Un bain écarlate

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/!\ Âmes sensibles s'abstenir /!\

Il fait déjà nuit... La lune est parfaitement visible, je l'admire depuis déjà de longues minutes. Je me surprends à être parfaitement  fasciné par l'aura qu'elle dégage. Elle semble à la fois si rassurant et si effrayante. La blancheur de sa lumière brille de mille feux mais d'un autre côté la pâleur de cette dernière lui retire toute once de chaleur. Elle semble triste, froide et dure. Sa blancheur se diffuse de manière précise, sans omettre un seul recoin, elle se permet même d'envahir ma chambre, de la noyer de son doux  froufrou.

Je respire calmement, je ne suis pas inquiet. Je me sens même apaisé, c'est probablement étrange mais c'est l'état d'esprit dans lequel je suis. Je suis à la fois parfaitement calme et d'un autre côté je suis même extatique dans une certaine mesure.  Mais cette émotion ne dure pas longtemps, elle finit toujours par s'échapper et rejoindre son amie lointaine la lune. Et j'ai alors l'impression d'être vide. Oui, c'est ça. En fait, je ne suis pas calme, je suis simplement dénué de toute émotion. J'ai l'impression d'être un réceptacle défectueux, comme si mon corps n'était plus capable de ressentir la joie, la douleur ou bien encore la tristesse. Tout ne semble être qu'un vague concept. Je n'arrive même pas à me rappeler ce que cela fait d'être heureux. C'est comme si cela faisait des années déjà que je n'étais qu'une vulgaire poupée de chiffon.

Et pourtant je sais que dans cet après-midi j'ai connu quelques minutes de pure extase. Je sais aussi que j'étais triste, blessé et détruit au plus profond de moi mais que sa personne est venue me réconforter. Je le sais, je suis parfaitement capable de mettre des mots sur ces choses que j'ai ressenti un peu plus tôt mais... une case semble manquer comparé à tout à l'heure. Cette case qui filtre les sentiments et qui me permet de les ressentir. Elle a comme disparu. Je comprends les notions d'émotions mais je ne les ressens pas, ils sont fades, abstraits. C'est étrange... Je n'aime pas quand ça me fait ça. Ça m'arrive souvent, très souvent. En général quand je suis très triste ou déçu d'un coup, mon corps semble s'abstraire de tout état d'âme et alors il se détache de lui-même.

Un sentiment profond d'apathie.

Oui, c'est bien ça. Une apathie parfaite. Une indifférence parfaite face à ce monde cruel. Je n'ai plus d'intérêt spirituel ou affectif. En réalité j'ai l'impression d'être le parfait spectateur de ma propre vie. Je ne m'identifie même plus à moi-même. Sur le court terme cette sensation est parfaitement extatique. On sait qu'on ne ressent plus rien et c'est jouissif de se dire qu'on ne peut plus être blessé, qu'on ne peut plus avoir mal, que toutes ces pensées me disant de mourir ne m'atteignent plus. Mais quand cet état s'inscrit dans la durée, il est destructeur. Je me sens fatigué de ne plus être moi et je veux simplement en terminer. Finir cette vie et espérer ressentir une échappatoire pendant les brèves minutes qui vont précédé ma mort. Peut-être que ce geste de détresse extrême permettrait alors à mon corps de se rappeler de quelques émotions avant qu'il ne disparaisse totalement.

Cette idée me hante.

Elle m'appelle, elle me tourmente. Je n'ai plus envie d'être. Je me sens simplement fatigué de mener une existence si pénible. Je sais qu'à cet instant je ne ressens rien mais quand cet épisode apathique se terminera la fatalité me frappera à nouveau de plein fouet. Je serais encore en proie à de nouvelles pensées suicidaires, plus fortes encore que celles que j'ai à cet instant précis. Au moins là de-suite, l'idée de couper les fils de ma vie ne m'inquiète pas. Je ne ressens pas non plus de tristesse ou d'anxiété. Non, je suis parfaitement indifférent, comme si dans le fond mon cerveau ne comprenait pas ce concept de la mort. Il semble avoir oublié ce qui mourir signifie.

Lune de sang [BoyxBoy]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant