Prologue (3/3)

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L'aube se leva sur le château d'Oriem, révélatrice de l'attaque meurtrière. Les combats avaient cessé bien avant le début du jour. Les dizaines de corps mutilés qui jonchaient le sol maculé de sang avaient été emportés par les domestiques encore en vie.

Jarle arpentait les couloirs de la forteresse, ses soldats formant un cercle protecteur autour de lui. Il était courroucé. Le plan s'était couronné de succès, et il gouvernerait Irlondor dès que l'intronisation aurait lieu. Son frère n'était plus qu'un corps en attente du rituel funéraire, mais il avait fallu que Miana lui échappe ! Il devait la retrouver et ce, au plus vite. Avec l'armée dont il disposait à présent, sa fuite ne durerait pas, il en était persuadé. Il se tourna vers Talyon.

— Qu'est-il advenu de nos alliés ?

— L'attaque aux abords d'Oriem a échoué, Sire. Les mages ont été décimés par les troupes de garde.

— Ce n'est pas dénué d'avantage. Les rumeurs pullulent dans les bas-fonds, et il en sera de même pour les nouvelles d'une offensive ennemie. Elles ne tarderont pas à atteindre le reste de la capitale. Les habitants tourneront leur haine vers tous les mages, sans exception, et leur culpabilité dans la mort de Martian sera assurée.

— Et ils soutiendront forcément votre accès au trône.

— Il y a cependant un contretemps. Martian a permis à sa fille de s'échapper. Rassemble tes hommes. Je veux que vous me retrouviez au plus vite la princesse Miana. Personne ne doit savoir qu'elle est vivante. Fouillez les berges de l'Abuntia, trouvez-la et exécutez-la.

— Bien, Sire.

— Trouvez également Pierrick, le conseiller de mon frère. Il est parvenu à s'enfuir pendant la nuit et va probablement tenter de retrouver les mages. Réduisez-le au silence.

Talyon acquiesça et prit congé. Jarle se dirigea ensuite vers les bains, puis dans ses appartements, où des servantes le vêtirent en vue de la cérémonie mortuaire.

À la tombée du jour, une foule composée des nobles et seigneurs des environs s'était massée dans la cour du château. En son centre, sur une esplanade, un bûcher funéraire avait été érigé. Le corps de Martian reposait, toute trace de sang enlevée. Son visage était départi de toute souffrance, apaisé.

Les conversations se turent quand Jarle fit son entrée. Ses vêtements totalement noirs, marque du deuil, faisaient ressortir la pâleur de son visage. Ses yeux verts balayèrent la foule et, d'une voix tremblante, il prit la parole :

— Aujourd'hui, l'heure est à la peine. Mon cœur est serré, comprimé par un vide colossal. Comme vous l'avez appris, mon frère Martian, notre roi, a été lâchement assassiné cette nuit, ainsi que notre princesse Miana.

Il se tut un instant, l'air anéanti, avant de reprendre :

— Cet acte sournois n'a été commis que dans le but de s'emparer du trône. L'attaque a été fulgurante et planifiée. Quand, dans le château, des mages tuaient sans vergogne, d'autres ont lancé une offensive aux abords de la capitale. Ils ont en partie réussi. Mon frère n'est plus. Sa fille Miana a péri brûlée vive dans l'incendie qu'ils ont déclenché. Son corps n'a pas pu être sorti des décombres à l'heure où je vous parle.

Des murmures horrifiés naquirent. Les traditions voulaient que les dépouilles soient inhumées après la mort, mais si un être périssait par les flammes, on disait que son âme ne serait jamais libérée. Qu'elle errerait à jamais dans le monde des vivants. Ce châtiment, bien pire que la mort, eut tôt fait de créer une flambée de haine envers les coupables.

— Pleurons Martian et Miana d'Irlondor. Ils étaient ma famille, mais aussi la vôtre.

Jarle s'approcha du corps de Martian et saisit une torche enflammée qui lui fut tendue. Il porta la flamme au bois qui s'embrasa avant de prononcer d'une voix claire :

— Puisse son âme s'élever et trouver un nouveau berceau.

Ses yeux contemplèrent les flammes et la fumée qui s'élevait haut dans le ciel, alors que les corps se consumaient. Dans son esprit s'imposa un souvenir, qu'il ne parvint pas à éloigner. Il se vit, aux côtés de Martian, face au corps de leur père. Les deux adolescents tenaient la torche enflammée qui ferait disparaître Edouard à jamais et naître un nouveau monarque. Les différends entre les deux frères semblaient effacés lors du deuil, mais n'étaient qu'enfouis. Le lendemain, le testament d'Edouard désignait Martian roi.

Jarle secoua la tête pour reprendre ses esprits. Martian appartenait au passé, et Miana le rejoindrait sous peu. Elle ne pourrait échapper à son armée. Sa voix ne cilla pas quand il reprit la parole pour entamer la plus importante partie de son discours.

— Pour honorer la mémoire de feu notre roi, je décrète dix jours de deuil dans l'ensemble du royaume. Durant cette période, entouré des fidèles conseillers à la couronne, nous songerons à l'après, à la riposte. Sachez que cette paix précaire, qui avait été instaurée avec bien des difficultés, vacille et menace de s'effondrer. Les assassins ont signé leur arrêt de mort. La Timor, notre armée, aura pour principale mission de traquer ces mages et de leur faire payer leurs crimes, commis sans une once de compassion. L'heure n'est pas à la miséricorde, leurs péchés doivent être expiés. Nous serons intransigeants.

Des exclamations vindicatives explosèrent dans la foule et gagnèrent peu à peu en intensité.

Jarle conserva un masque impassible, mais il jubilait. Peu après aurait lieu l'intronisation. Il savait que certains barons seraient réfractaires, mais il s'assurerait que les premières Purges de mages soient instaurées. Comme prévu.

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N'hésitez pas si vous avez des remarques à faire sur ce chapitre ! ;)

Merci d'avoir lu !

L'Héritage d'IrlondorOù les histoires vivent. Découvrez maintenant