Le Règne des Ombres

Chapitre 23 : Juste une...

Un mois, ça peut éventuellement être très, mais vraiment très long. Niall en fit l'expérience, au bord de la crise de nerf. Les trente jours qui suivirent l'apparition du démon réclamateur, ce dernier revint chaque jour, immanquablement. "Dis le moi" devenait sa phrase fétiche. Pas une heure ne passait sans qu'il ne le dise. Certes, lorsque Harry et Liam daignaient venir, au grand damne de l'ange, il se tenait plus tranquille. Mais il suffisait d'une unique seconde hors de leur vue pour que la fameuse réplique revienne. L'ange s'appliquait donc à rester non loin d'Harry et Louis, qui eux évitaient désormais les deux angelots comme la peste noire, craignant visiblement d'être aussi touchés par ce terrible fléau qu'ils prénommaient désormais dans le plus grand des secrets la "maladie de l'amour angélique". Ou MAA quand ils voulaient abréger cette appellation légèrement longue. Autant dire que ce mois ci fut des plus étranges. Niall était en train, à l'instant, de trier des dossiers concernant divers démons -il avait, il y a peu, reprit ses fonctions de gardien-. Cependant, c'était une tache des plus ardues désormais. Là où il voyait des "Dangereux, à abattre le plus tôt possible", il se disait "Vermine enquiquinante, sans doute pas trop méchante". Il savait, bien sûr, que les démons pouvaient être cruels. Immoraux. Sanguinaires. Mais essayer de classer ces dossiers avec l'un d'eux derrière soit, qui susurre toutes les cinq minutes un "Dis le" des plus doucereux, c'était du suicide.

L'ange souffla d'agacement à peine un quart d'heure plus tard, lorsque le diable lui vola une feuille des mains pour en examiner l'écriture. Il ne put s'empêcher de le détailler brièvement du regard. Si sa forme originelle lui faisait peur, dans la vie courante le métis était des plus normaux. Il avait eut le temps de réfléchir, essayant de passer outre le lavage de cerveau que lui administrait quotidiennement le démon. Sincèrement? Parfois il se surprenait à vouloir dire oui. Ça l'effrayait autant que ça l'attirait. Plus les jours passaient et plus il baissait la garde, cette dernière pourtant déjà bien entamée par les semaines en compagnie de ces créatures. Les barrières qu'il avait érigées se brisaient sous l'insistance du beau démon. Il esquissa malgré lui un fin sourire et rattrapa tant bien que mal la feuille qui commençait à sévèrement souffrir sous la poigne de Zayn.

-Touche pas ça, ça est important. Je dois les renvoyer demain, ces dossiers. Ordonna Niall.

-T'es payé pour dire des mensonges? Tu sais que c'est pas vrai. On est pas classifiés comme des bêtes. On fait même pas ça pour vous. Se vexa le brun.

-J'y peux rien, c'est le protocole à suivre Zayn... Soupire l'ange.

-C'est déshonorant. Dis le moi, en passant. Quémanda le démon.

-Je sais. Et non, je ne dirais rien. Marmonna le blond.

-Steplait? T'as quoi à perdre? Geignit la "victime" de l'histoire.

-La vie. Répondit Niall, du tac au tac.

Le silence se fit, pesant. L'ange ne se rendit même pas compte qu'il venait, pour la première fois, de clouer le bec d'un diable. En fait, il le regretta même en voyant Zayn se rembrunir, visiblement blessé. Le démon croisa les bras, pinçant les lèvres, et Niall mordit la sienne avec nervosité.

-Je... Désolé, c'est un réflexe. Tenta-t-il d'expliquer.

-Un réflexe?! Depuis le temps, je pensais que t'avais viré ces manies. Tu le comprendras quand, que j'oserais même pas abîmer une de tes plumes, abrutit d'ange? Siffla le diable courroucé.

-Mais t'es bizarre en même temps! C'est vrai, depuis quand les diables embrassent des anges?! T'es un malade! S'emporta le blondinet.

Un feulement rageur s'échappa des lèvres du démon, qui fusilla le pauvre ange du regard, les ailes claquant l'air. En quelques secondes, l'ambiance changea, elle se chargea de colère. Il cloua l'ange au mur, d'un geste vif et violent, le regard noir. Niall eut une impression de déjà vu. Pourquoi se faisait-il toujours planter contre ces pauvres murs? Il se débattit encore une fois comme un fauve histoire de ne rien changer, mais le bras du métis plaqué contre son torse l'empêcha de se dégager malgré ses vaines tentatives. Les ailes noires l'entouraient, mais il ne saurait dire si c'était telles une prison ou un cocon. La voix du diable s'éleva, profonde et assourdie de rage.