Chapitre 16 : Carla

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Les insultes. Les coups. Les cris. Les pleurs. La douleur. La colère. La peur. Je me souviens de ce sentiment qui me terassait toute la journée. Le souvenir le plus lointain de mon enfance était une gifle qui m'avait fait tomber au sol et un sifflement. Un sifflement sourd terrifiant.
"Tu lui as pété l'oreille!, hurlai ma mère.
- C'est bon elle a rien!
- T'es con, elle saigne! Putain il va dire quoi l'médecin?
- I'va rien dire parce que tu diras rien!"
Mon père s'approcha de moi pour me soulever par les aisselles avant de me jeter dans le canapé. Il me jeta un torchon sale avant de me crier dessus.
"T'as intérêt à nettoyer tout ce bordel et à bien t'laver l'oreille p'tite conne.
- Oui... Oui Papa.
- Et si j'apprend que t'as ouvert ta petite gueule à quelqu'un, t'es morte."
Alors que j'essuyais le sang qui coulait le long de mon cou, mon père alla dans la cuisine se descendre une bière. Ma mère arriva avec un linge mouillé pour me nettoyer l'oreille.
"Faut bien l'nettoyer parce que sinon l'médecin va l'voir et puis on va perdre l'argent. T'aimes bien manger hein? Et puis dormir dans une maison? Alors tu diras rien d'accord?, me menaça ma mère."
J'hocha la tête en retenant mes larmes. Après avoir nettoyé, je rejoignis ma chambre et m'allongea sur mon matelas au sol. Alors que les cris résonnaient dans toute la maison, je grimaçai en sentant mon coeur battre dans mon oreille, la douleur me parcourant le dos. Les cris se calmèrent tandis que j'entendais des pas dans les escaliers et la porte s'ouvrit. Livaï se tenait dans le seuil de la porte et ferma celle ci avant de venir s'agenouiller près de moi. Il caressa mes cheveux et me regarda inquiet.
"Tout va bien?, demanda t'il en me regardant."
Je me contenta d'hocher la tête et il se rapprocha de moi pour me prendre contre lui. La chaleur de son corps me procura immédiatement une vague de bien être. En confiance avec mon grand frère, je finis par lui avouer ce qui s'était passé plus tôt dans la journée.
"Papa...Papa m'a frappé.
- Quoi?! Encore?! Où ça?, s'enquérit Livaï.
- Il.. il m'a giflé. Je.. j'ai fais une bêtise... J'ai fait tomber des miettes sur le canapé quand j'ai mangé une tartine...
- C'est pas une raison pour te frapper. Tu as encore mal?
- Mon... mon oreille a saigné... et ça siffle. J'ai mal à la tête..., me plaignais-je.
- Montre moi."
Il se mit à inspecter ma blessure puis se leva pour aller chercher de quoi nettoyer correctement. Après ça, il me serra fort contre lui.
"Je te jure que bientôt, tout ça sera fini."

Ma sonnerie de téléphone me fit me lever de mon sommeil. Je regardai alors le destinateur de cet appel. Bertolt. Je me redressai du canapé pour aller lui parler dans un endroit plus tranquille.
"Cou...cou, comment tu...tu...tu te sens?, demanda t'il d'un ton rassurant.
- Ça va même si je suis un peu perdue.
- Je..je comprends... C'est di...diffi..cile à acce...accepter. Mais...mais tu...tu vas y... y arriver.
- Merci Bertolt. Je... tu voudrais venir à la maison? J'aimerai te voir, dis je tendrement.
- B...bien sûr."

Je me dirigeai de nouveau vers le canapé pour me blottir contre Livaï qui dormait encore. Petra m'apporta une tasse de chocolat chaud en m'adressant un sourire réconfortant.
"Il ne savait pas comment te le dire, commença t'elle. Ça fait des années que cette situation l'affecte beaucoup. Il se sentait plus bas que terre dès qu'il devait aller travailler. Mais il refusait de changer de boulot par peur que tu ne puisses pas aller dans de grandes écoles. Il refuse que tu finisses comme lui...
- Je suis désolé qu'il se soit détruit à cause de moi..., murmurai je faiblement.
- Eli... tu es son rayon de soleil. Il se dépêchait de rentrer pour te voir. Je ne pense pas que ton frère voit les choses comme cela. Il fait juste tout pour te rendre heureuse.
- Je sais. Mais il me rend déjà heureuse. Et... je ne veux pas qu'il soit malheureux. Je veux... qu'on soit heureux tous les deux. Je me fiche de ne pas aller dans de grandes écoles tant que mon grand frère est heureux.
- Je voulais juste que tu aies un bel avenir, chuchota alors Livaï, à peine réveillé.
- Je vais avoir un bel avenir, avec toi à mes côtés. Ne te forces pas à porter tout le poids seul. Tu as réussi à nous construire une deuxième vie. Maintenant laisse moi t'aider aussi. Je suis avec toi, dis je avant de lui prendre la main.
- D'accord... je vais essayer de faire ça. Je vais essayer de trouver un autre job, je vais reprendre ma vie en main. Je peux réussir à faire tout ça si ma petite soeur est avec moi.
- Je serai toujours là."
Livaï laissa couler quelques larmes et posa sa tête sur mon épaule. Il serra ma main dans la sienne et une vague de bien-être envahit mon corps.
"Je suis fière de ce que tu es devenue Elizabeth Ackerman, déclara Livaï.
- Je suis ce que je suis parce que tu m'as élevé. Et ça même avant que tu ne sois officiellement mon tuteur, répondis je avec tendresse.
- Alors j'ai bien fait mon travail, dit il en riant."
J'hochai la tête et restai avec Petra et Livaï à discuter et à essayer de passer au dessus du drame de la veille.

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