Chambre 12

Chapitre XX

Rééducations

Jour 19 - Mercredi

Bryan

Toujours à l'hôpital, j'observe les jours puis les semaines passer. Presque trois semaines se sont écoulées depuis mon réveil, et ça a été très dur.

J'ai fait beaucoup de rééducation, et ma jambe, qui était plâtrée, m'a causé pas mal de problèmes, ce qui a ralenti ma sortie d'ici.

Mais j'ai fait d'immenses progrès dont je suis très fier ; j'arrive à marcher seul, et je peux enfin manger normalement. J'ai presque retrouvé une vie normale, à peu de chose près : ma mémoire n'est toujours pas revenue. Je commence doucement à accepter mon sort et à m'y faire.

Ma famille est venue me voir chaque jour, et m'a soutenu pour m'aider à progresser encore plus. Et dans deux jours, je pourrai enfin sortir. Je suis surexcité et je n'ai qu'une hâte, voir enfin la vie d'un autre regard, et plus depuis mon lit d'hôpital. Je recommence à nouer des liens avec eux, et même si je suis un adulte, parfois je me sens comme un enfant à qui il faut tout apprendre.

Nos amis m'ont fait une surprise et ont débarqué pendant ma période de rééducation. J'ai pu ainsi faire la connaissance de Ben, Loukas, Claire, Mateo et Sarah. Ma bande d'amis depuis le lycée, d'après eux. Des fêtes mémorables, des excursions, des souvenirs qu'ils m'ont racontés et qui m'ont redonné le sourire. Ils sont tous très différents, autant dans leurs styles vestimentaires, dans leurs manières de parler, de penser. Mais bizarrement, ils se complètent tous très bien, et m'ont fait beaucoup rire. Au moins, ils ne m'ont pas oublié, contrairement à moi.

Quant à Ambre, elle aussi est venue. Tout le temps. Elle a participé à mon rétablissement, elle m'a réconforté quand je n'y croyais plus, elle ne m'a jamais lâché, pas même une seconde. Et son aide m'a été très précieuse.

Il y a quelques jours, en vue de ma sortie prochaine, elle est venue me demander ce que je comptais faire : retourner vivre chez mes parents, me trouver un autre foyer, ou revenir à l'appartement avec elle. Elle était vraiment stressée mais je savais que quelle que soit ma réponse, elle serait heureuse pour moi. Je lui ai dit que j'allais y réfléchir.

Et comme ces derniers jours ont été assez calmes, j'ai eu le temps de me pencher sur la question. Au début, je ne savais pas vraiment ce que je voulais. Mais plus je passais de temps avec elle, plus je me rendais compte à quel point elle peut être merveilleuse. Elle est incroyable : à la fois pleine de force et de fragilité, c'est cependant une vraie tête de mule. Elle est drôle, prévenante, prudente. Et elle est surtout très belle. J'ai l'impression qu'elle rayonne un peu plus ces derniers temps. Mais, je ne peux m'empêcher de remarquer qu'elle est vraiment très mince. Est-ce que je tolérais cela quand nous étions ensemble ? On dirait presque qu'elle n'a pas mangé depuis plusieurs semaines, et même si elle m'assure qu'elle va bien, qu'elle se nourrit, j'ai du mal à être totalement serein.

C'est ainsi que j'ai compris que je ressentais un petit quelque chose pour elle : je m'inquiétais pour sa santé ; mais pas comme on s'inquiète pour un ami, non. Plutôt comme si sa santé faisait la mienne. C'est très étrange, mais c'est un peu ce que je ressens. Je voulais la protéger, mais pas comme un grand frère. Je voulais prendre le temps de la découvrir à nouveau, sous un nouveau jour, et voir jusqu'où la vie nous mène.

J'ai donc décidé de retourner à l'appartement avec elle, pour son plus grand bonheur. Elle a demandé à me prendre dans ses bras, et quand j'ai senti son corps contre le mien, c'est comme si elle y avait toujours eu sa place, même si le contact était nouveau pour moi. Comme une sorte d'évidence pourtant toute nouvelle. Je sentais que je voulais prendre un nouveau départ, avec elle, et tout reconstruire. Je ne lui ai pas avoué ce que je ressentais, et elle n'a jamais parlé de ses sentiments à elle. Mais je pense qu'au fond, je sais qu'il y a quelque chose, en tout cas, de mon côté. Une étincelle. Qui pourrait devenir par la suite un feu de joie. Enfin je l'espère.