Enfin chez moi.
La nuit à l'hôpital aura été tout sauf reposante, mais le pire c'était ce matin. On m'a encore apporté un plateau de nourriture que je devais finir à moins de ne vouloir boire la boisson douteuse, ou pire, rester une nuit de plus. Après, on m'a présenté mon plant alimentaire très strict. Trois repas complet plus deux collations, une le matin et une l'après-midi. Chaque repas que je ne prendrais pas devra être remplacer par le substitue de repas. Si après deux semaines les résultats ne sont pas bons, je serais envoyé en hospitalisation, juste le mot me fait peur.
J'ai demandé à mes parents si je pouvais aller voir Jaemin et Jeno, ils ont refusé. Avec le décalage horaire et ma... maladie... je suis mieux de rester à la maison. Je ne peux sortir que pour aller au lycée, ma mère m'y conduira chaque matin et me récupérera en fin de journée pour que je n'ai pas à marcher jusqu'à l'arrêt de bus.
- Invite les ici, me propose-elle en m'apportant ma première collation.
Deux biscuits oreo.
Je ne me souviens même pas la dernière fois que j'en ai mangé, j'ai oublié quel goût ça a.
Je leur envoie un message pour leur demander s'ils veulent venir chez moi, ce serait la première fois. Ils acceptent, je leur envoie l'adresse.
- Il faut que tu manges par contre Renjun.
- Je mange. Que je réponds en croquant vigoureusement dans le biscuit.
La nourriture n'a aucun goût pour moi, dans mes souvenirs, ces biscuits étaient mille fois meilleurs, c'est décevant.
La sonnette retentie dans toute la maison, j'allais me lever pour aller ouvrir, mais ma mère me dit de rester assis. Ça m'énerve, je me sens comme si j'allais mourir si je me levais, alors que non, je ne vais pas mourir.
J'entends ma mère leur dire qu'elle est enchantée de faire leur connaissance et que je suis dans le salon. Puis, enfin, leur visage apparait devant moi, d'abord souriant, puis inquiet, comme mes parents hier. Jaemin s'approche, lentement, alors que Jeno reste immobile en me regardant. Qu'est-ce qu'ils ont?
- Renjun... Dit simplement Jaemin en s'assoyant à côté de moi.
- Quoi?
- Tu es... tellement...
- Maigre, fini Jeno de l'autre bout de la pièce.
Je ne comprends pas, je pensais qu'ils seraient contents. Pourquoi font-ils c'est tête d'enterrement? Je veux dire, je ressemble à la personne sur les photos maintenant, en plus j'ai acheté des vêtements comme il porte, je devrais leur montrer. Je ne les ai pas remis depuis la salle d'essayage.
- Renjun, mon chéri, est-ce que tu veux leur dire?
- Nous dire quoi? Demande Jaemin de plus en plus inquiet.
Pourquoi fait-elle cela? Je vais être obligé de leur dire maintenant qu'elle en a parlé. Bravo, merci beaucoup.
- Rien, que je dis en foudroyant ma mère du regard.
- Je vais être dans la cuisine, dit-elle en quittant la pièce.
Jeno s'assoie enfin, je suis surprise que ma mère n'est pas faite de commentaire sur le fait qu'il sent la cigarette, et l'alcool aussi. On dirait qu'il a lavé ses vêtements avec de la vodka au lieu de l'eau.
- Dis-nous Renjun, s'il te plait... Ne fais pas la même erreur que moi.
Les souvenirs de Jaemin complètement démolie, qui pleure encore et encore alors qu'il raconte son viol, ou plutôt ses viols, avec son œil tellement gonflé qu'il n'arrivait même plus à l'ouvrir, me revienne en tête. Je ne veux plus jamais revivre ça, Jaemin est heureux maintenant. Oui il y a des jours plus difficiles, mais il est un battant, je le sais.
- Je...
Juste de penser à le dire, j'ai mal. Leur dire c'est comme m'avouer à moi-même que je crois en leur idée de maladie.
- Anorexie, pas vrai? Dit soudainement Jeno.
Il ne parle pas beaucoup aujourd'hui, comme d'habitude, mais chaque mot est poignant. Comment ce fait-il qu'il sache ce que c'est?
- Mon frère, continu-t-il, il est anorexique lui aussi. Il se bat depuis des années.
Je regarde Jeno sans rien dire. De toute façon, qu'est-ce que je pourrais bien dire.
- Une fois, après quatre jours sans rien manger, il a fait un arrêt cardiaque en se levant du sofa au beau milieu de l'après-midi. Si ma mère n'avait pas été là, il serait mort.
Les larmes me montent aux yeux et je me souviens de la journée au musée, lorsque je me suis évanouie. Je m'imagine seul dans ma chambre un matin, je me lève de mon lit, mon cœur s'arrête. Personne ne le remarque avant une bonne heure, puis il est trop tard, je suis mort.
- Je... Je ne veux pas mourir, que je dis en pleurant. Je veux être avec vous... Je voulais juste... être comme lui...
- Comme qui? Me demande alors Jeno.
Je prends mon téléphone, ouvre Instagram et lui montre la photo de cette personne qu'il suit. Son visage devint blême, et les larmes coulent. C'est la première fois que je le vois pleurer.
- Renjun... Tu n'as pas à lui ressembler... Ce n'est pas lui que j'aime, c'est toi.
Mon cœur manque un battement, et cette fois ce n'est pas parce que je meurs à petit feu, mais bien parce que je vie. Est-ce que j'ai bien entendu Jeno dire qu'il m'aime?
- Je suis désolé si je t'ai fait croire que tu devais lui ressembler... En fait, tu lui ressemblais déjà, mais maintenant...
Je me lève malgré l'interdiction de ma mère, enlève mon t-shirt et mon pantalon et me positionne en face de l'immense miroir dans le couloir. Ils me regardent sans rien dire, et ma mère entre dans la pièce. Je regarde la photo sur mon téléphone, puis mon reflet, puis les photos que nous avions pris la journée que je suis allé faire les boutiques avec Lily. Je ne vois pas deux personnes mais bien trois. Une vedette d'Instagram, moi, et un cadavre.
- Renjun... Dit ma mère en s'approchant de moi.
- Je voulais juste lui ressembler, que je répète en sanglot.
Mes jambes lâches, je m'écroule au sol et ma mère me rattrape.
Qu'est-ce que j'ai fait? Pourquoi je n'ai pas réalisé plus tôt que j'avais l'air de ça, que mon reflet n'était pas réellement moi.
- Tu vas t'en sortir mon chéri, dit ma mère en me serrant dans ses bras. Tu es fort.
Jaemin et Jeno me regardent au loin, sans doute tout aussi troublé que moi de me voir dans un tel état.
J'ai peur, terriblement peur, et si cette envie d'être si... parfait... revenait? Comment faire pour complètement ignorer cette voix dans ma tête qui me répète que si je mange, je perds?
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Montagnes russes [ɴᴏʀᴇɴᴍɪɴ]
Hayran KurguOn dit toujours de ne pas juger un livre par sa couverture, alors il faut encore moins juger une personne à première vue. Le fils de riche, il n'a pas nécessairement la vie de rêve. Le meilleur de la classe, ce n'est pas toujours facile pour lui d'ê...