Chapitre 13

34 2 0
                                    


Le reste du trajet est interminable. Je me sens si nulle d'avoir échoué. Mon père avait mis tant d'espoir en moi et je l'ai déçu. Je sais qu'il va me renier. J'ai si honte.

Honte d'avoir déçu mon père mais aussi honteuse d'avoir voulu kidnapper mes parents. Mais qu'est-ce qui m'est passé par la tête ? Je perds complètement les pédales !

Au lieu de me ramener au manoir de mon père, Aaron part dans la direction opposée. Je ne sais pas si je dois être soulagée ou pas. Je lui suis reconnaissante de me donner un peu de temps avant de revoir Adam, mais j'ai soudain peur de me retrouver seule avec Aaron. Il m'a quand même fait du mal quand j'étais au plus faible de ma forme.

- Est-ce que tu peux me déposer ?

Aaron ne répond rien.

- Aaron, s'il te plaît, arrête cette voiture et pose-moi !!

Il ne dit toujours rien. Je tente une autre tactique.

- J'ai besoin de vomir.

- Il y a un sac à l'arrière.

Je tente ma dernière chance et ouvre la porte. Aaron, au lieu de freiner comme je l'espérais, accélère. J'ai peur pour ma vie. Il va me tuer et me faire disparaître sur ordre de mon père, car je l'ai déshonoré.

Je saute.

Mais Aaron me retient et mon visage se retrouve à quelques centimètres du sol qui défile beaucoup trop vite pour mes yeux. Il me redresse brusquement et sans quitter la route des yeux, ferme la porte puis la verrouille. Il me regarde un instant et me flanque la gifle de ma vie. J'ai l'impression de perdre ma mâchoire.

- Tu veux jouer ? On va jouer !

Il arrête brusquement la voiture sur le bas-côté de la route dans un crissement de pneu, passe devant le véhicule et ouvre la porte. Il me prend violemment.

- Lâche-moi, tu me fais mal ! Crié-je

- Ce n'est que le début chérie, me susurre-t-il.

Il me serre les poignets et je grimace. Il m'attache les mains dans le dos avec une colsonne.

- Tu me fais mal, Aaron !

Il ne répond rien et me jette sur la banquette arrière de la voiture, il m'attache mes chevilles ensemble et referme la porte. Il s'assoit devant le volant et démarre.

- Aaron, détache-moi, s'il te plaît, Aaron !

Il ne répond rien et je continue de lui parler il finit par dire :

- Ferme ta gueule ou je te la scotch.

Après cela je n'ose plus rien dire. J'essaie de me redresser, mais Aaron me regarde si mal que j'arrête de bouger. Depuis où je suis je ne vois que le ciel et je n'ai donc aucun indice d'où m'emmène mon bourreau. Il commence à pleuvoir et je crois que je commence à pleurer plus ou moins au même moment.

Finalement nous arrivons. Où ? Je ne sais pas. Ma vue est brouillée par mes larmes et je crois que je ne préfère pas savoir. Aaron m'assomme.

Je me réveille dans une pièce vide, il n'y a que deux objets, la chaise sur laquelle je suis assise et celle sur laquelle est assis Aaron. Il me regarde. Je reprends petit à petit mes esprits. Je suis toujours attachée aux mains et aux pieds.

Mes muscles me font terriblement mal. Aaron continue de me regarder sans rien dire. Je fonds en larmes.

- Je suis désolée mon amour, pardonne- moi. Je ne voulais pas. Je sais que je t'ai déçu et que j'ai aussi déçu père, je ne voulais pas...

Il me regarde et ne dit toujours rien. Je suis de plus en plus mal à l'aise. Je continue de me justifier.

- J'ai paniqué, j'ai eu peur de rater ou pire de faire une erreur. Je ne sais plus ce que je veux.

Je suis complètement perdue. Je ne sais plus ce que je veux, ce que je ne veux pas. Aaron est toujours silencieux et je suis ravagée par des vagues d'émotions contradictoires. J'ai envie de l'embrasser, de le frapper, de mourir, de lui hurler dessus à quel point je le hais, à quel point je l'aime.

