Retour à la Grotte

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Il agitait frénétiquement les ailes sans s'épuiser, moi sur son dos imposant de Dragon, faisant un détour ou deux pour que nous prenions un peu l'air après cette course-poursuite. Le soleil avait pris place, chassant ces nuages cruels et cette pluie agaçante de toute part. J'avais froid, mais ses rayons m'aidaient à ne pas grelotter. Acnologia, lui, soufflait régulièrement, toujours visiblement énervé, même s'il l'était un peu moins que tout à l'heure. Le coeur lourd, je chantonnais une berceuse pour apaiser mes peurs et cauchemars éveillés.
Nous étions incroyablement silencieux, un malaise régnait. Qu'allait-il me faire ? Allait-il me renfermer ? Je ne le savais point, et savourais donc la fraicheur de l'air qui emplissait mes poumons apaisés tant qu'ils pouvaient encore respirer ( parce que je doutais de pouvoir le faire encore longtemps ). M'échapper était dorénavant quelque chose d'impossible. Il allait me surveiller bien plus. J'allais donc sûrement passer le restant de mes jours, soit l'éternité, à croupir dans une cellule, attachée. Pire encore, si je sautais là maintenant du haut de ces cent mètres, j'étais sûre de mourir la colonne vertébrale brisée. Ainsi, sur cet état d'esprit ridicule avec une touche d'espoir qu'il me pardonne, bien que ce soit stupide, je m'accrochais désespérément à ses écailles éclatantes sous ce beau soleil , qui par ailleurs étaient bien plus douces qu'elle n'y paraissaient, et je m'endormis profondément de fatigue.

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Lorsque je sortis de mon paisible et doux sommeil, j'étais sur quelque chose d'incroyablement confortable. Mon mal de dos dû aux mauvaises positions de sommeil de ces derniers jours s'était estompé, me faisant lâcher un soupir de contentement. La place était emplie d'une douce chaleur, et j'avais également une couverture très agréable sur moi. Je refusais d'ouvrir les yeux et espérais que tout ne fut que cauchemar. Que j'étais toujours enfant.
M'man... P'pa. Me voyez-vous de là où vous êtes ?
Je me retournais lentement sur le côté en aplatissant mon visage sur la couette. Mes longs cheveux avaient maintenant complètement séché, et étaient désormais éparpillés en un désordre total sur mon corps. Je grognais de mécontentement à l'idée de sortir de ce nid. Pourtant, il le fallait.
Ainsi, j'ouvrais les paupières le plus lentement du monde. Et les faits étaient incroyablement différents de ce que j'avais  pensé.
Quelque chose d'un noir profond me recouvrait. Une aile. J'étais également installée entre ce qui semblaient être deux pattes, l'une avant, l'autre arrière, d'une immense créature. J'étais donc complètement sous l'aile. Peut-être avais-je tremblé de froid et qu'il avait voulu m'aider.
Impossible. On parle d'Acnologia, là. Ce qui est sûr, c'est que je suis particulièrement bien installée. J'en oublierais presque l'affront que je lui ai fait.
En tout cas, lui ne dormait pas et me dévisageait de ses pupilles de Dragon avec précision. Il avait malgré sa transformation le menton haut, comme lorsqu'il était humain, mais contrairement à ces fois où je l'avais vu ainsi, il ne semblait pas menaçant : la magie autour de lui n'était pas oppressante. Ce n'était pas désagréable.
Acnologia : Tu es réveillée, Déesse.
- Dragon...?
Acnologia : J'espère que tu as profité, parce qu'une fois que tu seras bien réveillée, tu ne t'en sortiras pas aussi facilement.
- En ce cas, puis-je profiter encore un moment ?
Acnologia : Non. Bouge de là. Maintenant.
- Mais je suis bien, là...

Celui-ci soupira d'impatience, avant de tourner la tête de nouveau vers moi en un souffle. Il semblait résigné à ma persistance devant les yeux que je lui lançais : des yeux insistants et calmes. Plus pour longtemps, certes. Mais qu'importait.
Je fermai de nouveau les yeux, sans toutefois me rendormir. Je voulais juste sentir plus longtemps cette chaleur.
Acnologia : Déesse. Pourquoi t'es-tu enfuie ?

Je rouvris des yeux surpris à sa demande.
- Comment cela ?
Acnologia : Dois-je reformuler, femme ?
- Non. J'ai très bien compris. Mais...
Acnologia : Viens-en aux faits.
- Tu n'es pas énervé ?

Malgré son visage actuel, je parvenais à lire de la surprise par son mouvement de recul même léger.
Acnologia : C'est moi qui pose les questions, ici.
- Tu me l'as déjà dit, ça.
Acnologia : Dans ce cas, tais-toi.
- Dragon, ne voulais-tu point que je réponde à ta question ?
Acnologia : Tu commences sérieusement à me les briser, femme. Réponds à ma foutue question. Maintenant.
- ...

Je le dévisageais longuement pendant qu'il sifflait du nez. Je savais que je tirais sur ses codes sensibles, soit sa longue patience, mais c'était plus fort que moi.
- Parce que... j'ai eu peur ? J'étais agacée ? Saoulée par la captivité ?
Acnologia : Tu ne le sais pas toi-même ? As-tu conscience que ta médiocrité d'esprit a failli te tuer aujourd'hui ? Si je n'avais pas été là, tu...
- Je le sais. Mais t'en rends-tu compte, Acnologia ? Te rends-tu compte de ce que tu dis ?
Acnologia : Ravale ta salive, tourne ta langue vingt fois dans ta bouche et tache de vérifier si tu penses réellement que ce que tu vas dire est utile ou intelligent. Sinon, tais-toi.
- Acnologia. Je suis sincère.

Il devait très certainement froncer les sourcils car les traits au niveau de son front étaient plissés. Je le regardais pour tenter de lire ses pensées secrètes.
- Je sais que tu sais ce que tu dis. Mais... ça m'a blessée.
Acnologia : Ne dis pas d'idioties plus grosses que toi. Il est impossible d'être blessé par des vulgaires mots. C'est insensé.

Je soupirais en réponse.
Il n'a pas compris ?
- Bien. Je vois qu'il est impossible de discuter avec toi, Dragon. À quoi je pensais, que tu allais te remettre en question? Et bien renferme-moi, injure-moi, tue-moi. Tu es Acnologia après tout. Tu es monstre, le pire de tous. Je savais que je ne devrais m'attendre à rien, pas même un effort de toi.
Acnologia : Quoi ?! Femme, tu...!

Je me levais difficilement de mon confort pour me diriger de moi-même vers ma cellule. Jamais je n'aurais cru un jour faire la morale au Roi des Dragons et en ressortir saine et sauve.
Que pouvais-je faire ? Il n'y a pas moyen qu'il comprenne. C'était une perte de temps.
Pire encore, je n'avais pas été honnête avec lui. Parce que en ces jours, je savais qu'il n'était pas juste une créature horrible qui ne pensait qu'à lui. Ce repas, ces soins, ce bain. Cette expression sur son visage alors que pour la première fois il m'avait appelée par mon nom et que dans un élan de quelque chose, que je n'avais jusque là pas identifié, je lui ai conté mon histoire. Et puis... malgré ma fuite, à sa manière, il avait voulu comprendre. Il m'avait sauvée comme il l'avait si gentiment souligné de la mort. Et puis même après cela.... comment il m'avait aidée.
Il ne m'avait pas poursuivie dans la grotte, j'étais donc parvenue de moi-même jusqu'à cette étendue d'eau où j'étais avant de partir. Je parvenais juste à sentir comme toujours sa magie, quoique un peu plus forte depuis que je lui avais parlé. Comme si... à chaque fort ressenti, la magie ambiante le surplombait, il l'absorbait.
Réfléchit-il ? J'en doute. Alors quelle est l'émotion forte qu'il pourrait ressentir maintenant ?
De la colère ? De l'incompréhension ? Il est perplexe ? Choqué que quelqu'un lui ait résisté ? Peut-être, mais je n'en savais rien.
Je m'asseyais sur un grand rocher sur le bord de l'eau, non loin de mon cachot, dans le seul but de m'endormir de nouveau : je n'avais pas encore récupéré de mes émotions. Le courant d'air était léger et cognait contre ma peau, mais c'en était apaisant.
J'entendis soudain un pas pressé, puis un deuxième. La marche continuait inlassablement dans ma direction, avant de s'arrêter à quelques pas de mon caillou somptueux. Un soupir l'accompagnait.
Mon premier réflexe était de faire comme si je m'étais réellement endormie. Je voulais savoir ce que l'Apocalypse voulait. Peut-être allait-il me répondre ?
Une main volumineuse mais qui se voulait douce et non brutale se posa sur mon crâne. Celle-ci glissa sur une mèche pour la démêler, et il en garda une entre ses doigts qu'il lissait précieusement. Tout ça, sans aucun geste brusque. Venant de lui, c'en était surprenant. Je sentis une respiration longue, comme s'il s'apprêtait à dire quelque chose qu'il était certain de regretter ou qu'il hésitait.
Je m'attendais à ce qu'il s'abstienne, à ce qu'il abandonne, mais ses quatre mots m'avaient cloué le bec et avaient empêché mon esprit d'avoir un bon fonctionnement :
Acnologia : Cyn...thia. J... su... d...lé.

{ FIN FLASHBACK }

Je te Vengerai, Acnologia { Acnologia x OC }Où les histoires vivent. Découvrez maintenant