Chapitre 4
Je sens quelque chose ... quelque chose qui fait un drôle de bruit et qui frappe ma poitrine. C'est une chose, il me semble, que j'ai l'habitude d'entendre même s'il arrive aux gens de douter de son existence. Il bat donc dans ma poitrine. J'ai échoué. Encore. J'ai échoué à protéger ma famille et maintenant j'échoue à me tuer. Une boule se forme dans ma gorge. Il me faut savoir où je suis.
Je tente d'ouvrir les yeux. La forte lumière se reflétant sur les murs clairs me brûle la rétine et mes oreilles sifflent légèrement. Il me faut un peu de temps pour m'acclimater à la luminosité et pour que mes acouphènes disparaissent mais je peux rapidement reconnaître une chambre d'hôpital. Quelque chose me gêne dans mon œil droit mais je préfère ne pas y prêter attention. À ma droite, il y a la fenêtre qui me fait si mal à la tête. Aucun autre lit, je suis dans une chambre seul. À ma gauche, il y a la porte et, à côté, endormi sur une chaise, mon frère. Il a le teint pâle et des cernes immenses, ses cheveux sont emmêlés. Le Dr Watson l'a laissé seul, il doit travailler puisque mon frère en est incapable. À cette idée, mon cœur se serre. Je lui ai fait tant de mal avec cette histoire.
J'aurais vraiment préféré mourir pour de bon, n'avoir à assumer aucune conséquence et imaginer son mal se passer rapidement. Après tout, un deuil ne dure pas toute une vie, il serait vite passé à autre chose, peut-être même qu'il se serait rapproché du Dr Watson qu'il apprécie sûrement plus que nécessaire. Quoique je ne suis pas un expert en sentiments. Peut-être que ce n'est que son meilleur ami, une personne qui le suit partout, dans toutes ses aventures et qui les relate, qui lui donne une image respectable même si elle n'est pas toujours en accord avec la réalité. Une personne pour qui il serait prêt à tuer et qui serait prête à tuer pour lui. Une personne pour qui il serait près à donner sa vie et qui serait prête à donner sa vie pour lui. Peut-être le considère-t-il comme un frère. Un frère qui joue avec lui lorsqu'il le lui demande et qui, lorsqu'il cède à ses faiblesses, est là pour le réconforter et non lui faire des remontrances. Un frère normal, pas comme moi.
Il bouge, se frotte les yeux et baille en s'étirant. La première chose qu'il remarque lorsqu'il a fini est que je suis éveillé. Il s'approche et me regarde. Il a l'air de vouloir dire quelque chose mais il ne sait pas par quoi commencer. Il bégaye, cela ne lui arrive pas souvent.
- Mycroft, je ... enfin ... tu ... Je me suis inquiété pour toi et ... j'ai eu peur. P-pourquoi tu as fait ça ?
Je détourne le regard. Je n'ai aucune envie de lui donner une réponse qu'il est pourtant en droit d'exiger. Lui, reste un moment à me regarder. Il a dû comprendre que je ne veux pas en parler. Il se reprend finalement et change de sujet.
- Le médecin a dit que tu aurais des séquelles ... Regarde-moi au moins quand je te parle. Tu es vraiment impoli Mycroft.
Son ton dur m'intrigue alors je me tourne vers lui. Il me plaque, sans me laisser une seconde, la main sur l'œil gauche. Je comprend alors ce qui me gêne dans le droit. Je n'y vois rien, tout n'est que tâches de couleurs plus ou moins diffuses dans la lumière éclatante. Une expression de surprise est passée furtivement sur mon visage, moins d'une seconde, mais je suis sûr que mon frère l'a vue. Je m'efforce de regarder dans sa direction que je devine par la trace sombre que forment ses cheveux. Il enlève alors sa main et me regarde durement.
- Ça ne sert à rien de me le cacher, le médecin m'avait prévenu. Quand ta tête est tombée sur le bord de la baignoire, ton œil a pris un coup aussi et la perte de sang n'a pas aidée. Il a aussi dit que ...
Sherlock est interrompu par la porte de la chambre qui s'ouvre. Un homme en blouse blanche entre et vient se mettre au bout du lit. Il clique plusieurs fois son stylo avant de le poser sur la feuille, elle-même sur son support, qu'il tient dans sa main.
- Bonjour Monsieur. Nous nous doutions que vous ne tarderiez pas à vous réveiller. Je viens voir comment vous allez. Bon, d'abord, comment va votre œil droit ?
- Il est aveugle, Monsieur.