- Tu me dégoûtes.

C'est les premiers mots qu'il prononce depuis que nous sommes dans cette pièce. Nous sommes là depuis une éternité. Je relève la tête lentement et croise son regard. Un frisson me parcourt. Il y a tellement de haine dans ses yeux que je prends peur. Je veux quitter ce lieu et que tout s'arrête. Que la douleur s'arrête, que ma tristesse s'arrête que j'arrête de me battre sans cesse contre la vie. Je veux que tout s'arrête, même la vie.

- Qu'est-ce qui t'a fait douter ?

Cette fois-ci je lis de la curiosité dans ses yeux. Il veut vraiment savoir pourquoi est-ce que je n'ai pas eu les couilles de kidnapper mes parents. Car oui, c'est comme ça qu'il le perçoit. Il pense que je n'ai pas eu les couilles, ou le courage de le faire. À aucun moment, il ne réalise que c'est l'absurde de la situation qui m'en a empêché. N'a-t-il aucune éthique, aucune morale ? Il attend toujours ma réponse.

- Je ne sais pas... J'ai paniqué et je n'ai pas réussi à me convaincre de le faire.

Il me regarde sans comprendre.

- Je suis complètement perdue. Je ne sais pas quoi faire. Je ne sais plus ce que je veux, ce que je ne veux pas. Ce qui est bien, ce qui est mal. Ce que je devrais faire, ce que je ne devrais pas faire.

Je le regarde intensément.

- Aaron, j'ai besoin de toi, j'ai besoin que tu me rassures et que tu dissipes mes doutes. Que tu m'assures que tout va bien se passer et que tout cela va finir par s'arrêter, j'en peux plus. Je suis tellement à bout.

Un instant il semble touché, presque attendri. Puis son visage se ferme, se durcit et toute émotion quitte son visage.

- Tu veux de mon aide, chérie ?

Je hoche la tête.

- Oui, j'ai besoin que tu me donnes la force de réussir.

- Bien commençons alors.

- Merci, dis-je dans un souffle.

- On va commencer par tes doutes. Comment est-ce que tu peux douter que ce que tu fais n'est pas la bonne chose. C'est évident. Tes parents t'ont fait du mal et ils doivent souffrir pour ça. Ce n'est que la juste récompense de leur acte. De plus, il faut que tu extériorises toute la haine que tu as accumulé.

- Mes parents n'ont fait que m'aimer, ils ne m'ont jamais voulu de mal.

- Ah bon ? Et pourquoi t'ont-ils menti toute ta vie ? Tu es bien assez grande et mature pour savoir que ce ne sont pas tes vrais parents. Ils ont préféré ne rien te dire pour pouvoir te garder rien que pour eux, tels les égoïstes qu'ils sont.

- Ils n'ont juste jamais trouvé le bon moment pour me l'annoncer.

- Ils ont bâti ta vie sur un mensonge ! hurle-t-il, comment peux-tu ne pas leur en vouloir ? Ce sont des monstres sans cœur qui t'ont arraché à ta vraie famille !

- Ils ne savaient pas, c'est père qui a tout organisé.

- Éva, ce que tu peux être stupide, ils ne savaient pas ? Tu leur es tombée dans les bras et ils ne se sont pas posés de question ? Arrête de te voiler la face. Ils savaient.

Je ne trouve rien à répondre.

- Ils savaient et ils n'ont rien dit. Ils n'ont rien dit non plus quand tu as rencontré Nick, quand tu es tombée amoureuse de lui ! Ils t'ont laissé commettre l'inceste !

Il est à bout de souffle et moi, mon âme est juste vide. Ils savaient depuis tout ce temps et ils ont gardé ce secret égoïstement. Ils ont délibérément créé ma vie sur un mensonge sans aucun scrupule pour pouvoir me détruire au moment où je serai le plus faible.

Evadée - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant