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Armel ne reprit réellement connaissance que dans un canapé de velour.
Avant cela il avait sentit Kemil le soulever, Isania et l'autre homme donner des ordres et la chaleur d'une maison remplacer la fraîcheur des nuits d'été. Il avait entendu des son, vu des images floues mais son esprit n'avait pas été capable de comprendre ce qu'il se passait autour de lui.

Il reprit connaissance lentement sur des coussins moelleux, s'acoutumant progressivement aux sons et aux sensations avant de se décider à ouvrir les yeux.
Il reconnu la voix d'Isania et les muscles de son visage se detendirent un peu, bien qu'il n'ai pas eu conscience qu'ils se soient contractés.
Un autre homme échangeait des mots avec elle, un homme dont la voix mélodieuse remplissait délicatement l'esprit d'Armel et faisait frémir sa peau.

D'une manière assez paradoxale, il aimait la voix de l'homme mais elle le rendait nerveux.
Une main chaude se posa sur son torse et il ouvrit doucement les yeux.

Isania était auprès de lui, assise sur le bord du canapé dans une position qui ne devait pas être confortable tant elle était précaire. Le silence se fit dans la pièce et les yeux marrons de la jeune femme accrochèrent ceux d'Armel.

"Tu m'as inquietée."

Il esquissa un maigre sourire. Il inquiétait souvent Isania. Ou peut-être étais-ce elle qui s'inquiétait souvent pour des choses qui ne le méritaient pas.
Sa gorge était sèche et son ventre vide lui faisait mal alors Armel ne répondit rien.

L'homme à la voix suave prononça quelques mots qu'Armel n'eut pas le temps de comprendre et Isania se releva, sa main chaude quittant son torse. Armel fronça les sourcils et se redressa sur ses coudes et une femme se précipita à son chevet.

Elle avait les cheveux courts.
Ce fut la première pensée d'Armel quand il la vit et il fixa les mèches châtain de la femme avec ahurissement. Elle aurait pu être sa mère tant elle était âgée, peut être même sa grand-mère.
Les traces sur son visage étaient plus épaisses que celles d'Aziraph, presque aussi épaisses que celles du vampire mort, et moins nombreuses aussi.

Sans un mot elle porta une coupe à la bouche d'Armel et Armel pinça les lèvres par réflexe. Il n'aimait pas qu'on le force à faire des choses, encore moins boire des liquides qu'ils ne connaissait pas.
Il se recula et se redressa lentement jusqu'à s'asseoir, les jambes croisées sur le canapé de velour rouge.

"Il faut boire, jeune maître."

Armel fixa la coupe d'argent en silence. La femme était à genoux devant lui, les mains tendues pour lui proposer la boisson et le visage sérieux, presque inquiet.
Le liquide était rouge et semblait épais ; Ça n'était pas du vin.

Il secoua négativement la tête.
Isania poussa un soupir et revint s'asseoir près de lui et sa main fine et chaude trouva sa place sur sa cuisse.

"Armel,"

Mais Armel secoua de nouveau la tête avant qu'elle n'ai pu parler. Il connaissait ce ton, il ne l'aimait pas. Elle l'utilisait comme si elle parlait à un enfant récalcitrant. Elle l'utilisait qand elle voulait qu'il fasse quelque chose que lui ne voulait pas faire.

"Tu dois boire, c'est pour ton bien."

Il secoua de nouveau la tête et détourna son regard de la coupe pour observer la salle.
Aziraph était assis sur un canapé en face de celui d'Isania et lui, une jambe croisé sur l'autre et un bras sur le dossier. À son côté était assis un adolescent à la peau sombre et au maquillage doré, uniquement vêtu d'une tunique beige ornée d'un harnais de cuir sur son torse et sa gorge.

Plus loin, près de la porte close, se tenaient un homme et une femme, tous les deux armés d'épées au pommeau d'argent.

Armel se sentait mal a l'aise. Il n'aimait pas être entouré de gardes armés. Il n'aimait pas être enfermé dans une salle qu'il ne connaissait pas.
Il ne savait pas où était Kemil.
Il ne savait pas où était Andreaz.

En face de lui, Aziraph décroisa ses jambes et se pencha en avant, tendant sa main blanche vers la femme à genoux. Elle l'entendit bouger et se retourna pour la lui donner sans lui jeter un regard.

Il l'attrapa en fixant les yeux d'Armel et la porta à ses lèvres, lentement. Il en bu une gorgée sans quitter ses iris bleus puis l'écarta de sa bouche.
Ses lèvres étaient désormais rouges et brillantes. Ses paupières étaient presque fermées de plaisir mais il parvint à garder son regard heterochrome fixé sur celui d'Armel.

Après quoi il tendit de nouveau la coupe à la femme qui la reprit et la tendit de nouveau à Armel.

"Tu vois,"

La voix d'Aziraph était suave et son regard était perçant ; Il attirait Armel autant qu'il le repoussait.

"La coupe n'est pas empoisonnée. Bois maintenant."

Armel réussit finalement à se soustraire à son regard et détourna les yeux vers le reste de la pièce.
Il y avait une cheminée, des bibliothèques remplis de parchemins et deux bureaux. Il y avait aussi un énorme fauteuil de velour vide et une femme au cheveux bouclés se tenait près de la fenêtre. Elle fixait la rue sans bouger d'un millimètre.

"Je n'ai pas besoin de sang."

Sa voix était rauque et il toussa quelques seconde à la fin de ses mots, le visage tiré en une grimace douloureuse.

"Je ne suis pas un vampire."

Isania ne dit rien à ses côtés, Aziraph non plus d'ailleurs, mais le garçon à la tenue légère se releva lentement. Ses gestes étaient gracieux et Armel le regarda s'approcher sans un mot, hypnotisé.
La femme âgée se releva et se plaça sur le côté pour laisser à l'adolescent le loisir de se tenir debout face à Armel.

Sa tunique était courte ; Elle s'arrêtait sur ses cuisses et sur la peau sombre de celles-ci dépassait un harnais de cuir marron qui ensserrait ses muscles et descendait jusqu'au dessus de ses genoux. Armel était tenté de le toucher, intrigué, mais il garda ses main sur ses chevilles croisées.

"Tu n'est peut être pas un vampire à part entière,"

Armel recula vivement dans le canapé.
L'adolescent parlait sa langue.
Il y avait des mois que personne ne lui avait pas parlé dans cette langue.

"Mais tu en as les caractéristiques. Tu as faim, tu dois boire. Sinon tu deviendras vraiment malade."

Armel secoua négativement la tête à peine la fin de la phrase prononcée.
Il n'était pas un vampire, il ne l'avait jamais été.

Alors le garçon plongea deux doigts dans la coupe et les porta à la bouche d'Armel.
Il les glissa lentement sur ses lèvres et, avant qu'Armel ne comprenne ce qu'il se passait dans son propre esprit, il aggrippa le poignet de l'adolescent et ouvrit la bouche.

Il avait faim.

Armel & Andreaz : Le Nouveau MondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant