Chapitre 25

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[Je vous présente le crayonné d'un dessin pas tout à fait érotique, mais qui suggère plus ou moins la chose. J'ai très envie de réaliser des dessins de ce genre, mais il existe peu de références sympathiques. J'espère que ce compromis vous plaît malgré tout]

Lyssandre admirait l'une des cours internes de Yersach. Celle-ci était réservée aux rares familles qu'abritait le maître des lieux, le peuple ayant accès qu'à l'enceinte de la forteresse, non à l'ensemble de celle-ci.

Lyssandre aurait jugé cette cour sans intérêt si Artell ne lui avait pas soufflé ce qui faisait sa spécificité. Cette cour était vieille de plusieurs siècles et était restée dans son état d'origine. Protégée des intempéries, toujours plus violents à mesure que l'hiver s'installait durablement, par un dôme en verre, seule touche de modernité dans ce château qui ne croulait pas sous le luxe ostentatoire, elle avait survécu à l'épreuve du temps.

Nommée la cour de l'Avant, elle suscitait une réelle fascination de la part de Lyssandre. Il y passait de longues minutes à dépouiller de l'usure la structure, les statues qui s'entortillaient sur le bord des toits, contre les fenêtres. Le désordre des corps évoquait spontanément les combats, mais lorsqu'on s'approchait, l'ambiguïté se confirmait. Les visages, parfois très abîmés, semblaient exprimer à la fois la douleur et l'extase. La détermination guerrière et l'abandon. Une jouissance allégorie de la prospérité d'une terre.

Cette cour avait survécu sans que Lyssandre ne sache comment. Yersach avait subi d'importantes dégradations au début de leur ère. La cause était aussi nébuleuse que la raison pour laquelle seule cette part de la forteresse avait été conservée. Il n'était resté de Yersach, et d'après le récit très succinct d'Artell, que des ruines.

— Altesse.

Cassien était apparu à ses côtés sans qu'il ne le remarque et sa discrétion aurait pu être une menace pour le prince.

— Vous me cherchiez ? s'enquit celui-ci, le plus tranquillement du monde.

— Artell m'a chargé de vous dire qu'il vous attend dans la cour nord à seize heures. Il essaie de se débarrasser de Tryarn avant.

— Vous joindrez-vous à nous ?

Le chevalier s'était immobilisé en haut des deux marches qui s'ouvraient sur la cour. Impassible, fidèle à ses habitudes, Lyssandre le retrouvait tel qu'il avait toujours été. Peut-être plus rigide encore, à la fois plus effacé et plus dévoué que jamais.

— Si vous me le demandez.

— Je vous le demande.

Le regard de Cassien se déplaçait sur les figures enlacées, parfois indiscernables tant l'entrelac de bras et de jambes constituait une œuvre d'un seul tenant. Lyssandre n'y vit pas une quelconque curiosité artistique, mais de l'embarras.

— Je vous rejoindrai.

Artell avait été chargé de l'entraînement de Lyssandre. Une requête du prince qui avait été appuyé par Tryarn. Il avait été incapable de croire que Soann ait pu négliger l'apprentissage militaire du dernier de ses enfants. Malgré l'attachement que feu le roi alimentait à l'égard de la guerre, il avait cru bon de dispenser Lyssandre de l'enseignement. Il l'avait rendu vulnérable et il ne pouvait qu'en avoir conscience.

Cassien aurait se charger d'inculquer au prince les rudiments de défense, au moins de quoi survivre plus que quelques minutes sur un champ de bataille. Artell avait été formel : Lyssandre ne serait jamais un combattant. Le général ne pouvait espérer que limiter la casse en lui faisant profiter d'épuisantes leçons, tantôt au corps à corps, tantôt arme à la main. Cassien aurait pu retenir ses coups plus que nécessaire, d'autant plus que ses réflexes prodigieux et ses aptitudes faisaient de lui un piètre professeur. Il n'avait nul besoin de décomposer les gestes pour les accomplir et il était bien incapable de les expliquer à un autre. Artell était bien plus apte à s'armer de patience et à ne ménager le prince sous aucun prétexte. Celui-ci attendait ces sessions avec appréhension. Le général était d'une intransigeance méthodique et ne mettait pas un terme à leurs échanges tant que des progrès n'étaient pas observés. Ainsi, il n'était pas rare que l'entraînement se poursuive jusqu'à la nuit tombée.

Longue vie au roi - T3 [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant