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Ma petite amie rentre chez elle avant le repas, dès qu'elle voit ma mère s'activer en cuisine et je me retrouve seule avec cette dernière. C'est loin d'être désagréable mais je préfère quand Kamille est avec nous. Elle me manque même lorsque nous passons à table, j'ai la sensation que quelque chose ne va pas chez moi, un peu comme si je n'avais plus de joie en stock. Ma mère me sort des blagues auxquelles je ne ris pas, elle me regarde bizarrement sans me demander ce qui ne va pas, à mon avis, je pense qu'elle s'en doute bien. Une fois nos assiettes vides, elle me propose de voir un film avec elle, j'accepte. Le navet du soir est un film d'action qui passe sur la TNT et durant la première pose publicitaire elle me propose un thé que j'accepte également.

« Comment il s'appelle ? Finis-je par lui demander alors qu'elle me verse de l'eau chaude dans mon mug.

– Pardon ?

– Le mec que tu vas voir le dimanche maman.

– Je t'ai dit que c'est une patiente. »

Je m'aperçois de qui je tiens la capacité de mentir, que ce soit ma mère ou moi, nous le faisons très mal toutes les deux.

« Allez, arrêtes ton char maman. Dis moi au moins son prénom, c'est pas un crime tu sais.

– Pierre, finit-elle par me dire entre deux gorgées de thé chaud, je constate que ses joues rougissent. Il s'appelle Pierre et c'est un collègue.

– Super ! Un beau père psy !

– On en est pas encore là.

– Ah donc c'est juste sexuel ?

– Non, dis donc toi ! Et d'ailleurs comment tu as deviné ?

– On part pas toute maquillée et parfumée pour voir une patiente, du moins je ne te l'avais jamais vu faire, et tu étais encore sur ton petit nuage quand tu es rentrée. Tu comptes me le montrer ton Pierre ou...

– Je ne comptais déjà pas t'en parler tout de suite, j'attendais de voir comment les choses évoluent mais vu que tu es au courant maintenant... Mais je ne peux pas te dire quand, il faut d'abord qu'on en parle.

– Il sait que j'existe au moins ?

– Bien-sûr que oui.

– Et pour Kamille ?

– Il sait que tu as une petite amie mais nous ne sommes jamais rentré dans les détails.

– Dur de parler la bouche pleine ! »

J'explose de rire sous cette réflexion qui est sortie de ma bouche presque sans que je ne m'en rende compte, ma mère me dévisage choquée, ce qui n'arrange pas mon hilarité, elle finit donc par se joindre à moi. Je peine à reprendre mon sérieux mais finis tout de même par me ressaisir.

« Que dirais-tu de me présenter samedi ?

– Pardon ? Pourquoi si tôt ?

– J'aurais voulu faire dormir Amel vendredi à la maison et inviter Clem pour le café samedi, histoire qu'il ne fasse pas le kéké avec sa bague devant tout lycée déjà, et ça fera genre repas de couples entre amis, ça lui mettra moins de pression.

– Ton ami se payera juste la honte en petit comité, dit-elle en riant. Et oui c'est vrai qu'avec du monde tout autour on se sent moins tendu.

– Pour Clem, autant que ça reste en famille, dis-je en riant, ça fera même rire ton mec je parie.

– Mon mec... J'ai l'impression que c'est moi l'ado d'un seul coup. »

Nous rions alors que le film reprend, elle s'y replonge un peu, pour ma part, j'ai totalement perdu le fil de l'histoire, deux mecs se foutent sur la gueule à l'écran et j'ignore totalement pourquoi. Ma mère sursaute soudainement.

« Tu comptais me le demander quand pour Amélie ?

– Là, ce soir maman.

– Je vois, avec Pierre en diversion, bien vu ma fille.

– Je voulais juste savoir si tu voyais quelqu'un. J'aurais pas eu de doutes je te l'aurais pas demandé comme ça, cash.

– Et si je te dis non pour ta copine ?

– J'en connais deux qui vont se payer une honte monumentale la semaine prochaine, tout le bahut en parlera encore dans dix ans.

– Tu devrais faire de la vente Titi, tu as un don pour le forcing. »

Nous rions une nouvelle fois ensemble puis elle me demande si je sais comment Clément va offrir sa bague, je vois que pour elle aussi le film a perdu tout intérêt.

« J'en ai aucune idée, maman. Tant qu'il ne nous fout pas la honte en se mettant à genoux et tout...

Je lui en parlerais cette semaine, en lui rappelant que c'est qu'une bague à trente balles, qu'il ne se la joue pas gros romantique ou demande en mariage.

– C'est un peu tôt je pense ma Titi.

– Il en serait capable ce con. Et le pire c'est que tête d'écureuil dirait certainement oui.

– Tête d'écureuil ?

– Ouais Amel. »

Nous rions une nouvelle fois, ma mère pour le surnom que j'ai trouvé à mon amie et moi en imaginant un Clément à genoux dans ma salle à manger, faisant une barbante déclaration d'amour.

« Tu vois que c'est beau l'amour ma Titi.

– Ça a ses bons côtés je dois avouer. J'ai un beau bracelet et une belle chaîne.

– Ne sois pas matérialiste ma fille ! De plus, je suis certaine que tu les échangerais pour être avec elle en ce moment.

– Sans hésiter une microseconde. »

Elle me caresse doucement les cheveux, me disant qu'elle comprend puis elle me parle de son collègue, il a peu près son âge, il est divorcé lui aussi et a une fille plus jeune que moi de deux ans. Il viendra peut-être avec elle, si c'est son week-end de garde, histoire d'officialiser des deux côtés en une seule fois. Je demande à ma mère si elle la connais sa fille, elle me dit qu'elle ne l'a vue qu'une fois et encore de loin. À la télévision, le film est terminé, nous parlons encore un peu puis je regagne mon lit. Je m'endors paisiblement après avoir souhaité bonne nuit à ma petite amie. 

Mes Chroniques de Lycée-épisode 3- Le Cadeau de ClémentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant