Princesse à la tour d'ivoire

21 5 0
                                    

Printemps 2020, printemps enfermé. Maudite pandémie. Moi qui voulait finir mon lycée en paix, au calme, profiter de ma terminale. Me voilà enfermée chez moi face aux sourires virtuels de mes amis. Vie confinée et adolescente paumée. J’ai 18 ans, toutes mes dents et peur de l’enfermement. Maudis confinement.  
 
"Nous sommes tous plus ou moins prisonniers de nos peurs, de nos pulsions, de notre caractère, de nos habitudes, de nos émotions" 
Frédéric Lenoir 
 
Entre sanglots et rires elle s'était perdue. 
Son coeur avait flanché et la poussait au bord du précipice.  
Ses yeux noirs pétillants étaient devenus fades, comme deux abysses sans fond, son sourire était plus morne, des cernes venaient se dessiner sur son visage ayant perdu sa teinte rosée.  
Elle voguait entre soleil et pluie, chantait, écrivait, dansait pour lutter. Hurlait, pleurait, titubait sans issue possible. 
 
Elle oubliait le doux parfum du printemps qui se lève, 
La caresse du vent parcourant sa peau, 
La chaleur du soleil,  
Le son de la sonnerie résonnante.  
Elle ne différenciait plus la nuit du jour, tout se mélangeait et s'embrouillait. 
 
Elle voyait le monde dehors sans pouvoir en profiter, elle était là, les pieds sous son bureau regardant sa fenêtre ouverte avec mélancolie comme si plus jamais elle ne pourrait profiter de la beauté de ces paysages ensoleillés.  
Elle voyait les heures défiler, le temps filer entre ses doigts, les semaines durer des mois.  
 
Et même si rien n'allait, elle continuait de vivre. 
Oui, elle continue à se lever chaque matin, se coucher chaque soir et recommencer encore et encore. 
Elle monte le son de sa musique et oublie que sa vie a été mise en pause. 
Elle se dit que même si son conte au lycée ne finira jamais dignement, elle s'en relèvera. 
 
Elle est là,  
Princesse aux cheveux bouclés, 
Elle s'apprête chaque jour espérant pouvoir ressentir un peu de normalité, 
Elle travaille d'arrache-pied, 
Se tue à garder sa joie, à tenir debout, à garder sa patience. 
De ses petits yeux elle observe ses écrans, ses compagnons et verse une larme ou deux. 
Elle attend que le temps s'écoule, 
Lutte toujours un peu plus pour ne pas craquer, Ne pas tacher le livre de sang, Ne pas assombrir le temps. 
 
Princesse à la tour d'ivoire, 
Maudit quelque peu son histoire, 
Elle frôle le désespoir et broie du noir. 
Princesse à la tour d'argent, 
Rit depuis longtemps, 
Mais dans ces moments, elle se perd lentement. 
    

Au Fil De La RoseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant