- Alors c'est bon ? Tu le vois vraiment ?
Tous, autour de la table, ont le regard rivé sur ma cousine qui, elle, semble gênée. Ses joues rougies ne laissent aucun doute sur la véracité de ses mots. Hélène et Marco pourraient potentiellement en douter puisqu'ils ne la connaissent pas vraiment, mais ses amis et moi le savons : elle a son fil et n'a sûrement pas tardé à rencontrer son âme-sœur. Sinon, elle ne serait pas aussi gênée face à nous. Il n'y a que lorsqu'elle dit la vérité qu'elle est comme ça. C'est atypique, je le conçois, mais ma cousine est étrange par définition alors rien de très grave.
Mes deux amis, tout comme ceux de Caroline et Joshua, enchaînent les questions sans ne jamais s'arrêter. Ils lui laissent à peine le temps d'en placer une, ce qui me fait légèrement rire je le reconnais. Pour ma part, toute mon attention est portée sur mes frites. C'est rare que tout ce qui se rapporte au fil rouge me touche ou m'intéresse. Cette histoire possède encore beaucoup trop de parts d'ombres pour qu'elle puisse réellement m'intéresser. Et puis, je dois bien avouer que je trouve ça vraiment triste comme fatalité. Devoir se résoudre à accepter un partenaire prédestiné, sans avoir la possibilité de le choisir, ne peut être compensé par le grand bonheur que ce partenaire pourrait nous offrir.
« Vous serez le plus beau trésor de l'autre, il sera le vôtre »
Je me remémore cette phrase du conseiller d'orientation, toujours le regard posé sur mon repas, et mes lèvres s'étirent légèrement. Je dois avoir l'air stupide, à sourire comme ça pour rien, mais, même si j'en ai parfaitement conscience, je ne peux me retenir. Si je le faisais, la grimace qui s'offrirait alors aux autres serait telle que je leur ferais sans aucun doute encore plus peur.
Ce repas... J'ai presque peur de le manger. Il a l'air vraiment très appétissant, c'est une évidence, mais je voudrais presque le garder en souvenir. Ayant été prévenu au dernier moment, je n'avais pas prévu d'argent alors je pensais tout simplement les regarder manger. J'aurais sûrement pris un peu de nourriture dans les assiettes de mes amis et ça m'aurait très largement suffit puisque je ne mange pas beaucoup. Mais, lorsqu'il l'a remarqué, Joshua s'est proposé pour me l'offrir. Je pense très honnêtement ne jamais avoir été aussi heureux et intimidé en même temps. J'ai tenté de refuser, je ne voulait pas être un poids pour lui avant même que nous ne nous connaissions vraiment, mais il ne m'a pas écouté. Il a juste dit qu'il fallait que je mange avant de retourner en cours. Je me suis donc retrouvé, bien malgré moi, à lui laisser me payer le déjeuner.
Et je reconnais que ça m'emplit d'une joie que je ne parviens pas à dissimuler. Mes pensées étaient tellement troublées depuis la dernière fois que je ne parvenais pas à aligner les moindres mots pour les lui exprimer. En réalité, je n'aurais su quoi lui dire. Je voulais plus que tout le voir et, en même temps, c'était ma plus grande peur. Alors, finalement, je me suis muré dans un silence plus stupide qu'autre chose. J'attendais vainement un message de sa part qui, finalement, n'est jamais arrivé. Alors oui, ce matin, lorsqu'il est s'est approché de moi pour prendre de mes nouvelles, mon sang n'a fait qu'un tour, tout comme mon cœur s'est presque arrêté. Et maintenant, alors qu'il est face à moi, je ne peux m'empêcher de me réjouir.
Je dois sûrement être comme un enfant qui découvre tout juste les plaisirs de la vie. A 17 ans, c'est pathétique, je le sais, mais il est celui qui me rend aussi stupide, si bien que j'en viens secrètement à désirer qu'il soit celui avec qui je serais lié par le fil rouge.
Lorsque je relève les yeux, sans réel but, simplement pour lui jeter un rapide coup d'œil pour la n-ième fois, je rencontre ses prunelles. Celles-ci même qui lui offrent une autre particularité venant s'ajouter à toutes celles qu'il possède déjà, que je les connaisse ou non, et qui me plaisent tant. Un élan de joie m'emplit soudainement alors qu'un courant électrique parcourt ma colonne vertébrale. Ce simple contact, aussi infime soit-il, me suffit à me rendre compte du manque que j'avais ressenti ces deux dernières semaines. Manque que j'avais moi-même causé, que ma stupidité avait causée.
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Destinée [BxB]
Romans" J'aimerai que tu me regardes comme tu regardes ces animaux. - Je le fais déjà, c'est juste que tu ne le vois pas." Evan, 17 ans, possède désormais une petite sœur ainsi qu'un beau-père qu'il apprécie. Tout, ou presque, semble aller dans la vie du...