Tobio referma la porte de la chambre d'Oikawa, et eut besoin de quelques secondes pour reprendre son souffle et faire le point.
Ils avaient réussi à parler sans s'étriper. Sans s'insulter. Sans laisser le ressentiment guider leurs mots. Une première.
Kageyama savait que c'était l'effet du choc. Le fait qu'Oikawa ait manqué de mourir n'effaçait pas ce qui s'était passé entre eux et tous leur antécédents ; mais ils avaient désormais tous les deux conscience qu'ils ne pouvaient pas vivre l'un sans l'autre. Ils pouvaient vivre sans lien, Kageyama en était convaincu, ils pouvaient vivre sans être âmes sœurs ou seulement occasionnellement –mais Oikawa Tooru n'était pas seulement sa moitié attitrée. C'était son aîné, c'était son modèle. C'était celui qui avait forgé une part de sa personnalité. Même en dehors de leur lien, ils s'étaient construits l'un avec l'autre ; et pour cela, Tobio n'aurait jamais pu le laisser disparaître de ce monde.
Il n'aurait jamais pu laisser partir quelqu'un d'autre.
Kageyama s'apprêtait à descendre quand il aperçut Hanamaki trottiner vers lui :
-Ça y est, vous avez fini ? Niquel. Je vais rester avec lui, maintenant. Et lui passer le savon de sa vie, parce que Mattsun m'a chargé de lui dire que s'il trouvait ça marrant de crever prématurément, il s'arrangerait pour lui trouver le cercueil le plus moche possible.
Tobio le regarda sans comprendre.
-Il travaille aux pompes funèbres, précisa Makki.
Kageyama ne savait pas comment réagir, et demanda d'un air incertain :
-Est-ce que je peux t'emprunter ton téléphone ?
Makki le lui tendit sans poser de questions, mais Tobio ne se sentait pas assez à l'aise pour passer un appel devant ses yeux scrutateurs. Il composa le numéro de Nicolas de mémoire, et hésita sur quoi dire –ils étaient déjà dans l'après-midi et Romero avait dit qu'il serait rentré pour douze heures, où était-il à présent ? Avait-il cherché Tobio ? Il avait dû trouver la porte grande ouverte en rentrant chez lui, mais comment aurait-il pu savoir ce qui s'était passé ?
Moi : je suis à l'hôpital, Oikawa-san a fait une overdose
Moi : il va bien maintenant. Je rentre à pied
Il rendit le téléphone à Makki avec un signe de remerciement.
-A la prochaine, Kageyama, déclara celui avec un petit sourire avant de pousser la porte et de rentrer dans la chambre d'Oikawa.
Tobio redescendit lentement, et prit le chemin du quartier où vivait Romero –ça prendrait une bonne heure à pied, mais prendre l'air lui ferait du bien. Il était épuisé en dépit d'avoir dormi toute la matinée, encore à demi assommé par les événements. L'avancée de la situation lui semblait toujours confuse en dépit de leurs nouvelles résolutions.
Se réconcilier avec Oikawa ne pourrait être que bénéfique pour eux deux, même s'il leur faudrait encore du temps avant d'établir une vraie relation de confiance. Et en même temps... en même temps, Hayashi l'avait prévenu que plus il passerait de temps avec son âme sœur, plus l'attraction serait inévitable ; mais il n'était pas question de sortir avec lui. Juste de tomber d'accord et de communiquer pour rendre le lien harmonieux, pour ne pas qu'il vienne entraver leurs relations hors âmes sœurs. Pour qu'Oikawa sorte de sa paranoïa et lui fasse confiance. Pour que Nico et lui puissent enfin avoir une vraie intimité.
Penser à Romero rendit de nouveau Tobio nerveux. Devait-il garder le secret sur ce qui s'était passé tout le mois dernier ? Puisque les choses s'arrangeaient, devait-il vraiment avouer à Romero qu'Oikawa avait tout senti de ce qu'ils faisaient ? Il gardait encore tellement de secrets –les dissimulant à Nico, mais aussi à Hinata et à Miwa. Aucun d'entre eux ne savait ce qui s'était vraiment passé ces dernières semaines, quelle explication fournir à son comportement, à son état qui n'avait fait que décliner ; seuls Oikawa et lui en étaient conscients, eux seuls savaient ce qui était passé à travers le lien. Ça pouvait toujours rester entre eux...

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Réflexion
FanfictionIl crut qu'il allait passer le reste de son existence seul dans cette cave, qu'il y mourrait là, à vingt-deux ans, enterré avec ses regrets. "J'aurais dû dire le fond de ma pensée à Oikawa. Que je l'admirais, que je l'aimais un peu, et qu'il a tout...