Halloween

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J'ajuste la dernière touche de maquillage à mon costume, je suis grimée en Dracula. Je n'ai pas fait dans la légèreté niveau maquillage et je suis sûre que ma mère va détester. Joey devrait passer me prendre d'une minute à l'autre. Stumble est parti se planquer sous le canapé depuis qu'il m'a aperçue tout à l'heure, non mais quel trouillard ce chat ! La sonnerie de mon interphone retentit, annonçant mon chauffeur.

Je descends les escaliers quatre par quatre, manquant un moment de me prendre les pieds dans ma cape. Je m'engouffre dans la voiture du chirurgien.

- Salut Joey, dis donc tu n'y es pas allé de main morte sur l'hémoglobine !

Il a le visage entièrement blanc mais les yeux injectés de sang et un faux couteau lui traverse le crâne. Une envie de rire me prend, je sens qu'on va bien s'amuser.

- Il me semblait que les vampires appréciaient l'hémoglobine..., dit-il séducteur.

- Certes... Méfie-toi... Et sinon, comment se portent les prothèses de genou ? je m'enquis.

- A merveille, réponds-t-il avec un large sourire.

A mesure que le véhicule roule en direction de la maison de mes parents, j'apprends à connaitre mon invité un peu plus. Ce n'est que la deuxième fois que je le vois mais le courant passe plutôt bien, et il est réellement très charmant, ce qui ne gâche rien. D'un côté ça m'embêterai presque de donner satisfaction à ma mère.

Comme prévu, ma mère manque de s'étouffer en nous ouvrant la porte. Mis à part les citrouilles devant l'entrée et quelques toiles d'araignée en guise de décoration, seuls Joey et moi sommes déguisés. Mon père part dans un fou rire tonitruant en nous voyant débarquer dans le salon, suivi par Neal et Kelly.

- Amy, peux-tu venir m'aider avec les petits fours s'il te plait ? demande ma mère entre ses dents en m'indiquant la cuisine de la tête.

- Bien sûr...

- Mais qu'est ce qu'il t'es passé par la tête ? s'indigne-t-elle une fois la porte refermée derrière nous. Que va penser Joey ?

- Maman, c'est Halloween, j'avais juste envie de m'amuser. N'est-ce pas le conseil que tu me donnes sans arrêt ?

- Oui, bien sûr mais...

Je ne lui laisse pas le temps de terminer sa phrase que je ressors, dans un mouvement de cape tout à fait stylé, portant le plateau de petits fours à bout de bras. J'avoue que la présence de Joey à la table familiale détourne l'attention de moi, et je me sens moins oppressée que d'habitude.

- Alors Joey, vous travaillez depuis longtemps à l'Hôpital Beaumont ? demande ma mère.

- Cela doit faire quatre ans maintenant, réfléchit-il, j'y ai fait mon internat et le Professeur du service Orthopédie a souhaité me proposer un poste à son issue.

- C'est très bien ça, approuve ma mère semblant compter les qualités de Joey comme on coche des cases sur un questionnaire.

Il se plie au jeu du sondage « gendre plus que parfait » de ma mère avec un certain naturel.

Ma petit sœur Leagh est la seule absente de la soirée, elle s'est rendue à une fête étudiante. Nous nous délectons des plats préparés par ma mère, qui est une excellente cuisinière. La maison est emplie de délicieux effluves de citrouille. Encore une qualité que je ne possède pas.

Biensûr, la conversation dévie comme à l'accoutumée sur le travail au Cabinet, mais Neal et mon père font des efforts et posent également des questions à Joey sur son poste à l'Hôpital Beaumont. J'apprends que Joey travaille souvent de nuit, effectuant de nombreuses gardes. Il n'est pas rare que les plus jeunes médecins soient affectés sur ces horaires, préférant laisser ceux de jour aux plus anciens avec famille à charge. Il parle de son métier avec passion, cela se voit qu'il est fait pour ça.

La discussion prend alors un tour plus médical et Kelly part récupérer dans son sac les quelques clichés de son échographie de la semaine précédente. Neal la couve du regard tel un objet précieux. Ne vous ai-je pas dit à quel point je les trouvais mignons ces deux-là ? Ma belle-sœur est pour l'instant tellement fine, que je ne sais même pas où elle planque mon futur neveu ou nièce. Mais il semblerait qu'elle en soit déjà à sa treizième semaine de grossesse.

A l'issue du plat principal, alors que les estomacs commencent à être bien remplis et les esprits quelques peu alanguis, quelques enfants viennent sonner à la porte.

- J'y vais ! je dis sautant sur mes pieds.

Je récupère un panier de friandises dans la cuisine et vais leur ouvrir. Face à moi, fantômes, sorcières et autres monstres. Ces petits diablotins de même pas dix ans nous menacent d'un « Trick or Treat ! ». Je tiens mon rôle de vampire à la perfection et distribue des bonbons à tour de bras. Joey me rejoins en poussant un grognement ce qui les fait hurler de terreur.

Mon excuse est toute trouvée pour abandonner mes proches plus tôt qu'habituellement, mon beau chirurgien est de garde demain. A peine le dessert terminé que je demande à Joey de nous ramener. Ma mère n'ose rien dire. Elle a l'air sous le charme de mon invité. Ce dernier la remercie pour son délicieux repas et serre la main de mon père et mon frère. Il félicite une nouvelle fois Kelly pour sa grossesse et enfin, nous partons.

Une fois dans la voiture, Joey se tourne vers moi et s'enquière on ne peut plus sérieusement:

- Amy, le coup du déguisement vraiment ??!

Je le regarde penaude et ne peux rien faire d'autre que partir dans un énorme fou rire. Joey ne tarde pas à se laisser gagner par mon hilarité. Cela me fait tellement de bien, j'ai mal aux côtes tellement je ris. Joey est vraiment quelqu'un d'attirant et de drôle. Ça me fait mal de l'admettre, mais je suis contente de lui avoir été présentée.

Le reste du trajet se poursuit dans la bonne humeur et lorsqu'il gare sa voiture devant mon immeuble, j'ai soudain l'angoisse de rester seule. Je m'entends lui demander :

- Veux-tu monter ?

S'il semble surpris par ma question, il ne le montre pas et accepte. Une fois la porte de mon petit appartement ouverte, je plonge mes yeux dans les siens. Il a enlevé ses lentilles injectées de sang un peu plus tôt dans la soirée et je distingue le brun chaleureux de ses yeux. La tension monte d'un cran et je sens mon cœur battre dans ma poitrine. Dans l'obscurité, il me rend mon regard un long moment, cherchant mon approbation et se penche sur moi pour m'embrasser.

Je ris encore en lui enlevant son faux couteau du crâne et l'attire doucement vers la porte de ma chambre. J'ai envie de lui et de passer un bon moment. J'ai besoin de sa chaleur et de ses bras.

Il me bascule sur le lit et nous rions encore car ma cape manque de m'étrangler.

- Amy, dit-il, tu es une fille hors du commun, le savais-tu ?

Pour toute réponse, je me contente de l'embrasser, encore et encore.

Prendre son envolOù les histoires vivent. Découvrez maintenant