Evadée - Tome 2

Chapitre 19

J'ouvre la porte et entre dans la pièce. J'entends les trois respirations saccadées. J'allume la lumière. Les respirations s'arrêtent, puis elles reprennent entremêlées de cris et d'exclamations.

Je laisse le silence s'imposer. Il ne dure pas très longtemps, ma mère l'interrompt.

- Ma chérie, tu es vivante !

Elle semble pleurer de joie. Étrange. Je ne dis rien et les laisse subir ce silence. Mon père semble distant de la scène qui se déroule sous ses yeux, comme s'il vivait un rêve. Et non père, tout ceci est bien réelle. Bien plus que tu ne pourras jamais le comprendre. Nick me regarde avec curiosité, comme s'il me voyait pour la première fois, pire comme s'il voyait un animal exotique pour la première fois. Il chuchote alors :

- Éva, que t'ont-ils fait ?

Je ne dis rien et continue de les observer. Je suis soudain prise d'une immense lassitude, je ne sais pas pourquoi je fais ça, je voudrais juste que ça s'arrête, que je puisse juste être heureuse avec Aaron.

Je les regarde tour à tour et prend place sur une chaise.

- Vous savez pourquoi on est là ?

Ils restent d'abord tous les trois silencieux. Puis mon père prend la parole.

- Est-ce que tout va bien, Éva ? Tu sembles à bout de force. Tu es toute seule ici ? Pourquoi est-ce que tu es couverte de bleus ? On te bat ?

Je le regarde et secoue négativement la tête, il essaie vraiment de faire croire qu'il ne sait pas d'où viennent mes bleus ?

- Sérieusement ? C'est tout ce que tu as trouvé comme stratégie ? Me faire croire que tu non vous ! n'êtes pas responsable de mon état.

J'avais commencé sur un ton posé, mais maintenant je hurle.

- Vous êtes la source de mon malheur, de ma douleur. Si je suis comme ça c'est à cause de vous.

Ma mère commence à trembler.

- Toute ma vie vous l'avez bâtie sur un mensonge et quand j'ai voulu savoir pourquoi, connaître la vérité ! Je mérite de la connaître. Vous n'avez séquestré.

Mon père me regarde bizarrement, il bredouille :

- Quoi ? De quoi est-ce que tu parles ?

Je suis en colère, non, je suis folle de rage. Je hais ces gens, mes parents, mais Nick aussi. Il me regarde avec pitié ! Il ose me regarder avec pitié ?! Lui !? Mais je l'emmerde. Il ne vaut pas mieux que moi. Sa vie est tout autant basée sur un mensonge que la mienne. Il me dégoûte. Je me dégoûte. Je reporte mon attention sur mon père.

Je repense à tous les moments qu'on a passé ensemble. Le jour où il m'a appris à faire du vélo, le jour où je suis tombée pour la première fois. Chaque instant n'était qu'un mensonge. Comme si toute ma vie était fondée sur une montagne de sable et que tout s'effondrait. Cette fois, je hurle.

- De quoi est-ce que je parle ?! Tu te fous de ma gueule ? De quoi est-ce que je parle ! Du fait que tu m'aies séquestrée et torturée, alors que je voulais juste la vérité ! Comment as-tu, que dis-je, avez-vous pu (je me tourne vers ma mère) me faire ça ? Alors que j'étais soi-disant votre fille. En plus... (je reprends mon souffle), vous m'avez laissé coucher avec mon frère ! Bordel de merde ! Mon frère !

Je me tais. Personne n'ose prendre la parole. Je suis vidée de toute énergie. Je les déteste tellement. Ils sont la raison de mon malheur. Ma mère ouvre la bouche.

- Éva, (elle me fixe, comme pour être sûre d'avoir capté mon attention) je n'ai jamais posé la main sur toi. Et jamais, je ne le ferai.

- Ah oui ? Et ça c'est quoi ?