Un jour dans notre vie

Chapitre 4

Je me glaçais.

Quelle chance y avait-il pour que ce soit le père d'Heaven que j'ai poignardé ? Je ne pouvais rien laisser transparaître maintenant, je réfléchirais plus tard. Quel con ! Pétrifié, j'eus tout de même une idée.

-Ils cherchent un serveur là où je bosse. Tu pourrais te présenter là-bas ? Je t'aiderais.

Son visage s'illumina quand il se tourna vers moi et cela me fit un petit pincement au cœur.

-Qu'est-ce que je ferais sans toi ! Si je viens demain, ça va ?

-Oui bien sûr, et puis il n'y a aucune raison qu'il ne te prenne pas.

Un petit silence s'installa avant qu'Heaven me demande.

-Tu habites où ?

J'étais décontenancé par sa spontanéité.

-Dans un petit loft au sud du quartier.

-Je te raccompagne ?

Je réfléchis un moment. C'est vrai qu'il se faisait tard. Mais je ne pouvais pas emmener Heaven chez moi. J'avais un bel appart, mais il verrait sûrement que je deal à cause des marchandises que je laissais parfois traîner. Et puis, je déteste que les gens s'immiscent dans ma vie privée.

-Pourquoi pas l'inverse ? -dis-je simplement

-D'accord, ça me va. J'habite à 10 minutes d'ici.

On marcha en discutant de tout et de rien. Un profond mal-être m'avait envahi. J'avais peut-être tué le père d'une des seules personnes que j'appréciais dans ce monde.

-Heaven...

Il leva les yeux vers moi. On était à présent devant chez lui. Que devais-je lui dire ? J'ai poignardé ton père ? Tu me plais ? Bonne soirée ?

-Tu veux rentrer ?

-Euh, non, merci, une prochaine fois !

-Ca va pas ?

Je me calmais et lui souris.

-Désolé, je suis un peu..

-Nerveux ?

Ce mec me faisait flipper. J'étais en effet nerveux.

-Ouais. Bon, on se voit sûrement demain. Bonne nuit !

-A toi aussi.

Je vis l'entrain d'Heaven retomber lorsqu'il passa sa porte. Celle-ci fermée, je rentrais chez moi.

J'arrivais devant mon petit loft. Evann m'attendait devant, nonchalamment appuyé contre la porte. Pour arriver devant chez moi, il fallait monter quelques escaliers.

-Evann.

Celui-ci tourna la tête vers moi et souris :

-T'as quelque-chose pour moi ? Je suis à plat. J'suis passé hier mais t'étais pas là.

-Ouais, j'étais au bar désolé. Rentre, j'ai toujours.

On entra dans mon appart et je descendis à la cave, l'endroit où je rangeai toutes mes sortes de cargaisons. Je pris un sachet de poudre blanche et je remontais. Je le tendis à Evann qui était sur le canapé et il me tendit un billet de 100 que je saisis.

-Merci mec.

-Tu veux une bière ?

-Volontiers.

Je nous ouvris chacun une bière et nous buvâmes à grandes gorgées. Profitant certainement du moment de silence dans notre conversation, Evann se pencha vers moi et m'embrassa. J'hésitais à répondre à son baiser. Même s'il ne se passait rien entre Heaven et moi, je ne pouvais ignorer mes sentiments naissants à son égard. Evann était mon plan cul de temps à autre, cela nous profitait à tous les deux et il n'y avait ni sentiments, ni engagement. Je me reculais doucement.

-Je sais pas...

Evann s'esclaffa :

-Ne me dit pas que tu es amoureux ?

Je ne répondis pas. Evann et moi avions toujours eu le même avis au sujet de l'amour. Ca craint, ça te détruit, tu finis par t'ennuyer. Nous avions toujours été de fervents adeptes du sexe pur. Il m'attira vers lui et me souleva le menton d'une main.

-Etranger, sors de ce corps et rend-moi Karma !

On s'esclaffa et Evann prit mon bras en approchant dangereusement une seringue.

-Qu'est-ce que...

-On s'amuse bien en général toi et moi. Je vais t'aider à te rappeler...

Il planta doucement la seringue dans ma veine et, bien que ça piqua un peu, je ne laissais rien paraître. Nous avions l'habitude de nous défoncer à l'héroïne avant de s'amuser. Dans mon cœur, la situation avait changé mais Evann ne le prenait pas au sérieux. C'est vrai qu'à chaque fois que je lui avouais que j'avais un coup de foudre, il me riait au nez, on couchait ensemble, et je retrouvais mon cœur de pierre. Bientôt, je n'arrivais plus à penser clairement. Je sentais les mains d'Evann me déshabiller, mais je ne réagis pas. Heaven et toutes mes préoccupations étaient loin, je me laissais aller sans plus me poser de questions.