ouais. Quand j'ai été chez le tatoueur, j'ai longuement hésité puis j'ai vu ce modèle qui m'a rappelé tes tatouages... ce n'est pas exactement la même mais, en le faisant j'avais l'impression de... me rapprocher de toi. Avoue-t-elle, les larmes aux yeux.

- Putain, bébé...

Je l'attire contre moi et la serre dans mes bras, elle niche son visage dans mon cou et je sens ses larmes couler contre ma peau.

J'ai tellement envie de l'embrasser, de sécher ses larmes et de lui dire que je l'aime. Cependant, je n'ose pas. Je ne veux pas gâcher ce moment qui semble raccommoder un peu notre couple.

- Audric...

Peyton se détache de moi et tout pleins d'émotions se lisent dans son regard quand elle me fixe intensément. J'ai du mal à respirer, à parler et lorsqu'elle prends mon visage dans ses mains pour m'attirer à elle, mon cœur est sur le point d'exploser. Je fond sur elle, nos bouches se percutent sans douceur aucune et je me délecte du goût de ses lèvres qui m'avaient tant manquées.

Avouons-le, aucun des baisers échangés depuis ma sortie des Rikers n'avait cette ardeur, ce goût d'amour et de désespoir mêlés à toute l'attente que nous avons eu pour nous retrouver.

À contre cœur, je me détache d'elle et pose mon front contre le sien, à bout de souffle et de mot. Je dépose un baiser sur le bout de son nez qui la fait sourire puis, dans un effort surhumain, je lui balance :

- Je t'aime, bébé.

Elle me sourit, et sans un mot de plus, scelle à nouveau nos lèvres alors qu'un poids se détache de mes épaules.

Deuxième combat remporté par Audric Baker...

Dernier Round (Tome 2) - ✔️Terminée (non corrigé) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant