Chapitre 1, partie 2

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Quand Denis commença à reprendre son souffle, la première chose qu'il aperçut, dans l'obscurité, fut sa lampe de chevet, dont la forme se découpait contre la fenêtre. Il prit alors une grande inspiration. Il aperçu ensuite son cadran, sur la table de chevet. Ce dernier indiquait trois heures et sept minutes.

Chaque fois que Denis avait un cauchemar, les choses se passaient de cette manière. Ce n'était pas comme dans les films, où les gens se réveillent en sursautant, en criant ou en se levant soudain de leur lit. Non, chaque fois qu'un mauvais rêve se terminait, Denis cessait soudain de respirer et retenait son souffle un moment. Il était ensuite enveloppé d'un rideau noir et ce qu'il avait vu disparaissait totalement. Puis, doucement, il ouvrait les yeux et respirait à nouveau. Il savait alors qu'il était de retour dans le monde réel.

Il remarqua alors que ses poings étaient fermement serrés. Il déplia les doigts. Ses mains étaient si crispées que ça lui faisait mal et ses ongles étaient restés enfoncés dans ses paumes. Tout son corps, couché en position fœtale, sur le côté, était tendu. Il se sentait comme s'il venait de courir le marathon : il était essoufflé et son cœur battait à tout rompre. Un voile de sueur recouvrait son corps et des gouttes coulaient de son jusque dans ses yeux et tout le long de sa colonne vertébrale. Denis se tourna sur le dos, étendit lentement ses membres pour faire l'étoile et se détendre. Enfin, doucement, il se releva.

Il alluma la lampe munie d'un gradateur, histoire de ne pas s'aveugler chaque fois qu'il se réveillait en pleine nuit, ce qui lui arrivait souvent. Il s'assit sur le bord du lit, songeur. Dieu qu'il détestait ces cauchemars ! Depuis qu'il avait quitté Chibougamau pour venir s'établir à Montréal, quelques années plus tôt, c'était pire que jamais. Il en faisait de plus en plus souvent. Denis jeta ensuite un œil sur le téléphone posé sur la table de chevet et soupira.

Il décida finalement de se recoucher. Il n'y avait aucune autre solution. À quoi bon ? Qu'allait-il faire, de toute façon ? Appeler la police et dire qu'il avait été témoin d'un meurtre ?

***

Denis ramassa un journal au métro sur le chemin de l'université. Les médias ne parlaient pas nécessairement de tout ce qui se passait ou d'histoires d'homicide, mais peut-être allait-il apprendre quelque chose. Ou à tout le moins voir ses soupçons confirmés.

Incapable de se rendormir suite à son cauchemar, il avait à peine fermé l'œil. Comment se trouver le sommeil après avoir vu pareille horreur? Il avait fini par se lever pour déjeuner, dans un état de fatigue avancée. Son colocataire, Julien, l'avait rejoint un peu plus tard, l'observant discrètement d'un regard inquiet. C'est que Denis dormait de plus en plus mal.

― Ça va ? avait demandé Julien.

― Mouin... juste mal dormi...

Julien sourcilla. Ce n'était pas la première fois que Denis s'en plaignait. Il n'était pourtant pas en période d'examen et Denis n'en était pas à sa première année à l'université. Qu'est-ce qui pouvait bien le stresser à ce point ? La santé du jeune homme s'en ressentait. Il devenait irascible, nerveux, déconcentré, épuisé. Julien songeait à lui suggérer d'aller consulter un psychologue, mais il ne savait pas comment Denis accueillerait la suggestion. Julien s'était contenté de soupirer, se disant qu'il allait voir les ressources offertes par l'Université avant de lui en parler.

Denis parcouru rapidement les pages du journal. Rien, aucune mention d'un assassinat perpétré sur une personne du troisième âge. Aucune histoire en ressemblant à ce qu'il avait vu. Mais Denis n'était pas parfaitement rassuré. Peut-être la date de tombée du journal avait-elle déjà été passée lorsque l'affaire avait éclaté.

La Société des voyants, Tome 1: L'odeur de la nuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant