Chapitre 2

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H A R R Y


Ce n'est pas encore assez.

Ce n'est jamais assez.

Jamais assez et pourtant ça devient toujours trop.

Paradoxe de mon existence et de mon cerveau que je n'arriverai jamais à comprendre moi-même, je crois.

Je vide le reste du placard, arrache le paquet d'une madeleine alors que j'ai encore du chocolat qui m'écoeure plein la bouche.

Mon estomac crie encore encore encore, crie pour combler le vide qui m'envahit depuis bien trop longtemps. Je préférerais qu'on m'enfonce mille couteaux dans le coeur, qu'on me torture, mais qu'on me fasse ressentir quelque chose.

J'enfonce la madeleine entière dans ma bouche, j'ai l'impression que si je ne le fais pas, on me privera d'air. C'est comme si quelqu'un contrôlait mes mouvements, je ne compte plus ce que je mange parce que de toute façon je n'y prends aucun plaisir. J'ai juste besoin de manger

manger

manger

manger

Après plusieurs minutes passées assis sur le sol froid de ma cuisine, avec tous les papiers et les paquets vides par terre autour de moi, mon estomac semble satisfait. Sauf que maintenant la culpabilité vient me ronger et j'ai juste besoin de vomir

vomir

vomir

vomir

Je me dirige vers les toilettes, machinalement, comme un robot. Je ne veux pas le faire, je veux que tout ça s'arrête enfin, je ne sais pas pourquoi je continue de me goinfrer comme un porc qu'on va envoyer à l'abattoir, pourquoi je continue de me faire du mal, mais ça recommence sans cesse sans que je ne puisse rien contrôler.

Alors j'arrive devant la cuvette, je m'accroupis devant. Mes doigts s'enfoncent dans ma gorge. Mes doigts rougis, mes doigts fatigués, mes doigts abîmés.

Harry, tu es faible. Harry, je te déteste.

Je vomis en moins de quelques secondes, mon corps y est habitué, mon corps sait, mon coeur saigne. Mon oesophage, lui, brûle, crie, appelle à l'aide sans qu'aucun son ne puisse sortir.

Le goût acide du vomi remplit ma bouche, me répugne et me soulage à la fois. Je crois qu'il y en a un filet qui dégouline sur mon menton.

Je laisse mes fesses tomber sur le carrelage, attrape du papier toilette pour m'essuyer la bouche, puis repose ma tête contre le mur en fermant les yeux. Combien de fois cette scène se répètera ? Je n'en peux plus, je voudrais que tout s'arrête.

Mon coeur tambourine contre les parois de mon crâne, la sueur perle sur mon front. J'ai encore des nausées.

Je me relève ensuite, épuisé, je veux aller m'allonger sur mon lit, sauf que je me regarde dans le miroir accroché au dessus du lavabo et 

j'ai envie de crier

crier

crier

crier

face à mon reflet, ce reflet dégoutant répugnant que je ne peux plus supporter je veux qu'il s'évapore disparaisse je crois que je ne l'aimerai jamais

Harry tu es trop gros trop maigre et tu manges trop et tu manges pas assez

Et bordel

J'ai l'air tellement malade, je fais peur à voir, je me demande qui voudrait de moi alors que moi-même je ne veux pas de moi, et j'aimerais tellement frapper dans ce miroir puis détruire ma chair avec le verre

Our Eternity - Larry StylinsonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant