L'inconnue sous Geôle

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{ RAPPEL } ~  Au moins, je suis radicale. Ils ont l'air d'avoir compris.
Je parcourais une dernière fois la pièce du regard, submergée par la beauté de celle-ci, puis avançait d'un pas, puis deux, sans me retourner. C'était un aurevoir définitif, car je refusais de revenir la voir avec le sang que j'aurai sur les mains une fois libre de nouveau.
Adieu, petite. Merci. ~

J'avançais particulièrement lentement juste pour agacer mes geôliers, dont l'un soupirait toutes les cinq secondes.
- Hé, toi. Ne t'étonne pas de ne trouver personne avec ce caractère. Arrête de soupirer, tu vas déclencher une tempête. 
Grey : Que... 
- Je reformule. Tais-toi, par pitié, tu m'agaces à soupirer et marmonner.
Yukino : Il... a quelqu'un.
- La pauvre.
Grey : La ferme.

Je pouffais de rire dans mon coin devant ses oreilles rosies.
Ça rappelle de bons souvenirs, ça.
Ainsi, le trajet passa. Je finissais par traîner des pieds en marmonnant dans ma barbe ma chanson.
Yukino : Dîtes.
- Mmm ?
Yukino : Votre nom. Qu'en est-il ?
- Je m'appelle Cynthia Mokushiro. Ou Hikawa, comme tu veux, je m'en moque.

Merde. J'ai gaffé.
Pouvais-je toujours me considérer comme une Mokushiro malgré sa mort ? Et lui, allait-il en être un ? Qui allait-il devenir ?
Yukino : Avec quels caractère pour le nom de famille ?

Double gaffe. Je vais devoir donner les caractères de mon premier nom. Attends... y'en a pas, de profonde signification à Hikawa. Parce que...
Mokushiro. Mokushiro était écrit avec les caractères « Apocalyptique ». Sa signification était donc évidente... ce nom parlait de lui même.
- Je ne connais pas les caractères d'aujourd'hui. Je connaissais ceux d'avant.
Yukino : Vous êtes donc âgée.
- Il suffit des questions. J'en ai marre.

Je pourrais surtout faire de nouveau une gaffe.
Grey : N'est-ce pas pour ça que t'es là ?
- La ferme.

Je soupirais d'agacement avant de continuer de m'avancer dans cette forêt que je quittais petit à petit. La maison de Lyla était désormais au loin, là où le Soleil se couchait. L'horizon me semblait loin, si loin, que sa vision m'en était insupportable. Cette distance lointaine était celle qui me séparait de mon ancienne vie. Celle qui me séparait de mon bonheur passé. Les arbres semblaient, vu d'en bas, absorber le ciel d'un bleu nuit éclatant qui se mettait en contradiction avec les nuages clairs, et les étoiles d'un blanc aveuglant tachetait celui-ci comme pour montrer que malgré l'ombre, la lumière restait là pour l'équilibre du monde. Le silence se fit : seuls les animaux nocturnes chantaient alors que ma voix chuchotée se mêlait à la leur. Et c'est en entendant cet havre de paix malgré mes poignets enchaînés que je sus. Je sus ce que j'allais bien pouvoir lui transmettre, leur transmettre. Je ne pouvais que fermer mes yeux et laisser le vent souffler dans mes longs cheveux toujours attachés par la cuisine de tout à l'heure. Je rouvris ainsi mes paupières en souriant.
Je vais lui parler de lui. Lui dire que le monde peut-être cruel, mais que lui ne devait pas oublier son histoire, ni la mienne.
Je pouvais voir les mages m'observer, perplexes, du coin de l'œil, sûrement car ils devaient penser que sourire n'était pas approprié en cette situation. L'Ombre ne disait rien, mais son Jumeau papotait tranquillement avec son ami qui hurlait sa réussite. Le mage de glace m'analysait d'un regard assassin, la blonde d'un regard étrange, comme peinée par la folie qu'elle devait soupçonner chez moi. La Blanche, elle, semblait sourire elle-aussi devant le visage attristé de Lucy. Comme si elle, ce sourire sincère que je venais de faire ne l'avait pas préoccupée, comme si elle avait lu en moi en ces jours lourds.
Je me couvrais de ma veste tant bien que mal, cachant toujours mes hanches que ma belle et précieuse cape noire trouée serrait, et j'avançais, pas par pas, vers là où l'on me le demandait. Je n'espérais qu'une chose : que ces liens seraient simples à briser pour détruire leur monde le jour du festival du Roi Dragon. J'étais prête à tout, prête à passer les deux prochains mois en cellule si l'on ne me laissait pas seule quand j'étais réveillée.
Ainsi, le temps passa. La nuit était dorénavant complètement tombée, mais mes yeux s'étaient habitués à cette obscurité progressive. Nous arrivâmes à leur guilde, celle de Fairy Tail, puis ils descendirent dans ce qui devait être un sous-sol avant de se diriger vers des cachots. Encore des cachots. La boule au ventre, je me laissai alors attacher à un mur par précaution des mages malgré la peur qui m'enivrait, malgré les frissons de dégoût qui parcourait mon échine, malgré la haine qui m'envahissait, qui envahissait mon cœur. Ces chaînes n'étaient que mauvais souvenirs, mais ces souvenirs étaient restés ancrés sur ma peau. J'en avais même gardé des cicatrices physiques, notamment la dernière que l'on m'avait infligée : celle sur le rein, faite juste avant que la femme aux cheveux couleur sang ne me libère. Mais j'en avais surtout gardé une cicatrice morale : cela me faisait peur. Cette peur n'était pas anodine : Acnologia lui-même s'en était rendu compte, s'était rendu compte de mes crises.
Une fois ceci étant fait, la femme, qui par ailleurs, vue de plus près, ressemblait à ma sauveuse d'autrefois, croisa ses bras et se planta devant moi. Ses traits féminins mais cette allure forte prouvaient son lourd passé, et prouvaient son courage d'aller de l'avant. Ma question, avant même que je ne le pense assez fort que matérialiser une phrase polie, sortit.
- Dis-moi, toi.
Erza : Hein...?
- Ta mère. Elle te ressemblait ? S'il te plaît, cette question commence à me bouffer. J'ai déjà vu ces cheveux rouges. J'ai besoin de savoir.
Erza : Je...

Personne n'osait rompre le silence qui venait de prendre place. La femme m'observait, mais elle semblait comme paralysée, tendue. Elle hésita un long moment, tous restaient scotchés à ses lèvres.
Erza : Tu connaissais ma mère ?
- Donc tu es bien sa fille. Je vois. Sache-le, tu as eu une bonne mère. Elle t'a beaucoup protégée. Merci, jeune fille.
Erza : Pourquoi ?
- J'ai juste une dette envers cette femme. C'est tout ce dont tu as besoin de savoir.

Je tournais le visage dans la direction opposée avant de soupirer longuement. Quelle ironie du sort. Je venais de rencontrer la fameuse fillette que la femme a protégé ce jour-là. Le pire, c'était que la première fois que j'avais vu ce visage, cela ne m'avait pas frappé : j'avais pourtant combattu la dénommée Erza.
Estime-toi heureuse, tu survivras donc à cette nouvelle guerre. Tu as de la chance.
La rouquine, perplexe, tourna les talons, accompagnée par son groupe.
Attends... ils partent...? Non... il ne faut pas que je reste seule dans une cellule ! J'ai... j'ai...
Je commençais à m'affoler, à suffoquer de peur de rester ainsi sans nourriture ni eau. Mais ils n'eurent pas la moindre pitié pour moi, et montèrent les escaliers qui se trouvaient juste en face de moi. Ce ne fut qu'une fois partis que je décrispais mon visage et dégageais mon sourire forcé : les larmes montaient encore.
Il faut croire que le traumatisme est plus grand que prévu. Acnologia m'avait vite détachée, et il était toujours là quand je me réveillais. Je n'avais donc pas peur. Mais eux, qu'en est-il ? Et lui ? Il ne va pas survivre, ainsi !
Je commençais à perdre pied et à trembler de toute part. Un malaise profond m'envahissait, et une remontée acide pris place. Je commençais à vomir tout ce que je pouvais sur le côté, le cœur tambourinant comme ce jour-là. Ma gorge se fit sèche, mes larmes abondantes, et mon estomac vide dégageait tout ce qu'il pouvait dégager. J'avais énormément de mal à respirer, et je pouvais même revoir un couteau me trancher les veines.
Un bruit s'éleva dans la nuit, me faisant relever la tête. Mes tremblements ne cessaient pas, et la personne qui arriva semblait choquée. Je tentais vainement de m'arrêter de pleurer, tentant de reprendre mon visage ferme. Mais seule une voix distordue parvint à s'échapper.
- Toi... n'importe qui... me laissez pas seule... s'il vous plaît...

Ce fut Yukino qui se tenait devant ma geôle. Elle semblait figée, comme choquée par ce qu'elle venait de voir.
Yukino : Que vous arrive-t-il ?
- Contrairement... à vous, pauvres mages... je n'ai pas oublié ce que l'humain m'a fait... en voici... le témoignage même...

Elle recula à pas lents, comme si elle avait peur, et je me rendis compte que malgré les chaînes anti-magie, la mienne s'éparpillait dans l'air. Je baissais l'intensité de celle-ci, légèrement calmée par sa présence, et réessayai de parler.
- Attends...
Elle commença à courir, fuir pour prévenir ses alliés. Désespérée, je parvins à hurler.
- YUKINO, JE T'EN SUPPLIE ! AIDE-MOI ! MOI, JE PEUX SURVIVRE SANS NOURRITURE... MAIS LUI...

Elle s'arrêta brusquement mais ne se retournait pas. Elle attendait que je finisse ma phrase mais ne parvenait pas à cacher sa peur.
- Lui... lui il ne pourra pas survivre... aide-moi... ce n'est pas... tous les jours que je supplie... mais... s'il te plaît...

La Blanche ouvrit de yeux surpris, alors que doucement, je parvins à relever le tissu qui couvrait mon ventre.

Je te Vengerai, Acnologia { Acnologia x OC }Où les histoires vivent. Découvrez maintenant