Chapitre 3: Champignons, peaux de bananes et autres carapaces

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"And I'm not tryna ruin your happiness,
But, darling, don't you know that I'm the only one for you?
And I'm not tryna ruin your happiness, baby,
But, darling, don't you know that I'm the only one"

- Bon, Sarah. Qu'est-ce qui ne va pas ? me questionne Alexandre.

- Pourquoi ça n'irait pas ? je réplique sur la défensive.

- Peut-être parce que tu enchaînes les chansons de rupture ?

Suite à la rencontre traumatisante de ce matin, je suis rentrée en vitesse chez moi laissant simplement un mot doux sur l'oreiller de Lydie. Elle a l'habitude que je parte avant même qu'elle ne se réveille et ce depuis que je me suis mise à courir en seconde. Après un footing et un repas avalé vite fait j'ai filé chez Alex pour notre après-midi musique. C'est quelque chose que l'on fait souvent. En fait, on s'est rencontrés  il y a cinq ans dans la salle de musique de notre collège. Il venait d'arriver à Nantes avec sa famille, les Kostas. A cette époque je squattais tout le temps la salle de musique pour faire de la guitare pendant que Lydie était en cours de latin ou aux réunions des différents clubs qu'elle présidait. C'est ainsi qu'un beau jour je suis rentrée dans mon repère pour découvrir que la seule guitare de la salle était déjà utilisée par un garçon de mon âge. Sociable que j'étais alors, je suis restée le regarder les yeux grands ouverts, telle une biche égarée au milieu d'une quatre-voies, avant de faire demi-tour. Mais avant que je ne puisse sortir, ce gentleman m'a interpellé pour me demander si je voulais la guitare. Et voilà, cinq ans plus tard on se dispute toujours pour savoir qui de nous deux est le meilleur à la guitare. Entendez-moi bien, il est plus qu'évident qu'Alex est un musicien hors pair, mais je ne reconnaîtrai jamais sa supériorité.

Je finis par reposer la guitare folk d'Alex sur son lit avant de lui répondre :

- Une femme n'a-t-elle point le droit d'aimer les chansons mélancoliques ?

- Si mais toi tu n'es pas une femme mais une rockeuse.

- Pas faux, tu en es où avec tes parents pour le piano ? je change de sujet, tout en me levant de son lit.

- C'est vraiment pas gagné. J'ai bien essayé de leur expliquer que s'ils espéraient que je devienne une rockstar capable de leur payer une bonne retraite il fallait qu'ils investissent maintenant. Mais ma mère m'a remballé à coup de « Alexandros Kostas junior ! Arrête d'essayer de nous escroquer ! », il réfléchit un instant. Par contre, mon père était ravi que je travaille ma fibre commerciale, il s'est encore remis à me reparler d'héritage familial et de comment sa famille avait gravi les échelons en Grèce avant de finir par s'installer en France.

- Et alors, il est de ton côté ?

- Non. Il m'a juste redemandé d'envisager une école de commerce plutôt qu'une école de musique...

- Ah, et donc tu as vu des écoles qui te plairaient ?

- Arrête ça tout de suite Sarah ! proteste Alex me faisant sursauter. Tu crois que tu peux me faire changer de sujet aussi facilement?

Mon regard se promène partout sauf dans la direction d'Alex. Son bureau devient tout à coup très intéressant. Des partitions accumulées au milieu de quelques cahiers de cours, une boite de jeu de Xbox vide. Peut-être que si je fixe cette boite avec sa reliure vert citron de toutes mes forces je réussirai à me téléporter dans l'univers de Final Fantasy ? Non ? Tant pis. Cette technique n'a jamais marché, par conséquent j'ai dû apprendre à répondre aux gens même lorsque cela me rend très mal à l'aise. Et aujourd'hui je suis presque devenue sociable. En tout cas je suis capable de tenir une conversation avec quelqu'un d'autre que Lydie, Alex, mes parents, ou mon chat.

Sacrés amis, sacré pari !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant