Chapitre 12

871 83 719
                                        


Quand le réveil de Nico sonna, Tobio avait tout sauf envie de quitter le lit.

De une, il avait l'impression qu'il venait à peine de s'endormir. De deux, les draps sentaient vraiment bon, et relever sa tête de l'oreiller où elle était plongée lui semblait un effort incommensurable. De trois, il n'était même pas sûr de tenir debout.

Romero remua un peu, puis éteignit le réveil avant de se redresser. Kageyama sentit juste une main dans ses cheveux avant de replonger dans un demi-sommeil, vaguement conscient d'un peu de lumière et du bruit de la douche avant que Nico ne revienne et ne lui effleure la joue :

-Tu restes ici aujourd'hui ? demanda-t-il tout bas.

-Hmm, répondit Tobio, sa voix à moitié étouffée par la taie d'oreiller.

Nicolas dut le prendre pour un oui, car il l'embrassa au coin des lèvres avant de partir à l'entraînement, laissant Tobio profiter encore un peu de son lit et faire la grasse matinée –étant dispensé de volley-ball pendant encore deux semaines, même s'il pourrait revenir dès le lundi suivant pour travailler avec les kinés et se préparer à reprendre le rythme dans des conditions optimales.

Kageyama somnola donc jusqu'à dix heures, se demandant vaguement si tout ce qui s'était passé cette nuit avait été un rêve –tout s'était enchaîné naturellement, de moins en moins clair au fur et à mesure que le plaisir grimpait, et il gardait de vagues souvenirs étoffés d'impressions vivaces –et quelques images qui ne laisseraient pas indifférent s'il y pensait trop. Il n'en avait pas douté un instant, mais les choses avaient été parfaites du début à la fin.

Ce qui était moins parfait, en revanche, était que le lien commençait de nouveau à se manifester ; les effets des annihilateurs se dissipaient progressivement. Il n'attendit pas d'être complètement soumis aux humeurs d'Oikawa avant de prendre la dernière gélule et de les étouffer de nouveau, et tout ce qui s'amorçait en lui sans lui appartenir se résorba, le laissant une fois de plus en paix avec lui-même.

Si j'avais su, j'aurais fait ça depuis le début, songea Tobio en se levant. Il grimaça légèrement en sollicitant ses membres endoloris, cherchant des yeux ses vêtements dans la chambre avant de renoncer –il n'avait qu'à en emprunter à Nico pour la journée, son petit-ami ne lui en voudrait pas.

Il tituba jusqu'à la salle de bains et se glissa dans la cabine de douche, laissant l'eau fraîche ruisseler sur son corps avec délectation. Les marques de sa captivité avaient presque disparu, ne restaient que de vagues irritations autour de ses poignets, là où la peau se refaisait tout doucement. Son entorse n'était plus si douloureuse non plus –il se débrouillait pour marcher sans attelle, et il en avait vu d'autres. L'important était de ne pas trop perdre en condition physique en attendant de reprendre l'entraînement : il restait le passeur titulaire des Adlers, même si Hirugami l'avait assuré qu'il pouvait prendre tout le temps dont il avait besoin, psychologiquement et physiquement parlant.

Il se sentait d'excellente humeur, sans aucun lien d'âme sœur pour venir ternir sa satisfaction. Bien sûr, ça ne l'empêchait pas de penser, et il était encore tracassé par les messages que lui avait laissés Oikawa et les informations que Miwa lui avait fournies. Tobio s'en voulait de s'être imposé tellement de restrictions en croyant que le lien signifiait quelque chose –ne pas embrasser Nico, ne pas coucher avec lui, ne pas prendre d'annihilateurs. Toutes ses résolutions sagement tenues depuis des années avaient volé en éclats en douze heures, et honnêtement, il ne s'en portait que mieux. Oikawa n'avait pas eu tant de scrupules. Il était grand temps qu'ils soient à égalité.

Kageyama choisit un sweat dans l'armoire de Romero, puis se posa dans la cuisine le temps de descendre une briquette de lait. A vrai dire, il regrettait un peu d'avoir piqué deux crises la veille, il avait bien conscience qu'il avait été odieux et avait eu des mots extrêmement durs, et que même la nuit qu'ils avaient passée ensemble n'effaçait pas tout. Il ne savait pas s'il pouvait rester une nuit de plus ici –il devrait forcément rentrer chez lui avant la fin d'après-midi pour récupérer ses cachets dans sa chambre ; mais autant profiter d'être interdit de volley pour rendre service à Nico et faire quelques courses pour lui avant qu'il ne rentre. Il avait remarqué en ouvrant le frigo qu'il commençait à être à cours de réserves, et vu l'heure à laquelle ils avaient dormi, il doutait fort que le joueur brésilien soit d'attaque après l'entraînement pour y aller lui-même.

RéflexionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant