Chapitre 21

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Guérison (n.f.) : Disparition progressive des symptômes d'un mal physique ou émotionnel.

Alessio marche sur ses deux pieds, sans montrer aucun signe de douleur, ce qui est un immense progrès. Voilà un mois que nous avons passé chez Monique, à travailler dans son potager, à s'occuper de ses poules et à nettoyer la maison. Le pianiste en a profité pour se reposer autant moralement que physiquement, et aujourd'hui il retire enfin son attelle à la cheville. Ses pas sont hésitants, mal assurés, mais il peut s'appuyer sur sa cheville blessée sans problème. Il est enfin guéri. Et il a commencé à faire quelques exercices de rééducation pour sa main droite, sans pour autant retirer ses bandages de la main gauche. Cette guérison apporte une nouvelle vague d'espoir dans la maison, et tout me semble plus léger, plus facile. Comme si ce qui nous empêchait de faire quoi que ce soit était sa blessure.

- Alors, tu ne sens rien dans ta cheville ? demande Monique d'une voix chaleureuse.

- Non, c'est comme s'il n'y avait jamais rien eu !

Son visage est plus lumineux que je ne l'ai jamais vu, et il semble croquer la vie à pleine dents, dans ce petit domaine. Il vient donc nous aider à travailler dehors, même si ses mains abîmées l'empêchent de faire beaucoup, et nous avançons vraiment plus rapidement ce jour-là.

Le soir dans la cuisine, autour d'une boîte de petits gâteaux, le sujet sérieux revient.

- Monique est partie se coucher. Je déclare à la petite assemblée en m'asseyant avec eux.

- Il est temps de décider ce qu'on fait, râle Martin. J'adore cette maison, mais je n'en peux plus, j'ai l'impression d'être un lion en cage.

- Je dois vous expliquer ce qu'il s'est passé avec Pegasus. Intervient Alessio d'une voix basse, pleine de doutes et de peur.

Je prends doucement sa main droite sous la table pour lui donner du courage, et il se tourne vers moi pour puiser dans mes yeux le courage nécessaire pour continuer. Il m'a déjà raconté cette histoire, mais devoir tout expliquer à mes trois amis qu'il ne connaît que depuis très peu de temps a une toute autre dimension.

- C'est Gina, ma sœur jumelle, qui m'a livrée à Pegasus. Elle a été enlevée peu de temps après sa naissance par mon oncle, qui est le boss de l'organisation, puis a été élevée aux côtés de ma cousine pour obéir à n'importe quel ordre venant de lui ou de ma tante. On lui a appris à se battre, à tuer, à n'éprouver aucune pitié pour l'adversaire. Parce que Pegasus propose de nombreux services, en passant par l'enlèvement d'enfants, qui sont soit destinés à devenir des bons petits soldats comme ma sœur, soit proposés à une adoption plus ou moins légale. En plus de ça, il y a aussi des revenus secondaires avec la drogue, ou même les meurtres « sur commande ». Le QG est, selon moi, la maison de mon oncle près de Bordeaux. J'y suis déjà allé quand j'étais petit et on n'avait pas accès à toute la maison.

Un long silence lourd de sens suit cette affirmation, et je vois Alessio se balancer nerveusement sur sa chaise. J'interviens donc à mon tour :

- Ce qu'il nous faudrait, c'est seulement de récolter des preuves suffisantes pour pouvoir le dénoncer à la police. On n'a pas besoin d'essayer de le coincer nous-même, on n'y arriverait pas et ce serait bien trop dangereux.

- Tu as réellement changé, Nathanaël. Déclare Tom après un long silence, chaque mot semblant lui coûter bien plus que ce qu'il ne veut laisser paraître. Je suis désolé de t'avoir mal parlé, mais sache que je reste avec toi jusqu'au bout, pour t'aider.

- Merci Tom.

Je me lève, un grand sourire au lèvres, et nous finissons dans les bras de l'autre au milieu de la cuisine, sous les regards attendris de nos amis. Qu'il est bon de retrouver ceux qu'on aime.

Ton coeur au bout des doigtsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant