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J'accours vers lui, affolée. Des centaines d'images et de possibilités me traversent l'esprit, mais tout cela va si vite que j'en ai le tournis, que tout me semble flou autour de moi, tout, sauf le visage tuméfié de Jake. Son œil droit peut à peine s'ouvrir tellement il est gonflé, son visage couvert d'ecchymoses violacées.

—Jake ! Tu m'entends ? Jake !

Je hurle à pleins poumons, les larmes se ruant à la commissure de mes yeux, mes joues prenant des couleurs nuancées de pourpres. Mes mains tremblent, ma voix est étouffée par les sanglots, mes mots en deviennent presque incompréhensibles. Il gémit légèrement, histoire de montrer qu'il est conscient.

—Putain mais Jake ! Ils t'ont fait quoi ? 

Mon coeur bat à tout rompre et je ne cesse d'observer toutes ses plaies, mes doigts les survolant une à une sans pour autant oser les toucher. Il semble si fragile en cet instant que je me sens impuissante.

Jusque-là sur le ventre, il essaie de se relever alors je l'aidais. Son bras gauche se posait sur ma nuque tandis que je le supportais pour l'aider à avancer jusque dans le salon.

—On va t'asseoir sur le canapé. Tu as une trousse de secours ou quelque chose du genre dans ta salle de bain ?

Il acquiesce légèrement, tandis qu'il se tient en boule sur le canapé, ses genoux contre son torse.

—Je vais la chercher, toi tu ne bouges pas.

Je cours aussi vite que possible et suis de retour quelques secondes plus tard après avoir attrapé une sacoche dans l'armoire à pharmacie au-dessus de l'évier de la salle de bain. Je sors du petit sac un produit désinfectant et une compresse pour nettoyer son visage et ses mains remplies de sang du mieux que je le peux. Je sais pertinemment que le mieux serait de l'emmener à l'hôpital mais Jake refuserait catégoriquement.

—Qu'est-ce qu'il s'est passé Jake? On a l'impression que tu reviens d'une putain de scène de crime.

Je ne crie plus, je parle presque dans un murmure, exaltant de colère ou d'angoisse, je ne savais même pas moi-même.

Il ne me répond pas. Son regard est vide, sans étincelle, comme s'il avait perdu quelque chose en lui. Une larme s'échappe de l'un de ses yeux et se déverse le long de sa joue. Il l'essuie l'instant d'après, certainement par fierté.

—Réponds-moi s'il te plait. 

Je lui parle, d'une voix presque suppliante.

Il souffle, sans pour autant me regarder, il se contente de triturer ses phalanges, plus escamotées l'une après l'autre. Je prends son menton entre mon pouce et mon index pour qu'il soit forcé de me regarder droit dans les yeux. De l'autre main, je commence à nettoyer les plaies sur le visage et le cou de Jake avec de l'eau pour enlever le sang qui avait coagulé à plusieurs endroits sur son visage.

—Je suis allé voir Tyler. Sauf que je n'avais pas le fric.

—Pourquoi t'y es allé alors? J'veux dire, t'avais pas le fric alors pourquoi avoir tendu le bâton pour te faire battre? C'est à la limite du sadomasochisme.

—Pour lui demander un délai plus long tiens!

Il commence à s'emporter, ce qui me paralyse totalement. Il prend la bouteille d'alcool posé sur la table basse devant lui en un geste brusque pour en boire quelques grosses gorgées. Et aussi rapidement que le liquide est venu à sa bouche, je reprends le whisky avant de le poser un peu plus loin, hors de sa portée.

— Vu ce qu'il t'a fait, j'imagine la réponse.

—J'ai jusque lundi. Sinon, il s'occupera de moi. Et je crois bien que ce sera pour de bon cette fois. Trop de fois je lui ai demandé des délais supplémentaires.

Il rit amèrement, bien que je ne vois pas ce qu'il y a vraiment de drôle là-dedans.

—Je suis désolée Jake. Vraiment. Même si je vois pas ce qu'il y a de drôle dans tout ce merdier.

Je me relève, remettant mon maillot correctement. Je range peu à peu les affaires de secours dans leur pochette d'origine.

Après tout, elle pourrait encore nous être utile, pensais-je silencieusement.

—Parce que dans tous les cas, je l'aurai pas ce fric. D'habitude, j'ai toujours des combines, mais depuis quelques temps, je suis enseveli par les dettes et je sais plus du tout comment sortir ma tête de toute cette merde.

Jake se contente d'hausser les épaules, comme s'il s'agissait d'une indéniable fatalité.

—Mais je pourrai te le donner cet argent, pourquoi tu me l'as pas demandé? J'ai eu beaucoup d'argent mis sur un compte lorsque j'étais plus jeune, pour mes 18 ans.

—Je vais pas te mettre dans la merde dans laquelle je me suis mis.

—Je sais me défendre tu sais !

Je lui montre mes points, l'air faussement boxeuse. Mais à la vérité, j'avais beau faire la belle devant Jake, je n'en étais pas moins effrayée intérieurement à l'idée de devoir échapper à un dealer et prêteur sur gage dangereux et surtout complètement taré.

—Personne ne peut se défendre face à Tyler. Et ce n'est même pas une question de savoir se défendre, c'est juste que ce sont mes problèmes, pas les tiens. Alors je ne prendrais pas ton fric. T'as certainement pas à donner ton fric au premier blaireau qui passe, encre moins à moi.

Je suis désormais assise à côté de lui sur le sofa, en tailleur alors que lui se redresse simplement pour me parler.

—En attendant, laisse-moi t'aider.

Il esquisse un sourire en coin et approcha son visage. Je passe un peu d'alcool le long de ses pommettes, puis sur le bas de son visage, éraflé à de nombreux endroits. Il passe sa main sur ma joue, le regard droit dans le mien.

— Tu sais que tu es belle Leïa.

Il susurrait ces quelques mots, son regard oscillant lentement entre mes yeux et ma bouche.

Mes pommettes deviennent d'un rose crépusculaire et chauffent de plus en plus. Qu'est-il en train de se produire au juste?

—T'as dû te cogner la tête je pense Jake.

Je lui réponds plus gênée que jamais. Il rigole à pleins poumons. Se ressaisissant peu à peu, il prend mon visage par le menton et avance sa tête à quelques centimètres de la mienne.

—Non, j'ai toute ma tête, au contraire.

Avant même que je reprenne ma respiration, Jake m'embrasse au creux de mes lèvres. Lorsqu'il enlève ses lèvres des miennes, il les frôle doucement, comme pour apprécier jusqu'au dernier instant ce baiser. A chaque seconde où nos lèvres se confondent, il inspire beaucoup plus profondément, comme si cela ravive quelque chose de perdu en lui.

— Je te le confirme, tu es magnifique Leïa.

Addictions.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant