Au Fil De La Rose

Tout réparer

Journal, mon cher compagnon. Je vais te décevoir… J’ai recommencé, j’ai refait couler le sang le long de mes jambes. Me revoilà à écrire tremblante de honte. Un jour je m’en sortirai, je réparerai toutes ces erreurs que j’ai commise, j’arrêterai de m’abimer comme ça. Je te promets que ça ira. J’ai confiance en ça, j’ai confiance en moi.  
 
"A scar does not form on the dying. A scar means I survived"  
Chris Cleave 
 
Elle tremble encore. 
Après tout ce temps à se battre, la douleur revient. 
Chaque fois, elle tremble plus. 
Chaque fois, elle pleure plus. 
Chaque fois, elle se déçoit plus  
Après tout ce temps à se battre, le sang revient. 
 
Elle reste là, les yeux dans le vide et son corps endolori. 
Elle reste là, se demandant quelle marche elle a raté pour en arriver là. 
 
Encore et toujours elle devra cacher ses nouvelles plaies. Encore et toujours elle devra ignorer ces cicatrices. 
 
Elle a le cœur en miette, la tête qui tourne, le corps qui lance et le sang qui coule. Elle oublie ce qui l'a menée là mais elle sait qu'elle ne peut revenir en arrière.  
 
Et soudain, elle a froid. 
Elle est seule, 
Seule dans son erreur. 
Et malgré tous les beaux discours elle reste effondrée. 
 
Est-elle condamnée à rechuter encore et toujours ?  
 
Son corps comme feuille de papier elle grave son histoire dans le marbre. 
Apprendra-t-elle à faire autrement ? 
Apprendra-t-elle à vivre en acceptant les coups bas du temps ? 
 
Chaque fois, elle se dit qu'elle se bat, Mais si ce n'était qu'une couverture ? Le combat n'est pas dans le sang, Le combat est dans la guérison. 
Et c'est cela qui la fait vivre, cet espoir de pouvoir un jour guérir. 
 
Après avoir ouvert une plaie, il faut apprendre à la panser, l'accepter, en faire une beauté, guérir, ressusciter à sa façon. 
Après avoir commis ce genre d'acte, il faut prendre les rênes, freiner et repartir à son rythme avant de pouvoir chevaucher cheveux au vent.  
C'est cela qui fait et fera encore et toujours sa force.  
Elle voit la souffrance au fond des yeux, elle voit l'espoir au fond des plaies, elle voit le bien dans le mal et la lumière dans le noir. 
Elle est cette étincelle au creux du froid de l'hiver, ce petit rayon de soleil qui rappelle que le printemps arrive bientôt.  
 
Alors, elle détache le chignon qui entachait la liberté de sa crinière et se met à rugir.  
Elle implore au soleil de se lever, à la nuit d'être de la douceur qu'elle lui connaît. 
Elle hurle au vent de souffler moins fort, au temps d'être plus clément.  
Elle prend le dessus sur ses émotions qui l'ont tant de fois faite basculer et triomphe, reine d'un sanctuaire bien fragile. 
 
Elle relève ses manches et se met au travail. 
D'abord les fondations, les piliers.  
Puis brique après brique, reconstruire le temple, les jardins, les fenêtres. 
Enfin, cimenter le tout avec un savant mélange d'espoir et d'amour. 
Observer le chemin parcouru, les étapes traversées, là où elle est arrivée.  Et tout réparer.  
 
Elle ne tremble plus. 
Après tout ce temps à se battre, la douleur s'en va. 
Chaque fois elle espère plus. 
Chaque fois elle aime plus. 
Chaque fois elle vit plus.  
Après tout ce temps à se battre, la lumière revient. 
 
Alors elle renaît une nouvelle fois, 
Elle oublie la honte d'autrefois, Pour ses cicatrices accepter, Et tout réparer.