J'insiste assez sur ce dernier mot pour lui faire comprendre que je n'aime pas le ton qu'il emploie avec moi. Il n'en fait pas cas et saisit ma main gauche qui me fait souffrir malgré l'anesthésiant qui coule dans mes veines.
- Serrez le poing, s'il vous plaît.
Je m'exécute, non sans penser que je lui offrirait bien un voyage définitif en Sibérie pour ce manque de considération. Je peine douloureusement à refermer mes doigts et à les rouvrir lorsqu'il me le demande. Il me repose ensuite la main sur le matelas.
- Bon, quelques tremblements légers et une difficulté notable. Normalement, ce sera réversible. Par contre, ce n'est pas le cas pour votre œil, vous allez devoir vous y faire. Maintenant, je vais vous poser quelques questions pour voir si votre mémoire est intacte. Votre nom ?
- Mycroft Holmes.
- Celui de la personne à ma droite.
- Sherlock Holmes, mon frère.
- Avez-vous d'autres frères, soeurs ?
- Je craint de ne pouvoir répondre à cette question.
- Vos frères et soeurs sont classés secret d'État, peut-être ?
- Exactement.
Sherlock est plutôt amusé par cet échange mais ne dit rien, il écoute sans laisser un mot sortir de sa bouche.
- Avez-vous un surnom ?
- Non.
Il commence sérieusement à m'agacer avec ses questions sans queue ni tête.
- Je veux dire, comment les gens vous appellent-ils ?
- Pour être tout à fait honnête, ma mère m'appelle "Myc'", bien qu'elle sache que je déteste ça ; si Sherlock m'appelle "cher frère" ce n'est que par ironie ; dans mon métier, on m'appelle "l'homme de glace" et l'on dit de moi que je suis "le gouvernement britannique à moi seul". Certains encore disent de moi que je suis une "machine", un "reptile" ou un "monstre". On me qualifie souvent d'"agaçant", d'"énervant" ou bien encore d'"invivable". Plus récemment, on a dit que j'étais un "incapable". Mais le qualificatif qui m'est le plus souvent associé et celui d'"insensible".
À cette tirade, le médecin reste bouche-bée, sans savoir quoi dire. Mon frère, lui, baisse la tête d'une moue coupable. Je vois le regret emplir ses yeux, couler sur sa joue jusqu'à son menton pour finalement s'écraser sur le bord du lit. Voulant échapper à cette vision, je cherche à dire quelque chose.
- Auriez-vous oublié, Monsieur, que vous parlez à une personne qui sort d'un coma dans lequel il s'est plongé pour tentative de suicide et que la seule idée qu'il a actuellement en tête est de se dire que le 4ème étage auquel nous sommes ferait une hauteur parfaite pour sauter directement dans les étoiles ?
- Mycroft !
Le ton sarcastique que j'ai employé a donné à mon frère une colère suffisante pour me parler avec autant d'autorité. Je refroidis néanmoins rapidement ses ardeurs avec un regard froid et dur. Je le vois se troubler et je regrette ce regard sur l'instant. Le docteur, ne sachant plus où se mettre, sort de la pièce. Sherlock se lève pour le suivre. Je n'ai aucune envie de rester seul. Je voudrais qu'il reste.
- De toute façon, je n'ai même pas la force d'aller jusque là, même pas la force de me lever. Je ne peux rien faire tout seul.
Il s'arrête, le bout de ses doigts effleure alors la poignée, il hésite. Il finit par revenir et, avant même que j'ai pu dire quoi que ce soit, il s'assoit sur le lit et me prend dans ses bras.
- Sherlock ... Je ... je suis désolé.
- Désolé de quoi ?
Je passe à mon tour mes bras autour de lui. Je me sens en sécurité là, entre ses bras, comme si rien ne pouvait traverser tout l'amour qu'il me donne. Épuisé, je m'endors, blotti tout contre lui.
~~
Ok ok, j'avoue, j'avais dit que ce serait moins tendu. Pour ma défense, ça fini un peu mieux voila. Sinon j'espère que vous avez passé la canicule pas trop mal et que vous profitez des quelques dernières semaines avant la rentrée. Perso je suis en vacances avec ma famille, c'est sympa. Allez, à mercredi ! Des bisous 😘
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Iceman
FanfictionMycroft en a marre de ne se sentir pas plus qu'un incapable. Cette culpabilité le ronge maintenant plus que jamais. Personne ne semble l'apprécier. Cela veut donc dire que personne ne le regrettera ? Attention, certaines scènes seront exposées expli...