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Kemil était dans le couloir, assis au pied du mur en face de la porte du salon.
Quand Armel sortir, il se releva d'un bond et se précipita vers lui, relevant son menton et observant son visage avec concentration, une main sur la taille d'Armel.

Armel sourit doucement puis posa son front contre le torse recouvert de cuir de l'homme à la peau sombre.
Il se sentait mieux ici, contre Kemil et loin de ce salon remplis de personnes qui le rendait nerveux.

Quand Andreaz avait prit place à côté d'Aziraph, Isania s'était mise à évoquer des sujets politiques. Armel avait encore du mal avec tous les détails mais il avait déjà comprit comment fonctionnait le système de ce pays.
Les cinq grands clans, dont les Natiano et les Zaroa, se partageaient cinq des six places du Conseil destiné à aider la reine à diriger son pays.

Parmis ces cinq clans se distinguaient les Natiano et les Feaz par leurs mœurs très traditionnelles, archaïques comme dirait Aziraph, et les Zaroa.
Les Zaroa étaient ce qu'Isania appelait un "peuple progressif" pour s'éviter la peine de les insulter chaque fois qu'elle prononçait leur nom. La plupart d'entre eux finissaient par abandonner leur humanité au profit d'une espérance de vie plus longue et d'une puissance bien supérieure à celle des Hommes.

Isania détestait les Zaroa, Armel avait depuis longtemps enregistré l'information dans un coin de son cerveau et évité le sujet avec soin chaque fois qu'il avait parlé avec elle. Il ne comprenait toujours pas par quel procédé l'une des plus grandes maîtresse du clan Natiano avait finit par se trouver un ami chez les vampires mais il n'allait pas s'en plaindre.
Grâce à sa relation avec Aziraph, Isania envisageait une alliance avec l'une des branches du clan Zaroa.

"Qu'est ce qu'il se dit là-dedans ?"

Armel poussa un profond soupir. Il n'en savait trop rien en réalité. Son cerveau avait décroché quand Aziraph avait évoqué le sujet de la royauté.

"Tu savais que la reine avait un amant ?"

Les épaules de Kemil tressautèrent alors que son rire se propageait dans le couloir vide.
Il encarta Armel de son corps et tapota le haut de son crâne, un sourire hilare sur les lèvres.

"Oh Armel, tout le monde sait que la reine a un amant."

Armel fit la moue et chassa la main de sur sa tête pour tourner les talons. Kemil le suivi sans un mot le long du couloir et Armel finit par s'arrêter net pour se retourner.

"Pourquoi tu me suis ?"

Kemil sourit comme si la question l'amusait vraiment. Armel amusait beaucoup Kemil, bien qu'il ne sache jamais pour qu'elle raison exactement. Il avait apprit à ne pas se sentir vexé mais ce soir il n'était pas d'humeur.
Il attrapa Kemil par les sangles de sa protection et le repoussa contre le mur, se mettant sur la pointe des pieds pour atteindre son visage.

"Laisse-moi tranquille."

La voix d'Armel était sèche, bien plus sèche qu'elle ne l'avait jamais été quand il s'adressait à Kemil mais il n'eut pas le temps de ressentir de remords qu'il entendit la porte du salon s'ouvrir.

Kemil et lui tournèrent la tête d'un même mouvement vers la provenance du son mais ne changèrent rien à leur position, Armel sur ses pointes, le torse à quelques centimètres de celui de Kemil et ses mains aggripées aux les sangles de cuir.

Andreaz referma doucement la porte dans son dos en fixant les deux hommes sans un mot.

Le silence pesait sur Armel et il finit par froncer les sourcils et se reculer, lâchant Kemil et reposant ses talons au sol. L'homme à la peau sombre, lui, resta immobile contre le mur, ses mains encore de part et d'autre de son visage dans un geste d'apaisement destiné à Armel.

Andreaz aussi resta immobile, dos à la porte et une main encore sur la poignée. Il fixait Armel et Kemil l'un après l'autre, toutes ses questions et ses hypothèses défilant rapidement derrière ses yeux sombres.

"Bonsoir Andreaz."

Les lèvres pâles du vampires s'ouvrirent doucement et son bras retomba le long de son corps. Il ne fixait désormais plus qu'Armel, incrédule.

"Armel..."

Son murmure fit aussi mal à Armel que s'il avait hurlé son prénom.

Il voulait partir, il voulait le fuir.

Il voulait prendre son visage entre ses mains et embrasser ses lèvres froides comme si plus rien n'existait autour d'eux.

Revoir Andreaz avait réveillé en lui quelque chose dont il ne soupçonnait même pas l'existance. Une sensation de vide similaire à celle qui l'avait rongé pendant de nombreux mois auprès du vampire.
Comme si, en quelques minutes seulement après l'avoir retrouvé, Andreaz avait réussi à absorber toute vie et émotion de son corps et son esprit.
Armel se sentait vide ; Il se sentait lasse et voulait fermer les yeux pour s'oublier.
Comme avant ; Comme il le faisait quand Andreaz lui disait de l'attendre.

Il n'avait pas ressentit cette sensation une seule fois depuis qu'il s'était mit à vivre avec Isania et Kemil. La jeune femme l'avait rendu fier ; L'homme l'avait rendu heureux. Armel avait souri, il avait parlé et s'était senti vivre.
Mais depuis qu'Andreaz était entré dans le salon il se sentait disparaître.

Et il n'aimait pas ça.
Mais il n'aimait pas non plus ces quelques mètres de distance entre le vampire et lui.

Il aimait voir le sourire franc de Kemil et il aimait la chaleur des mains d'Isania quand elle l'effleurait doucement chaque fois qu'elle le croisait.
Mais une part de lui voulait plonger dans un lac glacé et se laisser noyer dans la sensation de son corps se refroidissant et son esprit s'engourdissant.

Armel fit un nouveau pas en arrière.
Kemil secoua lentement la tête, un air triste sur le visage.
L'homme en noir fit un pas en avant et prit le visage d'Armel en coupe pour le relever avec avec douceur.

"Il va te tuer."

Armel sourit doucement.

"Il m'a déjà tué."

Armel & Andreaz : Le Nouveau MondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant