Montagnes russes [ɴᴏʀᴇɴᴍɪɴ]

Partie 1.1

Changer d'école n'était plus qu'une routine pour moi. Mon père ne cessait d'être muté de ville en ville et ma mère et moi devions bien évidemment le suivre. Pour le moment, nous n'avons jamais fait plus que huit mois dans une même ville au cours des six dernières années. Depuis le début de mon collège, j'ai changé d'école, d'amis, et de ville une dizaine de fois. Aujourd'hui, je mets encore les pieds dans un nouveau lycée alors que je n'ai passé que quatre mois dans l'ancien. Selon ma mère, je devrais finir mes études ici. Je l'espère bien, 10 mois ce n'est pas si long que ça quand on y pense.

La rentrée avait lieu lundi, nous sommes mercredi. Notre déménagement était assez précipité, dimanche soir, alors que je préparais en retourner dans mon ancien lycée, mon père a reçu un appelle lui disant qu'il était de nouveau muté. C'était bien le seul content de cet appel. Ma mère a essayé tant bien que mal de nous laisser un peu de temps, mais impossible de le faire changer d'avis. Lundi, tout était dans des boites, mardi nous étions en route, et aujourd'hui j'essaie de trouver les bureaux administratifs parmi tous ces locaux que je ne connais pas.

La cloche sonne pile au moment où j'y arrive. Comme je dois être le seul élève qui vient tout juste d'arriver dans ce lycée, on me prend en charge aussitôt pour me faire un petit tour des règlements qui sont tous les mêmes dans chaque établissement, on me remet mon horaire de cours et un numéro de casier dont je pourrais me servir. C'est par la suite qu'on me dirige vers mon premier cours, anglais.

- Ah oui c'est vrai, j'avais oublié, dit l'enseignant en me voyant entrer dans la classe. Na...

- Na Jaemin, que je dis.

- Na Jaemin... Répète-t-il en inscrivant mon nom sur une feuille. Tu peux t'installer juste ici à l'avant et suivre avec Renjun.

Je m'assoie avec ce fameux Renjun qui place aussitôt son manuel remplie de note entre nous deux. Je crois comprend que je suis assis à côté du numéro académique de la classe. Mes parents seraient tellement contents d'apprendre que je suis amis avec un petit génie, mes notes augmenteraient surement. Elles ne sont pas particulièrement mauvaises, mais parfois c'est difficile de suivre un cours quand on change de lycée en plein milieu de celui-ci.

Moyennement concentré, j'écoute le professeur parler. Je regarde mon voisin prendre des notes de façon religieuse, l'enfant que tout le monde rêverait d'avoir, sans doute un futur médecin fils de médecin. Ce serait presque une assez bonne raison de le détester, mais je vais simplement l'ignorer.

Le cours se fini, je sors immédiatement à l'extérieur dans l'espoir de croiser le moins de gens possible. Je n'ai aucune envie de subir le questionnaire habituellement lorsque j'arrive dans un nouveau lycée. Souvent on me demande d'où je viens et jamais je n'ai trouvé de réponse à cette question pourtant si facile.

Une fois dehors, je marche un moment le long de la grille. Au loin, de l'autre côté de celle-ci, j'aperçois un garçon qui semble étudier ici, sa tête me dit quelque chose. Il me voit, et voit surtout que je le regardais, puis s'approche. Je ne fuis pas, ce serait bête.

- Le nouveau, Jaemin c'est ça? Qu'il me demande.

- Oui, Na Jaemin.

- Moi c'est Jeno, je suis ici depuis peu aussi, arrivé en janvier. Qu'il me dit.

Ça nous fait un point en commun, mais je me demande pourquoi il est de l'autre côté de la grille. Ah, voilà ma réponse. Il sort un paquet de cigarette de ses poches en sort une et l'allume. Loin d'être du même genre que ce Renjun à côté de qui j'étais assis.

- Tu fume? Qu'il me demande.

- Non, jamais essayé même.

- Tu fais bien, me dit-il en souriant.

C'est moi ou bien toutes les personnes qui fument disent ça?

Nous discutons un moment chacun de notre côté de la grille, je n'ai pas l'habitude de sympathiser aussi rapidement avec les gens dans les lycées où j'arrive, mais Jeno est différent. Il est nouveau, tout comme moi, et il ne me pose pas de question sur mon passé. Je crois qu'il est un peu comme moi en fait, un solitaire. Nous sommes donc solidairement solitaires.

Ma première journée se passe plutôt bien, c'est de loin la première fois que je ne suis pas seule à ma première journée. Même pour le trajet de bus je suis avec Jeno, il vit dans un quartier un peu avant le mien, nous prenons donc le même bus.

- On se dit à demain? Demande-t-il avant de sortir du bus.

- Oui, à demain.

Je fais le reste du trajet seul, deux arrêts plus tard, je sors à mon tour et marche pour me rendre chez moi. J'en profite pour me familiariser un peu avec ce qu'il y a autour. Rien de bien intéressant.

Lorsque j'entre chez moi, il n'y a personne. Mon père est sans aucun doute au bureau et ma mère doit être aller faire des courses. Je vais dans la cuisine en espérant y trouver un reste de pizza d'hier, mais il y a bien plus qu'une vieille pizza froide. Le réfrigérateur est plein, ma mère ne peut pas être aller faire les courses, elle y est visiblement déjà allée.

J'hausse les épaules et attrape la boite de pizza que je fais réchauffer. On dirait bien que je vais passer la soirée seul, ce n'est pas plus mal, je n'aurais pas de questionnaire sur comment s'est passé ma première journée. Si mes parents apprennent que je me tiens avec le délinquant du lycée je ne suis pas mieux que mort. Vaut mieux rester muet sur ce sujet et l'éviter comme la peste.